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Jean Sasseville

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Jean Sasseville

Expert(e) invité(e)

Trois experts immobiliers entrevoient des jours meilleurs

Jean Sasseville|Publié le 01 novembre 2023

Trois experts immobiliers entrevoient des jours meilleurs

On connaît les mesures à prendre pour régler la pénurie de logements. La vraie question est de savoir combien de temps les gouvernements vont prendre pour prendre des actions et quand les taux vont baisser. (Photo: 123RF)

EXPERT INVITÉ. On se dirige vers la pire année de construction en 20 ans. Malgré tous les nuages, des experts s’attendent à des éclaircies. De plus, je salue les récentes initiatives du fédéral.

L’Institut de développement urbain (IDU) du Québec, le lobby des développeurs immobiliers, a tenu une conférence récemment. J’ai eu l’occasion de discuter avec trois panélistes d’une excellente session intitulée Tendances du marché résidentiel et ses enjeux.

 

Le fédéral stimule la construction

Le fédéral a aboli la TPS sur les constructions neuves. Cela représente une économie d’environ 3%.

Par l’entremise de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL), une tranche additionnelle de financement de 20 G$ a été débloquée pour construire 30 000 appartements de plus par année.

Hors Québec, Ottawa verse des fonds aux villes qui acceptent de prendre des mesures pour atténuer la crise du logement. Ottawa exige qu’elles mettent fin au zonage de faible densité. Il y a trop de terrains où l’on ne peut construire que des unifamiliales.

Voici d’autres mesures proposées par Ottawa:

  1. Prioriser et améliorer le processus d’approbation de l’aménagement de logements locatifs et abordables;
  2. Examiner en profondeur les redevances et autres droits d’aménagement en mettant l’accent sur les permis associés au logement abordable;
  3. Réduire ou éliminer les normes de stationnement afin d’accroître la viabilité et la densité de l’ensemble résidentiel et de réduire son empreinte carbone;
  4. Éliminer les restrictions liées à la hauteur, aux marges de recul, à la superficie habitable.

Québec va recevoir 900 M$ du fédéral et va y ajouter la même somme. Si l’on se fie à la récente adoption d’une motion à l’Assemblée nationale, il semblerait que l’on utilisera ces sommes pour le logement social et communautaire. C’est très bien, mais il a d’autres enjeux. Souhaitons que Québec s’inspire des solutions proposées par Ottawa dans ses discussions avec les villes.

 

TVQ

Pour ne pas trop nuire à l’abordabilité des habitations neuves, le gouvernement provincial a instauré un remboursement partiel de la TVQ. Pour une maison ou un condo, il n’y a aucun remboursement pour un achat de 300 000$ ou plus. Pour un immeuble locatif, le seuil est de 225 000$ par logement.

Ces seuils n’incitent pas les promoteurs à construire des unités de grandes superficies, soit des logements destinés aux familles. On devrait éliminer ces seuils pour que tous les logements aient droit à un remboursement partiel.

Encore mieux, Québec devrait abolir cette taxe de vente comme plusieurs provinces ont fait.

« On ne taxe pas les besoins essentiels comme la nourriture, rappelle Mélanie Robitaille, PDG du promoteur immobilier Rachel Julien. Pourquoi taxer l’achat d’une habitation neuve? »

La ministre responsable de l’Habitation, France-Élaine Duranceau, est consciente que plusieurs entrepreneurs vont regarder du côté de l’Ontario pour leurs nouveaux projets. Son projet de loi 31 modifié inclut des mesures pour compenser le fait que la TVQ est maintenue pour l’instant.

 

Hausse modérée des coûts de construction

Il y a eu une hausse des coûts de construction de 41% en quatre ans. Le Groupe Altus a récemment partagé une excellente nouvelle. Récemment, les hausses sont revenues à des niveaux raisonnables.

Source: Statistiques Canada

Redevances

Les taxes foncières sont la principale source de revenus pour une municipalité. La construction neuve est donc un apport significatif de revenus additionnels. Paradoxalement, plusieurs municipalités ont introduit de nouvelles sources de revenus qui font baisser les mises en chantier.

L’IDU a calculé l’impact des frais chargés par les municipalités et les sociétés de transport. Pour un condo près de la station REM à Brossard, ces frais augmentent le prix de vente de 6,1% et de 6,5% dans l’arrondissement Saint-Laurent à Montréal.

« Les villes devraient offrir des incitatifs au développement plutôt qu’exiger des redevances. Elles semblent sous-estimer les retombées économiques et fiscales que génère un projet », souligne Charles-André Latour, directeur principal exécutif de Groupe Altus.

 

Délais d’émission de permis

L’Ontario a créé un fonds de 1,2 G$ sur trois ans qui récompensera les municipalités qui atteignent leurs cibles en matière de logements. Une municipalité admissible ne recevra pas de financement si elle atteint moins de 80% de sa cible annuelle établie.

Toutefois, elle pourrait recevoir jusqu’à 100% du financement accordé si elle est en voie d’atteindre sa cible, et pourrait recevoir une éventuelle prime si elle dépasse sa cible. Il n’est pas surprenant que plusieurs municipalités engagent du personnel additionnel pour l’émission de permis. Je m’attends à ce que les délais d’émission de permis diminuent.

Les longs délais sont un enjeu auquel l’on doit mieux s’attaquer au Québec.

 

APH Sélect

Avec son amortissement pouvant aller jusqu’à 50 ans, ainsi que d’autres conditions attrayantes, APH Select, un programme de la SCHL lancé en 2022, a permis d’éviter une plus grande réduction des mises en chantier.

« Lorsque les taux d’intérêt obligataires vont baisser de 1% à 1,5% par rapport au niveau actuel, la rentabilité avec les financements APH Select devrait redevenir dans une zone plus »acceptable », et ainsi permettre à une bonne proportion des projets de possiblement repartir », mentionne Tommy Archambault, chef de la direction de l’agence immobilière Levier.

 

Les plans du fédéral et du provincial

En 2020, il fallait un revenu d’environ 85 000$ pour acheter un condo de 850 pieds carrés à Montréal sans que les versements dépassent 30% du revenu. Il en faut environ 105 000$ maintenant.

Il y a une perte de plus ou moins 40% des locataires pouvant se permettre un projet neuf. L’inabordabilité s’accélère, même auprès des ménages plus fortunés.

« Le risque assumé par les développeurs n’est actuellement peu ou pas rémunéré, explique Charles-André Latour. Une faible marge de profit est anticipée à la livraison des projets et repose sur plusieurs hypothèses, soit, une croissance des loyers durant la période de construction, des scénarios d’absorption optimistes, une stabilité des coûts de construction et des taux d’intérêt plus faibles pour le financement long terme. La prise de risque est énorme. »

Le gouvernement fédéral songe à offrir aux constructeurs un financement à des taux d’intérêt avantageux afin de soutenir des projets de construction qui ont été mis en veilleuse à l’heure actuelle en raison des taux d’emprunt trop élevés.

On connaît les mesures à prendre pour régler la pénurie de logements. La vraie question est de savoir combien de temps les gouvernements vont prendre pour prendre des actions et quand les taux vont baisser.

On en saura plus sous peu. Québec et Ottawa font des mises à jour économiques en novembre. Et Québec va annoncer un plan d’action, qui donnera entre autres plus de pouvoirs aux maires pour faire avancer des projets qu’ils jugent souhaitables pour leur collectivité.

 

Je vous invite à consulter mes articles précédents.

 


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