Sans l’augmentation des loyers nécessaire pour attirer de nouveaux investissements, la construction de nouveaux logements est fortement limitée et il n’y a pas de solution à long terme à la pénurie de logements. (Photo: 123RF)
EXPERT INVITÉ. Lors de la commission parlementaire étudiant le projet de loi 31, la majorité des intervenants proposeront de maintenir les cessions de bail. Plusieurs suggéreront de limiter les hausses de loyers et d’instaurer un registre des loyers universel. Ces propositions ne tiennent pas compte des lois fondamentales de l’économie qui régissent les marchés du logement. Ces mesures nuisent à long terme aux locataires.
Le gouvernement provincial est en mode écoute. Modifier la cession de bail serait très impopulaire, mais aurait un effet bénéfique sur l’offre de logement. Le gouvernement est pris avec un dilemme cornélien difficile à résoudre.
Un loyer, en plus de rémunérer le propriétaire pour compenser pour ses coûts et faire un profit, engendre des incitatifs économiques nécessaires pour attirer de nouveaux investissements dans le logement locatif, ainsi que pour entretenir le parc de logements existant. À cet égard, le logement n’est pas différent des autres biens, tels que la nourriture et les vêtements: la quantité fournie par les producteurs est directement liée au prix du marché en vigueur.
Dans les conditions actuelles, avec les taux d’intérêt et les coûts de construction élevés, les loyers ne rendent pas rentable la construction de nouveaux logements. Si un loyer est trop bas, les règles en place ne justifient pas économiquement de rénover ce logement. C’est pourquoi la majorité des rénovations se font lorsqu’il y a un changement de locataires.
Dans un marché non réglementé, une pénurie de logements est résolue en deux étapes. À court terme, les loyers marginaux augmenteront à mesure que les consommateurs se disputeront les logements disponibles. Au fil du temps, ces loyers plus élevés encourageront de nouveaux investissements dans le logement locatif jusqu’à ce que la pénurie de logements soit éliminée.
Sans l’augmentation des loyers nécessaire pour attirer de nouveaux investissements, la construction de nouveaux logements est fortement limitée et il n’y a pas de solution à long terme à la pénurie de logements. À l’inverse, une baisse des loyers envoie au marché le message qu’il n’y a plus de place pour de nouveaux investissements.
Lorsqu’une communauté restreint artificiellement les loyers en adoptant un contrôle des loyers, elle envoie au marché ce qui peut être un faux message. Cela incite les investisseurs à ne pas construire de nouveaux logements et les propriétaires actuels à réduire leurs investissements dans les logements existants.
Dans de telles circonstances, le contrôle des loyers a comme conséquence perverse de réduire l’offre de logements en période de pénurie. La cession de bail aide certains locataires, mais nuit à la majorité.
Le contrôle des loyers encourage la discrimination
Avec la pénurie créée, le contrôle des loyers permet aux propriétaires de choisir parmi plusieurs candidats concurrents. Dans certains cas, les décisions de sélection peuvent être influencées par la race, le sexe, la taille de la famille ou d’autres facteurs inappropriés ou illégaux.
Je ne connais pas un endroit où un important contrôle des loyers s’est fait avec succès. Les universitaires de gauche citent souvent la Suède. Effectivement les loyers y sont relativement bas. Mais la pénurie de logements est forte et le délai d’attente est en moyenne de neuf ans. Il y a une forte discrimination et les gens moins fortunés sont défavorisés. Consultez Non au registre des loyers pour en savoir plus.
Solutions
Je ne souhaite pas que l’on enlève toutes les mesures de contrôle de loyers. Au Québec, on recherche un équilibre entre les droits des locataires et des propriétaires.
Dans mon article Cessons de contrôler les loyers, je recommandais que les aides financières soient bonifiées pour les plus vulnérables. Le Programme de supplément au loyer (PSL) devrait être révisé et être accessible à un plus grand nombre de ménages. Le PSL verse un montant pour qu’un ménage ne débourse pas plus que 25% de leurs revenus totaux.
Le projet de loi 31 s’attaque aux évictions illégales. Le fardeau de la preuve devra désormais être présenté par le propriétaire lors d’un passage au tribunal.
En modifiant les cessions de bail, on redonne aux propriétaires les moyens de prendre un meilleur soin de leurs logements.
Ce ne sera pas surprenant que les associations de locataires plaident pour le maintien de la formulation actuelle de la cession de bail et proposent un registre des loyers.
Mais je trouve décevant que 14 maires aient demandé un registre de loyers le 28 juin dernier. Il n’existe aucune donnée probante qu’un contrôle marqué des loyers est avantageux à long terme.
J’ai hâte de lire les mémoires présentés par l’Union des municipalités du Québec et de ces villes. Va-t-il y avoir des propositions pragmatiques, pérennes et structurantes pour régler la crise? Va-t-on continuer de proposer plus de contrôles des loyers?
Tous souhaitent que la pénurie de logements s’atténue. Il faut un cocktail de mesures pour y arriver. Si on maintient la cession de bail, souhaitons au moins qu’avec le débat sur le projet de loi 31, son impact soit mieux compris.
Je vous invite à consulter mes articles précédents.