Coulé par la souveraineté et la charte, le PQ est déstabilisé


Édition du 12 Avril 2014

Coulé par la souveraineté et la charte, le PQ est déstabilisé


Édition du 12 Avril 2014

Selon un dicton bien connu, les élections se perdent plutôt qu'elles ne se gagnent.

Philippe Couillard a mené une bonne campagne, mais il a aussi beaucoup profité des erreurs d'exécution des stratèges et de la chef du Parti québécois. Pauline Marois n'a manqué ni de détermination ni de courage, mais elle a été dépassée par les enjeux de la souveraineté et de la charte des valeurs de son parti.

Mme Marois a décidé d'en appeler au peuple en affirmant que son gouvernement ne pouvait faire adopter ses projets de loi. Les électeurs ont compris qu'il s'agissait d'un prétexte.

Elle aurait dû, dès le jour 1, prendre le contrôle de l'ordre du jour, faire de l'économie son thème central. «It's the economy, stupid», a déjà dit James Carville, grand stratège de Bill Clinton. Le refus de Mme Marois de s'adresser aux journalistes a irrité ceux-ci, ce qui l'a amenée à se livrer, le lendemain, à une longue conférence de presse dont elle n'a pu contrôler le message central. Un départ raté.

Puis ce fut l'étoile filante PKP. L'annonce de la candidature de Pierre Karl Péladeau devait être le clou de la campagne péquiste. On aurait dû en faire le grand champion l'économie. Mais non ! Sa profession de foi souverainiste, et surtout, le poing qu'il a levé ont créé un tel malaise qu'une dizaine d'ex-leaders péquistes et syndicaux ont dû venir à sa rescousse et appuyer le soi-disant candidat vedette. Non seulement PKP a ramené à l'avant-scène la perspective d'un référendum sur l'indépendance advenant l'élection du PQ, mais il a éloigné des militants de gauche, qui n'ont pu comprendre que ce parti ait accepté dans ses rangs un chef d'entreprise de droite, auteur de 14 lock-outs. Il n'en fallait pas plus pour que l'élection soit qualifiée de référendaire, alors que les deux tiers de la population rejettent une telle consultation.

Pour séduire les électeurs francophones qui sont mal à l'aise avec les accommodements demandés par certaines personnes des communautés culturelles, le PQ a inventé une charte des valeurs, qui propose d'interdire le port de signes et de vêtements dits religieux par les employés du gouvernement, des municipalités, des institutions d'enseignement, des établissements de santé, des garderies et d'organismes qui offrent des services à l'État. Odieux !

Alors que la société québécoise est reconnue pour son ouverture aux autres et que l'on ne connaît pas un seul cas d'intolérance interculturelle dans l'administration publique, ce projet inutile a semé la controverse, divisé le Québec et amené des concitoyens à envisager de quitter la province. Espérons qu'ils se raviseront.

Avec le contraignant et non nécessaire projet de loi 14 sur le renforcement de la loi 101 et la menace référendaire, le projet de charte a fourni au chef libéral quantités de munitions pour présenter le PQ comme un parti idéologique et déconnecté des vrais enjeux, à savoir la création d'emplois et de richesse.

Les sondages défavorables ont amené la chef péquiste à improviser : promesse en fin de campagne de réduire les impôts et appel à la pasionaria de la charte, Janette Bertrand, qui est venue raconter un mauvais rêve : la perte de l'usage de la piscine de son immeuble au profit de riches étudiants (musulmans) de l'Université McGill. Pathétique !

À propos de ce blogue

Tour à tour rédacteur en chef et éditeur du journal Les Affaires pendant quelque 25 ans, Jean-Paul Gagné en est l’éditeur émérite depuis 2007. En plus de publier un commentaire hebdomadaire dans le journal et de tenir un blogue dans LesAffaires.com, il participe à l’organisation d’événements et représente le journal dans les milieux d’affaires. Il est aussi appelé à commenter l’actualité dans d’autres médias et à prononcer des conférences. Jean-Paul Gagné a consacré sa vie professionnelle au journalisme économique. Avant son entrée aux journal Les Affaires, qu’il a contribué à relancer pour en faire la principale publication économique du Québec, il a passé une douzaine d’années au quotidien Le Soleil, où il était journaliste économique et cadre à la rédaction. Jean-Paul Gagné est diplômé en économie et en administration. Il a reçu de nombreuses marques de reconnaissance, dont les prix Hermès et Gloire de l’Escolle de l’Université Laval, le prix Carrière en journalisme économique de la Caisse de dépôt et placement et Merrill Lynch et le Prix du livre d’affaires remis par Coop HEC Montréal et PricewaterhouseCoopers. Il siège au conseil d’administration d’organismes sans but lucratif.

Jean-Paul Gagné

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