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Rapprocher les start-up anglos et francos

Karl Moore|Publié le 26 novembre 2019

Rapprocher les start-up anglos et francos

Edgar Brown, co-fondateur et PDG de FYT

BLOGUE INVITÉ. La fibre entrepreneuriale est une affaire de famille pour Edgar Brown, co-fondateur et PDG de l’entreprise d’entraînement physique mobile FYT. En grandissant, il admirait son père qui possédait son propre cabinet dentaire. Après avoir été rejeté par le programme de pré-dentisterie de l’Université McGill, M. Brown s’est rendu compte que ce qu’il aspirait vraiment à gagner, c’était l’agilité que la gestion d’une entreprise exigeait de son père.

« J’étais attiré par l’indépendance, la liberté, la vente, la construction d’une clientèle, se remémore M. Brown. Ce sont toutes des choses qui viennent avec le fait d’être entrepreneur. J’ai construit toute ma formation pour pouvoir m’exposer à ces choses à travers mes cours, les conférences auxquelles je suis allé, mes lectures personnelles, et mes rencontres avec les anciens élèves. »

M. Brown s’est inscrit à un programme de baccalauréat en commerce à McGill et a choisi une concentration générale pour s’exposer au plus grand nombre de pratiques commerciales possible plutôt que de limiter sa formation aux finances ou à la comptabilité. Il a également étudié l’analyse commerciale et l’informatique afin de se doter des connaissances techniques nécessaires pour éventuellement lancer sa propre entreprise.

Le lancement d’une entreprise est un processus à plusieurs volets selon lui : d’abord, un fondateur doit s’immerger dans la culture entrepreneuriale, comme l’a fait M. Brown à l’université, avant de pouvoir agir en se lançant dans une entreprise commerciale. En plus de ses études à McGill, il a obtenu un certificat d’études intensives en technologie et en études entrepreneuriales de l’innovation à l’Université Stanford. Cette formation lui a permis d’explorer les stratégies commerciales de la Silicon Valley.

« À Stanford, ils nous ont enseigné le processus de réflexion qui se déroule dans la Silicon Valley, explique-t-il. J’ai appris à voir les projets sur trois plans différents. On peut prendre un projet qui semble complètement irréalisable aujourd’hui, mais qui pourrait être réalisable dans 50 ans, et le réduire pour l’adapter à la technologie de pointe actuelle, mais qui reste hors de notre portée, puis le réduire davantage pour correspondre à ce à quoi nous avons accès aujourd’hui afin de pouvoir commencer à progresser vers un objectif à long terme. Le programme vise à développer cet état d’esprit audacieux et novateur. »

Les concours et les incubateurs ont également été un élément clé au succès de M. Brown et de FYT. Pendant ses études de premier cycle, il a remporté le concours Techstars Startup Weekend Competition deux années de suite. Il s’est ensuite joint au programme Next36, le principal programme de développement des fondateurs du Canada avec ses co-fondateurs Milena Fagandini et Carter Sprigings. L’entreprise est maintenant basée dans la ZDM de Ryerson, un incubateur technologique de renommée mondiale.

« Une fois qu’on a une idée, ces structures permettent de passer à l’action en encourageant les entrepreneurs à produire un produit de base viable à montrer aux gens. Ce genre d’expérience permet de vivre une expérience qui montre que si l’on va jusqu’au bout, on a du potentiel, dit-il. »

D’après M. Brown, la constitution d’une équipe solide est elle aussi essentielle au succès d’une entreprise en démarrage. Il a rencontré Mme Fagandini, une professionnelle expérimentée du marketing à Stanford. Depuis, elle a déménagé au Canada pour devenir cofondatrice. Son cofondateur technique, M. Sprigings, était un étudiant très performant qui s’est joint à FYT durant sa dernière année à McGill.

« Il est essentiel d’avoir une équipe diversifiée avec des compétences complémentaires, explique M. Brown. Cela permet d’opérer plus vite et de surmonter les défis constants qui définissent le monde des start-up. »

L’idée derrière FYT, une plateforme logicielle où les entraîneurs peuvent diffuser des programmes d’entraînement et des cours en direct aux utilisateurs, est venue presque instinctivement à M. Brown. Lui-même passionné de sport, il estime que la forme physique est un pilier de la productivité humaine. La facilité d’accès à la mise en forme est donc une priorité pour le jeune entrepreneur.

Le sport a également démontré à M. Brown que le travail assidu à ses mérites. Adolescent, il a subi une blessure à la colonne vertébrale qui a nécessité trois mois de réadaptation intense avant qu’il ne puisse retourner sur le terrain de basketball. À McGill, M. Brown était le dernier choix de l’équipe universitaire, et il savait qu’il allait devoir se battre pour prouver qu’il y avait sa place. À la fin de sa carrière au sein de l’équipe de McGill, il faisait partie de l’effectif permanent.

Miser sur la diversité

M. Brown reconnaît que, peu importe le dévouement d’un entrepreneur à son entreprise, le secteur ne parvient souvent pas à soutenir les minorités. Il souligne que le manque de diversité dans la Silicon Valley est particulièrement regrettable compte tenu de l’esprit d’innovation que les entreprises de technologie veulent promouvoir.

« Les premiers acteurs qui ont lancé la culture de la Valley avec des entreprises comme PayPal, ont tous créé leurs propres empires technologiques où ils ont fait venir leurs amis, dit M. Brown. Cela crée une culture d’investissement et de soutien pour le même type de personne et ce problème persiste encore aujourd’hui. »

Au Canada, M. Brown constate un manque d’interaction entre les entrepreneurs francophones et anglophones, ce qui nuit également aux affaires et à la diversité des start-up au pays. Bon nombre d’entrepreneurs unilingues sont limités dans l’exposition qu’ils peuvent obtenir par le biais de concours et d’incubateurs qui ne fonctionnent généralement que dans une seule langue.

« La communauté entrepreneuriale est divisée selon les lignes françaises et anglaises, stipule M. Brown. Je crois que c’est l’une des plus grandes différences entre la communauté des jeunes entreprises de Toronto et celle de Montréal. Toronto a un seul écosystème, alors que celui de Montréal est très divisé, bien que ces deux communautés commencent à se rejoindre. »

Le schisme entre les communautés entrepreneuriales francophones et anglophones a le plus d’impact sur Montréal, mais M. Brown estime qu’avec plus de collaboration entre ces deux groupes, la ville pourrait se démarquer en tant que pôle mondial pour les start-up.

« L’une des forces de Montréal est la richesse de la recherche sur l’intelligence artificielle et la technologie, dit-il. Quand cette recherche s’accompagne d’un écosystème de gens qui peuvent transformer la théorie en réalité, comme nous le voyons actuellement, il n’y a pas de limite à ce que vous pouvez faire. »

Lien vers le balado (en anglais seulement)

Le présent article est une transcription condensée et modifiée d’une entrevue animée par Karl Moore, professeur agrégé à l’Université McGill, dans le cadre de l’émission The CEO Series, présentée sur les ondes de CJAD et produite par Marie Labrosse, étudiante à la maîtrise en langue et littérature anglaises à l’Université McGill. L’entrevue intégrale fait partie de la plus récente saison de The CEO Series et est disponible en baladodiffusion