En rejoignant plus de 10 millions de personnes en moins d’une semaine de diffusion sur YouTube avec Write the Future (plus de 12 millions à ce jour), en faisant le vidéo le plus populaire du site, l’équipementier américain a frappé un grand coup en vue du Mondial de soccer. Faits et stratégies.
La mère de toutes les pubs
Tournée par le cinéaste mexicain Alejandro Iñárritu (Babel, 21 grammes), la pub Write the future revisite les grandes stars de la planète foot (Cristiano Ronaldo, Wayne Rooney, Didier Drogba, Ronaldinho, etc) dans un scénario à la fois drôle et dramatique, au thème porteur et universel : le moment où tout peut basculer et où la conséquence d’un geste conduit à la gloire ou à la déchéance. La pub de 3 minutes a été saluée comme un grand moment de la publicité, voire «la meilleure de tous les temps» par certains. Elle a été réalisée par l’agence Wieden + Kennedy.
Sur les traces d’Apple
Nike s’est inspiré d’Apple en créant un hype autour de sa pub avant sa diffusion, dit Patrice LaCroix, stratège créatif au LAB Foundation. Tout d’abord en «lâchant des morceaux», diffusant à la télé des extraits de 30 secondes de la pub de 3 minutes. Et surtout, en utilisant, avant le lancement le 21 mai, une application sur YouTube ne permettant d’envoyer le vidéo qu’à une personne à la fois. «La pub de Nike circulait sur une liste interne quelques semaines avant le lancement officiel, explique Patrice LaCroix. Et déjà un million de personnes l’avaient visionnée de cette façon, créant un pré-buzz comme on n’en avait pas vu depuis longtemps. Impressionnant.»
Cross-marketing
En incluant des vedettes d’autres sports commandités par Nike (basketball avec Kobe Bryant et tennis avec Roger Federer), du monde du cinéma (le comédien Gaël Garcia Bernal) et de l’entertainment (Homer Simpson, recevant entre les jambes le ballon de Ronaldo), Nike fait du cross-marketing et atteint des publics pas nécessairement au fait de l’univers du soccer. S’il n’était pas tombé en disgrâce, Tiger Woods, autre sportif commandité par Nike, aurait très bien pu, selon les experts, faire une apparition lui aussi…
La fin du grassroot?
Avec une pub extrêmement léchée, tant sur le plan visuel que dans la réalisation et la scénarisation, Nike marque une époque, dit Patrice LaCroix. Il démontre que l’on peut faire autre chose sur le web que du grassroot, soit des vidéos tournés façon amateur dans un objectif d’authenticité. «On entre dans une nouvelle ère de pub sur le web avec des vidéos HD, de grande qualité, tournés sur pellicules.»
Cachez ce chandail
Les vedettes de Write the future sont tous des athlètes commandités par Nike mais pas les équipe nationales. Ainsi, si les Portugais et les Brésiliens affichent leurs chandails officiels Nike, ce n’est pas le cas des Français (commandités par Adidas), des Italiens (Puma) et des Anglais (Umbro). À la place, on a vêtu les joueurs de maillots ressemblant vaguement aux officiels.
Scandale en Grande-Bretagne!
Présentée en grande première à la télé lors de la finale de la Ligue des champions, le week-end du 23 mai, une erreur de signaux a privé les téléspectateurs du sud de la Grande-Bretagne des six dernières secondes de la pub. Cela a valu aux diffuseurs une avalanche de plaintes et des accusations de « scandales ». Nike avait payé 760 000$ pour la diffusion de sa pub. Par ailleurs, plusieurs British n'ont pas apprécié voir leur héros national, Wayne Rooney, affublé d'une barbe de plusieurs mois et vivant dans un parc à roulottes!
Des absents remarqués
Deux des joueurs vedettes de la pub ne sont pas présents au Mondial! Les services de Ronaldinho n’ont pas été retenus par l’entraîneur de l’équipe brésilienne, tandis que Theo Walcott vient d’être retranché du dernier carré de joueurs anglais à pouvoir s’envoler vers l’Afrique du Sud.
Nike n’a pas toujours eu la main heureuse avec le soccer
L’équipementier américain a frappé fort avec Write the future mais ça n’a pas toujours été le cas lorsqu’il s’agit de soccer. Nike était un spécialiste des sports individuels avant de commencer à s’intéresser au soccer, il y a trois décennies. Les premières campagnes ont été ratées, dit Patrick Bauduin, vice-président principal création chez Cossette. Il se souvient d’une pub diffusée il y a une douzaine d’années, mettant en scène des gladiateurs. «L’approche métaphorique était une erreur majeure. L’imagerie était décalée et le monde du soccer ne n’y est pas reconnu.» Depuis, Nike a fait ses devoirs.
