La secrétaire au Trésor du gouvernement Biden, Janet Yellen (Photo: Getty Images)
Face à la crise économique provoquée par la pandémie de COVID-19, Janet Yellen, la future secrétaire au Trésor de Joe Biden, appelle à ne pas regarder à la dépense, remettant à plus tard la gestion du déficit exponentiel.
Il faut «voir grand», a plaidé mardi Mme Yellen, 74 ans, lors de son grand oral devant des sénateurs américains.
«La pandémie a dévasté» l’économie américaine, rappelle-t-elle. «Les dommages sont énormes (…), notre réponse doit l’être également».
Joe Biden, qui prendra ses fonctions mercredi, a présenté la semaine dernière un gigantesque plan d’aide d’urgence à l’économie de 1 900 milliards de dollars, soit à peine moins que le plan d’un montant historique de 2 200 milliards de mars 2020.
«Il y a un consensus à présent: sans nouvelle action, nous risquons une récession plus longue et plus dure et des cicatrices sur l’économie à long terme», a justifié Janet Yellen.
L’ancienne présidente de la Banque centrale (Fed) est auditionnée par les sénateurs pour la confirmer au poste clé de secrétaire au Trésor.
Opposition des républicains
Le rôle de cette économiste réputée, spécialiste du chômage, engagée sur le changement climatique et favorable à un soutien budgétaire, sera de permettre à la première économie du monde de se relever de la crise économique actuelle.
Des milliers de petites entreprises ont dû fermer en raison des restrictions imposées pour endiguer la propagation de la pandémie, tandis que des millions de personnes ont perdu leur emploi.
«Je vais me concentrer dès le premier jour sur l’aide aux travailleurs américains et aux petites entreprises et sur la mise en pratique de façon aussi rapide et efficace que possible du plan de sauvetage qui a été adopté récemment», a déclaré Mme Yellen.
Elle compte «dans un second temps travailler sur le second paquet d’aides que je juge nécessaire pour traverser ces moments noirs», a-t-elle poursuivi, en référence au plan de soutien à l’économie de 900 milliards de dollars adopté fin décembre par le Congrès pour éviter que des millions de chômeurs ne se retrouvent sans allocation et que reprennent les expulsions locatives et les saisies immobilières.
Sans accord du Congrès, et notamment du sénat où les démocrates détiennent une courte majorité, le plan de M. Biden, qui comprend des aides pour les ménages, les entreprises, les collectivités locales, est voué à l’échec.
Les républicains, habituellement peu enclins à une intervention trop large de l’État fédéral, devraient se montrer d’autant plus réticents qu’ils sont désormais dans l’opposition.
L’administration Trump avait pourtant, pendant quatre ans, engagé de fortes dépenses. Le plan titanesque de mars 2020 avait même été adopté en un temps record.
Bons du Trésor à 50 ans ?
Pour convaincre de voter ce nouveau plan, Janet Yellen relève que les taux d’intérêt proches de zéro permettent d’emprunter de l’argent sans que le coût des intérêts n’alourdisse encore la dette des États-Unis.
«À long terme, je pense que les avantages seront bien plus grands que les coûts financiers de ce plan», a tenu à souligner Mme Yellen.
Le déficit budgétaire des États-Unis ne cesse de grimper, sous le poids des dépenses liées à la COVID-19. Il a atteint en 2020 (d’octobre 2019 à septembre 2020) 3.132 milliards de dollars, un niveau historique, plus de deux fois plus élevé que le précédent record.
La dette était de 26 900 milliards de dollars à fin septembre.
Interrogée sur la possibilité pour les États-Unis d’émettre des bons du Trésor à 50 ans, Mme Yellen s’est dit ouverte à cette idée et qu’elle allait voir si les marchés s’y intéressaient.
«Il y a un avantage à financer la dette, notamment quand les taux d’intérêt sont très bas, en émettant des obligations de long terme», a-t-elle insisté.
Mme Yellen a en outre souligné la nécessité de reconstruire une économie plus compétitive sur le plan mondial et permettant à un plus grand nombre d’Américains de profiter de la prospérité.
«C’est important pour l’Amérique d’investir: investir dans nos infrastructures, investir dans nos travailleurs, investir dans la recherche et développement – les choses qui font croître notre économique rapidement et la rendent compétitive», a-t-elle ajouté.
S’agissant de la politique commerciale, Janet Yellen a annoncé sans surprise que, vis-à-vis de la Chine, les États-Unis allaient s’inscrire dans le sillage de l’administration Trump en déployant un large arsenal d’outils pour contrer les pratiques «abusives», «injustes» et «illégales» de Pékin.
Elle s’est rapprochée de l’Europe sur le délicat dossier de la fiscalité des géants du numérique.