Que diriez-vous de partager vos employés avec une autre entreprise pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre ? C’est l’une des solutions mises de l’avant lors de la conférence Développement économique, présentée par les Événements Les Affaires le 25 avril dernier à Montréal.
Pour les entreprises saisonnières, le recrutement de personnel pose un défi particulier. Elles doivent embaucher des employés pour une courte période, les former, puis les mettre à pied avec le risque qu’ils ne reviennent pas l’année suivante. C’est pourquoi Studio Artefact a tenté l’expérience de prêt de main-d’œuvre, à la suggestion de PME MTL Est-de-l’Île.
« Avec ce projet, je pouvais proposer aux candidats un emploi à l’année dans deux entreprises différentes », a dit Micheline St-Jean, l’ancienne coordonnatrice des ressources humaines de Studio Artefact. L’entreprise de conception de décors a besoin de quelque 250 employés temporaires pour préparer la saison des fêtes.
« En cette ère d’employeurs de marque, le partage de personnel est une bonne formule pour attirer les talents », a souligné Véronique Perreault, conseillère en gestion des ressources humaines de PME MTL Est-de-l’Île.
Est-ce que ça fonctionne ? « Ça n’intéresse pas tous les employés, a admis Micheline St-Jean. Certaines personnes veulent continuer à travailler la moitié de l’année. Mais c’est une option de plus. » Cinq employés temporaires de Studio Artefact ont complété leur année de travail chez USD Global, un distributeur de bacs à déchets.
La conférencière a souligné l’importance de procéder au prêt de personnel avec une entreprise dont les postes de travail et les valeurs sont similaires. « Comme on laisse aller nos talents dans le but de les récupérer plus tard, on veut s’assurer qu’ils ne reviennent pas brisés, mais enrichis par leur expérience ».
Opération séduction
Attirer 10 000 travailleurs en 10 ans. C’est l’objectif de la MRC Brome-Missisquoi qui vient de lancer une campagne pour séduire les jeunes ménages qui en ont assez de la ville. Sa stratégie comprend notamment la websérie #FaisLeMove et un portail d’emplois.
Si la région offre de bons emplois, des paysages pittoresques, une foule d’activités sportives et culturelles ainsi que l’Internet haute vitesse, Robert Desmarais, directeur général de la MRC, s’est dit conscient qu’il faudra aussi plus de logements abordables et un meilleur réseau de transport collectif.
Au bout du monde
Pour sa part, Québec International est très actif à l’étranger pour combler les besoins de main-d’œuvre de la région de Québec. Depuis 10 ans, c’est plus de 3000 travailleurs qui s’y sont établis, pour un total de 8000 personnes en comptant les familles. L’agence de développement économique recrute en ce moment des travailleurs en informatique en Europe de l’Est.
« Comme 80 % des immigrants vont à Montréal, il faut développer de nouveaux marchés si on veut attirer des gens », a dit Carl Viel, son président-directeur général.
Québec International organise autant des missions classiques que des missions virtuelles. « En mars, pour 300 postes dans 20 entreprises, on a reçu 40 000 candidatures provenant de 95 pays », a-t-il indiqué.
Entre autres bonnes pratiques, l’organisme a créé des cercles de co-apprentissage pour aider les entreprises à intégrer et à retenir le personnel venu de loin. Carl Viel a aussi rappelé la nécessité de veiller à l’intégration en emploi du conjoint de la personne recrutée. « Sinon, les gens repartent ».
Embaucher des nouveaux arrivants
Cordé électrique mise quant à elle sur les nouveaux arrivants pour combler des postes de journaliers de production.
« On a ouvert une deuxième usine à Sherbrooke pour embaucher la main-d’œuvre immigrante déjà sur place, a raconté Lise Déziel, présidente-directrice générale de l’entreprise. Mais c’est plus facile à dire qu’à faire, car ces gens-là ne passent pas par nos canaux habituels de recrutement. Ils ne lisent pas les journaux, ils ne visitent pas le site d’Emploi-Québec, ni Facebook. »
C’est finalement un organisme d’aide aux immigrants, Actions Interculturelles, qui lui a présenté des candidats. « Quand tu en as un, tu en as trouvé plusieurs, car des membres de leur famille veulent aussi un emploi », a observé Mme Déziel qui a embauché 15 travailleurs originaires d’Afghanistan, tous des hommes.
Leur intégration a toutefois posé un défi qu’elle n’avait pas anticipé : ils tolèrent mal d’avoir une femme comme chef d’équipe. L’employée qui occupait cette fonction auprès d’eux a fini par déclarer forfait pour retourner à son poste habituel. Un homme a pris le relais. Comme quoi une entreprise qui manque cruellement de personnel se trouve parfois devant des dilemmes.