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Nicolas Duvernois

Chronique d'un entrepreneur

Nicolas Duvernois

Expert(e) invité(e)

Québec devrait acheter Transat A.T.

Nicolas Duvernois|Publié le 20 octobre 2020

Québec devrait acheter Transat A.T.

(Photo: 123RF)

BLOGUE INVITÉ. Pas nécessaire d’ajuster vos lunettes ou votre écran, vous avez bien lu. Je pense sérieusement que Québec devrait acquérir Transat A.T., société mère d’Air Transat. Bien que je ne sois normalement pas un admirateur de ce type d’opération de la part d’un gouvernement, je dois vous dire que celle-ci serait ultra stratégique à plusieurs niveaux. 

Retournons à l’été 2019. Après une première offre non concluante de la part d’Air Canada, une deuxième, plus alléchante, est acceptée par les actionnaires de Transat. À 18$ l’action, la transaction de 730 millions de dollars donnait des ailes à Air Canada ainsi qu’un quasi-monopole sur certaines destinations très populaires.

Tout ça, c’était dans le monde pré-COVID. Comme quoi le «timing» est important en affaires, un an plus tard, on apprend finalement que le montant de cette acquisition a dramatiquement chuté à un peu moins de 200 millions, une véritable «vente de feu»!

Plusieurs, moi le premier, ont été surpris en apprenant la nouvelle! Si Air Canada réussit à officialiser cette entente, celle-ci entrera immédiatement au panthéon des «aubaines du siècle». 

Le prix de près de 200 millions de dollars peut sembler énorme, mais attention, il faut contextualiser ce montant afin de réaliser que ce n’est pas une grosse somme, surtout dans l’aviation. Je ne peux m’empêcher, avant de tomber dans les comparaisons plus sérieuses, de vous dire qu’il y a, en ce moment même dans la chic ville de Southampton, dans l’État de New York, une maison à vendre sur un terrain de 600 000 pieds carrés en bord de mer pour le même montant…

Blague à part. 200 millions pour une entreprise qui a frôlé les 3 milliards de revenus en 2019, qui a son siège social en plein centre-ville de Montréal, qui comptait juste avant la crise 5 000 employés, qui venait d’être nommée la meilleure compagnie aérienne au monde dans la catégorie «loisirs», et qui était un fleuron québécois, c’est un «deal» obligatoire à faire pour tout gouvernement.

Par le passé, nous avons investi beaucoup plus pour recevoir beaucoup moins, voire rien, avec de l’argent public. Rappelons-nous des 400 millions de dollars investis dans un nouvel amphithéâtre à Québec qui devait faire revenir une équipe de la Ligue nationale de hockey, du demi-milliard dans la cimenterie de Port-Daniel afin de finalement créer 200 emplois (l’équivalent de 2,5 millions de dollars par emploi créé), du milliard de dollars américains en 2015 afin de financer le développement de la CSeries de Bombardier, ainsi que plusieurs autres milliards pour sa survie au fil des années. 

N’avons-nous pas 200 millions de dollars pour acquérir Transat A.T.? Afin de réembaucher les milliers de Québécois(e)s mis à pied temporairement lors de la relance. De garantir un juste prix lors de l’achat de billets d’avion, ainsi que de bâtir une véritable offre régionale, digne de ce nom, desservant toutes les régions du Québec. Offre qui d’ailleurs, depuis des années, souffre du manque de concurrence et surtout de prix frôlant l’arnaque. 

N’avons-nous pas 200 millions pour redonner un souffle à notre industrie aéronautique qui cumule les nouvelles catastrophiques depuis des années? Pour bâtir encore plus grand et viser encore plus loin? Ne serait-il pas génial de prendre l’avion afin de passer nos vacances sur la Côte-Nord, aux Îles de la Madeleine ou à Gaspé sans que notre billet coûte le même prix qu’un billet en classe Affaires pour Tokyo!

L’acquisition d’Air Transat, surtout pour ce montant, est une occasion en or pour le Québec d’un point de vue patriotique, économique et même d’image. Air Transat pourrait devenir ambassadrice du Québec en offrant à bord tout ce qui fait notre réputation. Des repas aux cocktails en passant par le divertissement à bord et les uniformes des employés, le Québec inc. pourrait briller à 20 000 pieds dans les airs.

Plusieurs pays ont investi des sommes colossales afin de venir en aide à leur industrie aérienne. France, Allemagne, États-Unis et j’en passe. Pourquoi pas nous?

Pourquoi ne pas saisir la balle au bond et profiter de la conjoncture afin de frapper un grand coup. Le prix est bon. Non, il est trop bon pour ne pas en profiter! Les astres sont alignés, l’aide fédérale est pour le moment absente de l’industrie et notre premier ministre, qui a cofondé en Air Transat en 1987 et l’a dirigé jusqu’en 1997, a toute l’expérience afin de piloter le dossier.

Je rêve peut-être vous me direz. Cependant, une chose est certaine, si c’était moi le premier ministre, mon offre aurait déjà été déposée sur la table.