Alors que les parcs d'écologie industrielle poussent comme des champignons, le concept des grappes industrielles semble dépassé. En 1992, alors qu'il était ministre de l'Industrie, Gérald Tremblay lançait une politique de développement centrée sur les grappes industrielles. Depuis, l'idée de regrouper des entreprises d'un même secteur, dans le but de créer des synergies, a fleuri, comme en témoigne l'ouverture de la Vallée de l'aluminium, de la Cité Multimédia et, plus récemment, de la grappe aérospatiale du Montréal métropolitain. L'écologie industrielle vise également à créer des synergies, à la différence qu'elle le fait en regroupant des entreprises aux activités complémentaires. D'importantes économies L'écoparc de Kalundborg, au Danemark, fait figure de modèle. Dans ce parc industriel, la centrale électrique de 1300 MW Asnaes d'Energy E2, la raffinerie Statoil, la pharmaceutique Novo Nordisk, le fabricant de panneaux de gypse Gyproc, l'entreprise de traitement des sols Soilrem et les 20 000 habitants de Kalundborg s'échangent de l'eau, des ressources, des rejets industriels et de l'énergie. L'eau servant au refroidissement de la raffinerie est acheminée dans les bouilloires de la centrale électrique pour produire de l'électricité et de la vapeur. La vapeur alimente notamment Novo. Par ailleurs, les rejets de gaz de Statoil servent à traiter du sulfure, une activité qui fournit trois coproduits : la matière première pour la fabrication de l'acide sulfurique, du gaz propre et du gypse. Ce gypse évite à Gyproc d'avoir à s'approvisionner en gypse naturel en Espagne, à 2 500 km de son usine. La chaleur produite par la centrale est acheminée par pipeline aux 20 000 habitants de la municipalité. Depuis la création de l'écoparc en 1961, les économies directes dépassent 200 M$. Par ailleurs, des économies indirectes sont réalisées sur le plan environnemental. Les échanges permettent d'économiser 45 000 tonnes (t) de pétrole, 15 000 t de charbon et 600 000 m3 d'eau par an. Elles entraînent des réductions de 175 000 t de dioxyde de carbone (CO2), ce qui équivaut à retirer plus de 40 000 voitures des routes, et de 10 000 t de dioxyde de soufre (SO2). L'écologie industrielle s'inspire des échanges perpétuels dans la nature, où tout est constamment transformé et réutilisé. Cette approche recoupe plusieurs principes de la durabilité présentés dans cette chronique, comme éliminer la notion de déchet et améliorer l'écoefficacité des processus industriels. Tout cela, en étant plus rentable. Ouverture prochaine du Technocentre à Sorel-Tracy Pas surprenant que ce modèle soit reproduit partout dans le monde. L'écoparc INES, à Rotterdam, en Hollande, regroupe plus de 80 entreprises, qui ont investi 100 M$ pour mettre en place un réseau d'échanges. Résultats : des économies annuelles de 16 M$ et une réduction de 272 500 t de CO2. Montréal aussi a son parc inspiré de l'écologie industrielle. Le Complexe environnemental Saint-Michel, qui héberge notamment TOHU, la Cité des arts du cirques, vise à réhabiliter un site d'enfouissement. Les biogaz émanant du site sont récupérés par Gazmont : la centrale les transforme en électricité, qui est vendue à Hydro-Québec, et en vapeur, qui comble les besoins de chauffage de la TOHU. L'ouverture l'été prochain du Technocentre en écologie industrielle, à Sorel-Tracy, pourrait multiplierc ce genre d'initiatives au Québec.