Interdiction de forage dans l'arctique: la stratégie écolo d'Obama et Trudeau

Publié le 21/12/2016 à 09:22

Interdiction de forage dans l'arctique: la stratégie écolo d'Obama et Trudeau

Publié le 21/12/2016 à 09:22

Un mois avant l'arrivée à la Maison Blanche de Donald Trump, qui a promis de sabrer les règlementations environnementales, Barack Obama a interdit mardi tout nouveau forage de gaz ou de pétrole dans de vastes zones de l'océan Arctique. Il avait fait de la protection de l'environnement l'une des grandes priorités de ses deux mandats.

«Aujourd'hui, en partenariat avec nos voisins et alliés du Canada, les États-Unis franchissent une étape historique pour (...) préserver les écosystèmes de l'Arctique», a souligné M. Obama dans un communiqué, évoquant aussi la nécessité de réduire la dépendance aux énergies fossiles pour lutter contre le changement climatique.

Dans l'océan Arctique au large de l'Alaska, M. Obama a interdit, de manière permanente, tout nouveau forage sur un peu plus de 50 millions d'hectares qui comprennent toutes les eaux américaines de la mer des Tchouktches et une large partie des eaux américaines de Beaufort. Et dans l'Atlantique, M. Obama a par ailleurs désigné 31 canyons sous-marins où tout forage sera également interdit.

Prise sur une «base légale solide» et ne pouvant pas être remise en cause par un autre président, cette décision devrait provoquer une levée de boucliers dans le camp républicain, et une possible guérilla juridique.

Déjà été utilisée par plusieurs prédécesseurs, dont Dwight Eisenhower et Bill Clinton, la mesure protège les eaux fédérales de toute exploitation d'hydrocarbures.

De son côté, le Canada a annoncé l'interdiction de manière permanente de tout nouveau forage de pétrole ou de gaz dans les eaux canadiennes de l'Arctique, avec une révision prévue tous les cinq ans.

«Nous annonçons avec les États-Unis des mesures pour assurer la viabilité de l'économie et de l'écosystème de l'Arctique», s'est félicité le premier ministre canadien Justin Trudeau sur Twitter.

«La mauvaise direction»

Donald Trump, qui a, à plusieurs occasions, mis en doute la réalité du changement climatique, a promis de mettre fin «à l'intrusion» de l'Agence américaine de protection environnementale (EPA) dans «la vie des Américains».

Il a désigné pour diriger cette agence Scott Pruitt, ministre de la Justice de l'Oklahoma, qui a été à la pointe de la bataille judiciaire pour faire annuler des règlementations visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre des centrales au charbon.

L'American Petroleum Institute (API), qui représente les intérêts de l'industrie pétrolière, a estimé mardi que l'initiative de M. Obama entraînait les États-Unis «dans la mauvaise direction».

«Bloquer l'exploration offshore affaiblit notre sécurité nationale, détruit des emplois bien rémunérés, et pourrait rendre l'énergie plus chère pour les consommateurs», a estimé l'un de ses dirigeants Erik Milito.

Les organisations de défense de l'environnement ont elle naturellement salué avec force l'initiative de dernière minute.

«Le président Obama consolide encore un bilan sans précédent sur le climat», a souligné Michael Brune, directeur exécutif du Sierra Club.

Barack Obama, qui quittera le pouvoir le 20 janvier, fut l'un des principaux architectes de l'accord de Paris sur le climat en scellant un accord avec l'autre grand pollueur de la planète, la Chine.

Cet accord, conclu fin 2015 dans la capitale française, vise à contenir le réchauffement sous le seuil de 2°C par rapport au niveau de l'ère pré-industrielle.

Après avoir promis durant la campagne de retirer les États-Unis de cette accord, Donald Trump s'est déclaré il y a quelques semaines «ouvert» sur le sujet. Il a cependant depuis, par ses nominations, envoyé une série de signaux qui inquiètent la communauté scientifique.

Le pétrole circule pendant 1 300 kilomètres dans le pipeline Trans-Alaska.

Se racheter une conduite

La décision d'Ottawa et de Washington a suscité un haussement d'épaules des observateurs de l'industrie de l'énergie canadienne, qui relèvent qu'il n'y a pas de plans de forage, de toute façon, dans cette région en raison de coûts exorbitants.

Le professeur de sciences politiques Michael Byers, de l'Université de Colombie-Britannique, estime qu’il s’agit d’un mouvement pour démontrer que le premier ministre Justin Trudeau a à cœur la protection de l'environnement malgré qu'il ait récemment donné le feu vert à deux projets d'oléoducs: l'expansion de Trans Mountain et le remplacement de ligne 3 d'Enbridge.

«Fermer la porte au pétrole et au gaz dans l'Arctique aide (Justin Trudeau) à se positionner dans le dossier des changements climatiques en disant qu'il y a des limites au développement de nouveaux projets pétroliers et gaziers et en traçant une ligne dans le sable», a soutenu M. Byers.

«Il n'y a pas d'activité qui a lieu dans l'Arctique canadien en ce moment, alors de dire "Non" fait en sorte que personne ne doit s'arrêter», a-t-il ajouté.

La pétrolière Impériale sans permis

L'an dernier, la pétrolière Impériale a fait la demande pour que la date d'échéance de son permis de forage au large de la mer de Beaufort, dans les Territoires du Nord-Ouest, soit repoussée - renouvelant ainsi son autorisation de forer pour la période de 2020 à 2028. La société a évoqué un manque de temps pour mener à terme le travail technique nécessaire et compléter les processus.

Selon le professeur Byers, la mesure annoncée mardi signifie que le fédéral laissera vraisemblablement expirer le permis de la Pétrolière impériale.

Une porte-parole de la société, Killeen Kelly, n'a pas voulu s'aventurer à indiquer si l'entreprise entend réclamer des compensations financières pour le refus de prolonger la période couverte par son permis.

Les derniers forages menés au large des Territoires du Nord-Ouest remontent à 2006, par Devon Canada.

Insensé

Celui qui était le président de la société à l'époque, Chris Seasons, estime que les entreprises pétrolières qui ont des intérêts dans l'Arctique ne seront pas affectées dans l'immédiat, mais possiblement à long terme.

«Il y a définitivement des hydrocarbures, a-t-il ajouté. Nous avons trouvé un gisement équivalent à environ 200 millions de barils de pétrole, mais ce réservoir ne constituait pas une échelle suffisante pour la commercialisation.»

D'autres compagnies on fait des découvertes dans l'Arctique dans les années 1970 et 1980, a par ailleurs noté M. Seasons, mais d'autres ressources situées plus proches des marchés et moins risquées sur le plan environnemental ont été privilégiées.

M. Byers juge que l'exploitation dans cette région aride ne fait aucun sens sur les plans économique et environnemental, estimant que les prix du baril de pétrole devraient être triplés pour s'élever au-dessus de 150$US pour assurer une rentabilité.

La période de l'année où il serait permis de mener des activités dans l'Arctique étant très limitée, les compagnies se heurteraient à des risques coûteux, a-t-il relevé. Le transport de matières serait en outre «un cauchemar», selon lui.

 

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