Les entreprises polluantes seront de plus en plus poursuivies

Publié le 26/10/2018 à 17:09

Les entreprises polluantes seront de plus en plus poursuivies

Publié le 26/10/2018 à 17:09

Par La Presse Canadienne

Les sociétés énergétiques seront probablement confrontées à davantage de poursuites similaires à celle intentée cette semaine aux États-Unis, qui prétend qu’ExxonMobil a considérablement sous-estimé les risques que la réglementation en matière de carbone pose pour ses actifs liés aux sables bitumineux, estime un juriste.

« Des cas concrets sont en cours d’élaboration au Canada », a assuré la professeur Cynthia Williams, de l’école de droit Osgoode Hall de l’Université York, qui a écrit au sujet de la responsabilité climatique.

« Je ne serais pas surprise de voir quelque chose dans les six prochains mois. »

Mercredi, le procureur général de New York a intenté une action en justice pour fraude contre ExxonMobil, alléguant que la société avait délibérément induit en erreur les investisseurs au sujet des risques liés aux taxes sur le carbone et à d’autres mesures visant à réduire l’utilisation du pétrole.

La poursuite, qui n’a pas encore été examinée par un tribunal, allègue que la société a déclaré aux investisseurs qu’elle tenait pour acquis que les prix du carbone pouvaient atteindre jusqu’à 80 $ la tonne. En fait, selon la poursuite, Exxon évaluait les projets à l’interne à un prix beaucoup plus bas.

Après une enquête de trois ans, le procureur général a accusé Exxon d’avoir réduit de 30 milliards $ son estimation du coût du carbone lié à 14 exploitations de sables bitumineux en Alberta, qu’il détient partiellement par l’entremise de la Pétrolière Impériale, une filiale. Des documents judiciaires indiquent que les coûts en carbone du projet de sables bitumineux Kearl ont été sous-évalués de 94 pour cent.

Le recours à de faibles estimations des coûts du carbone a aussi pour effet de prolonger la vie économique de certains actifs, a ajouté la poursuite. La durée de vie des installations de Cold Lake de l’Impériale serait réduite de 28 ans si elle était évaluée avec un prix du carbone réel.

Exxon a indiqué qu’elle chercherait à faire rejeter la poursuite parce qu’elle est sans fondement. Dans des documents déposés en cour, elle a affirmé qu’elle utilisait plusieurs méthodes pour intégrer le risque lié au carbone dans ses décisions et que la poursuite ignorait la plupart de ces méthodes.

Des experts du secteur ont également indiqué que les risques liés aux émissions de carbone dans les sables bitumineux pourraient diminuer avec l’arrivée de nouvelles technologies qui réduisent les émissions.

Mme Williams croit que les chefs de la direction devraient faire preuve de plus en plus de prudence lorsqu’ils divulguent les effets de la lutte contre le changement climatique sur leurs activités.

« Le litige en matière de changement climatique est définitivement un secteur en émergence du droit », a-t-elle estimé.

Jusqu’à présent, la plupart des cas de ce type demandaient aux sociétés de combustibles fossiles des indemnités au titre des coûts d’adaptation au changement climatique _ la construction d’une digue, par exemple. L’affaire Exxon est une nouveauté.

« Elle vise directement les responsabilités des dirigeants et des administrateurs, à savoir l’exactitude de la divulgation », a souligné Mme Williams.

Les dirigeants d’entreprises pourraient également avoir une responsabilité légale de prendre conscience des risques liés aux changements climatiques, a-t-elle observé. Les fiduciaires des régimes de retraite et autres véhicules de placement pourraient avoir le même devoir.

Selon Mme Williams, la loi canadienne permettrait tout à fait d’entamer une poursuite similaire à celle lancée contre Exxon.

« Il existe de grandes sociétés canadiennes qui courent exactement le même risque d’avoir des actifs immobilisés et nous ne savons pas encore comment elles évaluent ces risques. »

Un porte-parole du groupe écologiste Greenpeace, Keith Stewart, a affirmé que les autorités réglementaires canadiennes devraient tirer les leçons de ce qui se passe à New York.

« New York joue vraiment un rôle de leader ici », a-t-il estimé.

M. Stewart a déclaré que si les allégations dans le procès s’avéraient, cela révélerait ce que les responsables d’Exxon pensent vraiment de la lutte contre le changement climatique.

« Ils ne croient pas vraiment que des mesures seront prises pour lutter contre le changement climatique », a-t-il observé.

La poursuite cite abondamment des documents internes d’Exxon.

Elle cite un responsable de la planification, qui a indiqué en 2013 que la société avait appuyé ses décisions sur la mine Aspen, en Alberta, à partir d’un coût du carbone de 40 $ la tonne. La poursuite allègue que la société a déclaré publiquement qu’elle utilisait un coût atteignant 80 $ d’ici 2040.

La poursuite ne réclame pas de dommages-intérêts précis. Elle fait valoir que Exxon devrait être obligée de restituer l’argent investi en se basant sur de fausses déclarations.

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