Donald Trump : narcissique et dangereux pour tout le monde


Édition du 13 Août 2016

Donald Trump : narcissique et dangereux pour tout le monde


Édition du 13 Août 2016

Donald Trump. [Photo : Shutterstock]

Il n'est pas facile de décoder Donald Trump. Il a eu du succès en affaires malgré six faillites de projets d'immeubles et de casinos. Il est devenu une célébrité grâce à son autopublicité permanente et à l'émission de téléréalité The Apprentice qu'il a animée. Cependant, son parcours est chaotique.

Alors que l'establishment du Parti républicain (Grand Old Party, GOP) ne voulait rien savoir de lui, il a réussi à gagner l'investiture à la course présidentielle, au grand dam de certaines élites (famille Bush, Mitt Romney) et de financiers (les frères Koch) du Parti. Il a reçu l'appui du Tea Party, mouvement fondé pour pousser le GOP plus à droite, et de militants qui en ont contre Wall Street, les élites, les immigrants, le terrorisme et les minorités culturelles. Bref, autant de groupes qui feraient la pluie et le beau temps aux États-Unis.

Estimant que la nation s'en va à la dérive tant sur le plan intérieur qu'à l'étranger, il promet de rétablir la loi et l'ordre, de bloquer l'immigration des «terroristes, trafiquants, violeurs», de construire un mur à la frontière du Mexique, d'abolir ou de renégocier les accords commerciaux, autant de problèmes dus, selon lui, à l'incurie de Barack Obama et de Hillary Clinton.

À en juger par ses déclarations à l'emporte-pièce, les insultes qu'il envoie à ceux qu'il n'aime pas - parfois sans raison - et son égocentrisme démesuré, on peut se demander si Trump n'est pas atteint du «trouble de la personnalité narcissique» (TPN). Du moins, selon la définition qu'en donne le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, comme le prétend la journaliste et auteure Maria Konnikova, Ph. D. en psychologie de l'Université Columbia.

Conformément aux symptômes associés au TPN, Trump se voit comme le seul responsable de ses réussites (il parle de la Trump Tower comme s'il l'avait bâtie lui-même) ; il croit qu'il peut tout faire (il se dit plus qualifié que les chefs des Forces armées pour vaincre l'État islamique) ; il se dit doté d'une attirance irrésistible (il a vanté la beauté de ses mains et d'autres parties de son corps) ; il a un très grand besoin d'admiration (il dit que toutes les femmes qui ont participé à The Apprentice ont flirté avec lui «consciemment ou inconsciemment») ; il pense que tout lui est dû (il a accepté la distinction militaire «Purple Heart» que lui a donnée un vétéran sans aucune gêne, comme s'il l'avait méritée) ; il ne montre aucune empathie (il s'est moqué de la mère d'un soldat musulman tué en Irak et d'un journaliste handicapé) ; il est arrogant (il ne reconnaît pas que le sénateur John McCain, qui a été fait prisonnier de guerre au Vietnam, soit un héros) ; il exploite les autres pour atteindre ses fins (tel le GOP, comme tremplin pour espérer devenir président).

Un électron libre et menaçant

Pour son parti, Donald Trump est un électron libre qui pourrait assurer la victoire de Hillary Clinton. Il ne respecte pas les conseils de ses stratèges, il ment (il dit avoir rencontré Vladimir Poutine à une émission de télévision, ce qui est faux), il invente des complots (la vidéo, non existante, des 400 M$ supposément versés par Washington à l'Iran en janvier à titre de rançon, qu'il a dit avoir vue), il multiplie les gaffes (il admire Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan, le président de la Turquie, deux autres narcissiques dangereux), il est ignorant (il a dit que la Russie n'avait pas envahi la Crimée), il se lance dans des débats futiles (avec la famille Khan, auprès de laquelle il refuse de s'excuser) et se met à dos des leaders du Parti (il a fallu de fortes pressions du Parti pour qu'il appuie les candidatures des sénateurs John McCain et Kelly Ayotte et celle de Paul Ryan, président de la Chambre des représentants). Trump est grotesque, vulgaire, raciste, misogyne. Son discours est erratique et il parle sans retenue.

De plus en plus de leaders du GOP le jugent «non présidentiable» et lui retirent leur appui. Des gens d'affaires respectés, tels Warren Buffett, Michael Bloomberg («je sais reconnaître un con», a-t-il dit de Trump), Meg Whitman (elle l'a comparé à Hitler), Hank Paulson et Mark Cuban, ont donné leur appui à Mme Clinton. La frustration et le désespoir s'installent : Newt Gingrich, qui a appuyé Trump, croit que c'est peine perdue d'espérer le changer.

Si Hillary Clinton maintient ou creuse son avance (8 à 9 % à l'échelle nationale et davantage dans certains États), des candidats républicains en réélection au Sénat, à la Chambre des représentants ou à un poste de gouverneur pourraient décider qu'il vaut mieux se dissocier de Trump pour sauver leur peau. Le GOP pourrait non seulement perdre l'élection présidentielle, mais aussi affaiblir sa présence au Congrès. Actuellement, les Républicains contrôlent les deux chambres.

À cause de ses promesses irréalistes et farfelues, une victoire de Trump pourrait accroître les tensions sociales au sein de la société américaine, où les inégalités entre les riches et les pauvres ne cessent de croître. Sur le plan international, des accords commerciaux pourraient être remis en question et bien des escarmouches pourraient envenimer les relations avec les autres pays.

J'aime

Le gouvernement canadien a créé un comité non partisan et indépendant de sept membres pour l'assister dans la nomination des juges de la Cour suprême du Canada. Ce comité sélectionnera une liste de trois à cinq personnes «bilingues» parmi lesquelles le premier ministre fera son choix. Ce processus accroîtra la transparence dans la sélection des juges de la plus haute cour de justice du pays.

Je n'aime pas

Même si elle a été critiquée par la vérificatrice générale (VG) pour sa façon de faire, la Société des alcools du Québec vient à nouveau de lancer des appels d'offres qui fixent à l'avance des prix planchers par bouteille et des prix plafonds en magasin. Selon la VG, cette pratique ne permet pas d'obtenir les meilleurs prix. Avez-vous déjà vu un monopole qui oeuvre au meilleur intérêt des consommateurs ?

À propos de ce blogue

Tour à tour rédacteur en chef et éditeur du journal Les Affaires pendant quelque 25 ans, Jean-Paul Gagné en est l’éditeur émérite depuis 2007. En plus de publier un commentaire hebdomadaire dans le journal et de tenir un blogue dans LesAffaires.com, il participe à l’organisation d’événements et représente le journal dans les milieux d’affaires. Il est aussi appelé à commenter l’actualité dans d’autres médias et à prononcer des conférences. Jean-Paul Gagné a consacré sa vie professionnelle au journalisme économique. Avant son entrée aux journal Les Affaires, qu’il a contribué à relancer pour en faire la principale publication économique du Québec, il a passé une douzaine d’années au quotidien Le Soleil, où il était journaliste économique et cadre à la rédaction. Jean-Paul Gagné est diplômé en économie et en administration. Il a reçu de nombreuses marques de reconnaissance, dont les prix Hermès et Gloire de l’Escolle de l’Université Laval, le prix Carrière en journalisme économique de la Caisse de dépôt et placement et Merrill Lynch et le Prix du livre d’affaires remis par Coop HEC Montréal et PricewaterhouseCoopers. Il siège au conseil d’administration d’organismes sans but lucratif.

Jean-Paul Gagné

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