Projet de loi sur la construction: les deux principaux syndicats vont se battre

Publié le 06/10/2011 à 13:50, mis à jour le 06/10/2011 à 16:42

Projet de loi sur la construction: les deux principaux syndicats vont se battre

Publié le 06/10/2011 à 13:50, mis à jour le 06/10/2011 à 16:42

Par La Presse Canadienne

"On ne se laissera pas faire", "ça va brasser", "on va se battre". Quelques heures à peine après le dépôt jeudi du projet de loi qui révise le fonctionnement de l'industrie de la construction, les deux principales organisations syndicales l'ont dénoncé avec vigueur.

La mesure la plus importante du projet de loi consiste en un encadrement désormais beaucoup plus serré du pouvoir qu'ont les syndicats de référer de la main-d'oeuvre sur les chantiers de construction.

Encore le mois dernier, lorsque la ministre du Travail Lise Thériault avait rencontré la presse, il était question que le gouvernement permette que deux systèmes de référence de la main-d'oeuvre puissent cohabiter, à savoir celui que la Commission de la construction (CCQ) doit mettre sur pied, et celui des syndicats, ce dernier devant être encadré. On parlait tout de même de sanctions pouvant aller jusqu'à la perte de licence, en cas d'intimidation ou de discrimination fondée sur l'allégeance syndicale.

Mais jeudi, la ministre a annoncé que désormais, le système de référence syndical devra être sous l'emprise de la CCQ, donc que les syndicats ne pourront plus faire de référence directe de travailleurs. Ce changement est majeur.

"Pour le Conseil provincial et la FTQ-Construction, c'est clair qu'ils n'auront pas notre collaboration, ça c'est clair", a tonné en entrevue Donald Fortin, directeur général du Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (international).

"On n'embarquera pas dans un jeu comme celui-là. De toute façon, on ne pourra pas respecter les termes de la loi, même avec la meilleure volonté. S'ils ont voulu donner tous les pouvoirs à madame Lemieux (Diane, présidente de la CCQ), bien qu'elle la gère l'industrie. Et on va la regarder aller", a-t-il ajouté.

La référence de main-d'oeuvre, "la CCQ ne sera jamais capable de faire ça", parce qu'elle ne connaît pas les habiletés propres à chaque ouvrier, a prédit M. Fortin.

"On peut être menuisier dans l'industrie de la construction, mais le menuisier qui travaille à faire du coffrage sur un barrage hydroélectrique, je ne suis pas sûr que vous seriez content de le voir arriver chez vous pour faire vos armoires de cuisine", a-t-il lancé.

La FTQ-Construction et le Conseil provincial représentent à eux deux 70 pour cent des travailleurs de la construction, soit environ 110 000. Et les deux s'opposent vigoureusement au projet de loi.

Quant à savoir si le mécontentement syndical se fera sentir sur les chantiers, M. Fortin a dit qu'"on n'envisage pour l'instant rien d'autre que d'informer correctement les travailleurs de l'impact du projet de loi sur leur vie et leurs prochaines conditions de travail. Les travailleurs, après qu'ils auront été informés, ce sont eux qui décideront. Et ce qu'ils vont décider, on va l'appliquer. Ça va aller jusqu'à quoi? Je ne le sais pas. Mais je souhaite sincèrement que les travailleurs se lèvent debout et ne se laissent pas écraser."

La présidente de la Commission de la construction, Diane Lemieux, a indiqué au cours d'une rencontre avec la presse qu'elle avait instauré une sorte de "veille" sur les chantiers, pour parer à tout débordement.

Pour l'instant, a-t-elle indiqué, ce ne sont que des représentants syndicaux qui "informent" les travailleurs sur leurs droits, ce qu'ils ont le droit de faire. La CCQ surveille tout éventuel ralentissement de travail, documentera tout écart et verra s'il y a matière à plainte, a prévenu Mme Lemieux.

Plus posé, le président de la FTQ, Michel Arsenault, a reproché au gouvernement de faire une manoeuvre de "diversion" avec son projet de loi, dans le but d'étouffer la demande générale pour une enquête publique sur l'industrie de la construction.

"Ce n'est pas un problème de placement dans la construction qu'on vit à l'heure actuelle au Québec, c'est un problème de financement des partis politiques et un problème à savoir si on paie trop cher pour nos infrastructures", a protesté M. Arsenault, en entrevue.

Il rappelle que le placement ou la référence syndicale de main-d'oeuvre ne représente que 15 pour cent du travail dans la construction, et se fait pour l'essentiel sur les chantiers industriels et de génie civil, donc "85 pour cent se placent tout seuls".

Quant à la ministre Thériault, elle a réitéré qu'il ne s'agit pas d'une loi contre les deux grands syndicats de la construction, mais d'une loi "pro-travailleur, qui redonne au travailleur tous ses droits".

En plus de la référence de main-d'oeuvre, le projet de loi fait passer le nombre de membres du conseil d'administration de la CCQ de 17 à 15, incluant quatre membres indépendants.

Il modifie également le régime de négociation. Désormais, les cinq associations syndicales participeront à la négociation, peu importe leur représentativité. À l'heure actuelle, celles-ci doivent conclure des ententes entre elles pour représenter une majorité simple.

Pour qu'une entente soit ratifiée, elle devra l'être par au moins trois des cinq associations syndicales représentant plus de 50 pour cent des travailleurs. Ceci exclut donc une entente approuvée par la FTQ-Construction et le Conseil provincial, bien que ces deux représentent ensemble 70 pour cent des ouvriers.

La CSN-Construction, qui s'est longtemps plainte d'être victime de discrimination à cause de la référence de main-d'oeuvre faite par les deux grandes organisations, a bien reçu le projet de loi, tout en ayant des réserves.

Du côté des employeurs, le projet de loi a été bien reçu. Le Conseil du patronat y voit du "courage" et de la "détermination" de la part du gouvernement. La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante parle de "changements longtemps attendus".

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