La stratégie verte de General Electric

Publié le 20/11/2008 à 00:00

La stratégie verte de General Electric

Publié le 20/11/2008 à 00:00

Par François Rochon
Plus grand conglomérat du monde et deuxième capitalisation boursière après la pétrolière Exxon, General Electric (GE) a pris le virage en faveur du développement durable il y a deux ans. Présent dans le crédit à la consommation comme dans la fabrication des réfrigérateurs, des moteurs d'avion et des réacteurs nucléaires, le géant a alors lancé Ecomagination. Au programme, une réduction de ses émissions de gaz à effet de serre de 40 % d'ici 2012, et la promotion de produits à faible consommation de carburants et moins polluants. Nous nous sommes entretenus avec Elyse Allan, PDG de GE Canada.

D’où vient ce positionnement de GE en faveur de l’environnement? Des pressions des communautés religieuses, comme l’affirme le livre The New Capitalists?

(En riant) Je n’ai pas lu ce livre, mais je peux vous dire que la source du changement, c’est le marché, c’est-à-dire nos clients. Les pressions sont venues de nos clients de partout dans le monde qui nous parlaient des règlements en faveur de l’environnement et des demandes de leurs propres clients à eux. Ecomagination consiste à développer des produits qui répondent aux défis environnementaux des entreprises et qui sont supérieurs en valeur aux autres produits de même catégorie. C’est une situation gagnante, à la fois pour l’entreprise et pour l’environnement.

Le marché confirme le bien-fondé de notre approche, puisqu’en 2006, les ventes des produits Ecomagination se sont chiffrées à 12 milliards de dollars, et les commandes à 50 milliards. À ce rythme, les produits Ecomagination ont beaucoup d’avenir !

Le thème de l’environnement constitue-t-il aussi un moyen d’attirer de nouveaux employés?

Oui, sans l’ombre d’un doute. Lorsque nous allons sur les campus, nous constatons qu’une des questions-clés posées à nos recruteurs porte sur notre engagement face à l’environnement. Nos employés veulent participer à la création de produits qui contribuent à résoudre les problèmes environnementaux. On voit que ce thème est extrêmement important chez les jeunes diplômés.

Quelles sont vos priorités pour les prochaines années?

Nos investissons beaucoup en R-D pour répondre, entre autres choses, aux besoins croissants des pays émergents, dont les défis environnementaux sont très grands. Compte tenu de la croissance des économies émergentes, les occasions d’affaires dans le domaine environnemental seront très nombreuses. Et il est très important de bien comprendre et d’anticiper les courants de réglementation ; cela nous permettra d’orienter nos efforts en R-D, ce qui résultera en produits et services adaptés aux marchés d’ici et d’ailleurs.

Quelles seront les technologies de demain ?

Celles reliées à l’eau arrivent en tête de liste. Que ce soit au Canada ou au Moyen-Orient, la rareté de l’eau potable ira s’aggravant. GE développe des technologies pour la réutilisation, la purification ou la plus grande disponibilité de l’eau. Un autre ensemble de technologies d’avenir réside dans les sources d’énergies renouvelables.

Y a-t-il contradiction entre votre engagement en faveur de la réduction des gaz à effet de serre et l’appui que GE avait manifesté pour la construction de la centrale au gaz naturel du Suroît ?

Le Suroît aurait pu être l’instigateur d’une nouvelle génération de centrales au gaz naturel, ce qui en aurait fait le site le plus efficace et le plus écologique de sa catégorie dans le monde. C'est plutôt dans le sud de la Californie, à Inland Empire, qu'aura lieu, l'été prochain le lancement de cette nouvelle génération de centrales au gaz. On y produira l'énergie suffisante pour satisfaire les besoins de 600 000 ménages tout en réduisant de 146 000 tonnes par an les émanations de dioxide de carbone, par rapport à une centrale typique ayant la même taille.

Certaines entreprises tentent de s’inscrire dans le mouvement des technologies propres, mais avec si peu de succès qu’on qualifie leurs essais de mascarades écologiques («green washing»). Comment éviter cela ?

Il faut de la substance et voir à ce que les mots du plan d’affaires reflètent la stratégie de l’entreprise. Avant le lancement du programme Ecomagination, GE s’est assurée que sa stratégie reposerait sur l’action en augmentant le budget de R-D consacré aux produits favorables à l’environnement. GE s’est aussi engagée à créer de nouveaux produits et à faire les efforts nécessaires pour les vendre. En outre, l’entreprise s’est engagée à informer le public, chaque année, de l’atteinte de ses objectifs. Même les employés sont évalués en fonction de la concrétisation de ces objectifs. Chez GE, le « marketing vert », c’est plus que des mots puisque la stratégie pilote l’allocation des ressources. Par ailleurs, il importe de ne pas avancer à petits pas, mais à grands pas. Et de ne pas se limiter aux produits et services dont le monde a besoin aujourd’hui, mais de penser à ceux de demain.

Selon vous, quels sont les grands défis du Canada ?

Le Canada fait face à un défi de taille, soit le nombre décroissant d’étudiants qui s’intéressent aux sciences et à l’ingénierie. Cela menace notre capacité d’innovation ainsi que notre capacité à demeurer dans le peloton de tête des pays novateurs. Et, bien sûr, il est important pour la réussite de programmes comme celui d’Ecomagination de pouvoir compter sur des employés qui comprennent bien la science et l’ingénierie ! Il y a au moins deux façons de répondre à ce défi : encourager la formation en entreprise et augmenter le nombre d’institutions d’enseignement technique, qui pourraient attirer les jeunes qui ne veulent pas aller à l’université. Les entreprises peuvent aussi faire leur part en s’engageant auprès d’organismes comme Actua (www.actua.ca), qui veulent intéresser les jeunes aux sciences et aux technologies. Enfin, le Canada doit rester concurrentiel au point de vue fiscal. De plus en plus de pays tentent d’attirer les investissements et les entreprises multinationales grâce à leurs mesures fiscales incitatives. Le Canada a réalisé des progrès considérables en matière de réductions d’impôt sur le capital, mais le pays doit continuer à bien suivre la situation dans le monde.

Peu de femmes dirigent de grandes entreprises. Vous sentez-vous parfois seule ?

Comme tout le monde, GE peut faire mieux. Une des questions que l’on me pose souvent a trait à ma capacité à gérer la tension entre famille et travail. Ce n’est pas facile puisque je voyage beaucoup. Ces déplacements représentent au moins la moitié de mon temps au travail, qui ne se limite pas à une semaine de 35 ou 40 heures. Il est important d’avoir la flexibilité nécessaire à une vie familiale équilibrée, et GE me donne cette chance. Si par exemple mon fils a un match de baseball à 14 heures, je peux y être. Le bien-être dans la vie consiste à savoir ce que l'on veut, à prendre les moyens d’y arriver, et ce, tout en respectant ses limites, qui sont différentes pour chacun.

«Le marché confirme le bien-fondé de notre approche, puisqu’en 2006, les ventes des produits Ecomagination se sont chiffrées à 12 milliards de dollars, et les commandes à 50 milliards de dollars.»

À PROPOS DE GE
GE est le conglomérat par excellence, celui qui parvient toujours à se réinventer. GE est la seule des 12 entreprises qui ont composé le Dow Jones Industrial Average, en 1896, à en faire encore partie ! William E. Rothschild, l'auteur du livre The Secret to GE's Success, en fait un cas type ; selon lui, l'adaptation constante aux besoins du marché constitue une clé de la survie et de la réussite de ce géant qui compte 300 000 employés et qui affiche un chiffre d'affaires de 160 milliards de dollars. À l'échelle canadienne, GE possède 14 grandes usines et emploie 9 500 personnes.

Au Québec, GE exploite trois grandes usines, soit celle de Bromont, qui fabrique des éléments de moteurs d'avion, celle de Saint-Augustin, qui fabrique des barres blindées destinées aux centrales hydroélectriques, et celle de Lachine. La plus importante division canadienne de GE en termes d'actif et de portefeuille est le spécialiste du financement GE Capital Solutions Canada, dont les bureaux sont situés à Montréal. Par ailleurs, Bromont a remporté le Prix de la Performance Globale de GE en 2006. Cette distinction, la plus élevée de son secteur, souligne la productivité élevée de l'usine. Ses aubes de turbines et ses compresseurs équipent les Boeing 737 et les Airbus 320 et 340.

L'entreprise espère équiper un jour des avions de combat du programme américain Joint Strike Fighter, ce que ne manqueront pas de lui reprocher bon nombre d'investisseurs socialement responsables. Propriétaire de la chaîne de télévision NBC et présente dans les foyers par ses lampes et ses électroménagers, GE est le premier fabricant mondial d'équipement pour l'imagerie médicale, le troisième de centrales nucléaires, et le quatrième de turbines d'éoliennes.

Magazine Vision Durable, septembre 2007

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