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Vers la création d’un troisième parti à Washington?

François Normand|Publié le 15 janvier 2021

Vers la création d’un troisième parti à Washington?

Les élus de la Chambre des représentants votant, le 13 janvier, pour la destitution du président sortant Donald Trump. (Photo: Getty Images)

ANALYSE — L’assaut contre le Capitole perpétré par des partisans de Donald Trump a bouleversé la majorité de la classe politique aux États-Unis, incluant des républicains, dont 10 ont voté pour destituer le président sortant. Le Parti républicain est donc divisé comme jamais à la suite de ce drame national. Assisterons-nous à sa scission puis à la création d’un troisième parti politique sur la scène fédérale?

La question est d’une brûlante actualité, alors que la Chambre des représentants a accusé le chef de ce parti durant quatre ans «d’incitation à l’insurrection», une première dans l’histoire américaine. Reste à voir si les deux tiers des membres du Sénat (50 démocrates et 50 républicains) jugeront Donald Trump coupable de cette accusation, soit le niveau nécessaire pour le condamner.

À moins d’une surprise de taille, le scénario le plus probable est que les deux tiers des voix ne soient pas atteints pour condamner Donald Trump.

Il s’en sortirait donc comme en 2019, lors de la première tentative de destitution. La Chambre des représentants l’avait alors accusé «d’abus de pouvoir» pour avoir exercé des pressions sur le gouvernement ukrainien afin qu’il lance une enquête sur l’ancien vice-président Joe Biden, ainsi que sur son fils Hunter.

Pour autant, le mal est fait, même si Donald Trump n’est pas jugé une seconde fois.

À la suite de l’insurrection du 6 janvier, on voit mal en effet comment le Parti républicain peut continuer d’exister normalement, tout en ayant toujours dans ses rangs les franges les plus extrémistes de la société américaine, à commencer par les milices d’extrême droite et les suprémacistes blancs.

Aussi, il est possible que nous assistions à la création d’un nouveau parti politique aux États-Unis, qui regrouperait alors la frange la plus à droite, populiste et ultranationaliste du Parti républicain.

 

Des exemples historiques

Si le bipartisme est plutôt la norme aux États-Unis, plusieurs tiers partis ou candidats indépendants lors de présidentielles ont été actifs tout au long de l’histoire américaine.

Par exemple, lors de l’élection présidentielle en 1992, l’homme d’affaires H. Ross Perot a récolté 20% du vote populaire, aux côtés du président sortant républicain Georges H. W. Bush et du candidat démocrate Bill Clinton —c’est ce dernier qui a gagné l’élection.

En 1892, une coalition regroupant notamment des fermiers en colère a aussi créé le Populist party (connu aussi sous le nom de People’s party), un parti de gauche surtout présent dans le sud et l’ouest des États-Unis.

 

La Capitole à Washington, où siège la Chambre des représentants et le Sénat. (Photo: 123RF)

Ce parti a d’ailleurs fait élire des membres au Congrès, en plus de soutenir le candidat démocrate William Jennings Bryan lors de l’élection présidentielle de 1896.

Aussi, il n’est pas impossible que nous assistions à la création d’un nouveau parti aux États-Unis dans les prochaines années, qui regrouperait par exemple des électeurs habitant davantage dans les milieux ruraux ou les vieilles régions industrielles du pays.

Du reste, le bipartisme actuel est en quelque sorte une anomalie par rapport aux autres démocraties libérales.

Ce pays abrite 328 millions d’habitants. Or, actuellement, les États-Unis ne comptent pratiquement que deux partis politiques, le Parti démocrate et le Parti républicain.

Pour sa part, le Québec, qui compte 8,5 millions d’habitants, a quatre grands partis: la Coalition avenir Québec, le Parti québécois, le Parti libéral du Québec et Québec solidaire.

C’est dire à quel point la marge de manœuvre est grande aux États-Unis pour la création d’au moins un troisième parti sur la scène politique fédérale.