Le travail reprend au CN, mais l’arrêt se poursuit au CPKC
La Presse Canadienne|Mis à jour le 23 août 2024Les employés des chemins de fer résistent vigoureusement à la décision du gouvernement fédéral de les remettre au travail.
À la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN), les trains ont recommencé à circuler vendredi matin, alors que les travailleurs ont commencé à retourner au travail – même si le syndicat des Teamsters a donné un avis de grève de 72 heures contre le CN peu avant 10h, heure de l’Est.
Et au Canadien Pacifique Kansas City (CPKC), le syndicat qui représente quelque 3300 employés de la compagnie conteste une directive d’arbitrage exécutoire déposée par le ministre fédéral du Travail, Steven MacKinnon, devant le Conseil canadien des relations industrielles (CCRI).
Cet arrêt de travail sans précédent a incité le ministre MacKinnon à renvoyer le conflit au CCRI afin d’utiliser ce mécanisme.
Le CCRI a convoqué les parties à une réunion jeudi soir, suivie d’une audience vendredi matin. Une décision est attendue plus tard dans la journée.
Le conseil a déclaré qu’il traitait la question «avec la plus grande urgence».
À Calgary, des employés se sont rassemblés devant le siège social de CPKC, où les manifestants ont reçu vendredi matin la visite de François Laporte, président de Teamsters Canada.
«Ce n’est pas fini. Je vous le dis, ce n’est pas fini. La lutte continue. Nous utiliserons notre droit constitutionnel pour lutter contre l’entreprise», a-t-il déclaré aux quelque 70 travailleurs présents.
Le syndicat s’est dit prêt à plaider sa cause devant un tribunal fédéral si nécessaire.
Les travailleurs de CPKC se sont mis en grève au moment même où un lock-out est entré en vigueur tôt jeudi matin. Les employés du CN ne sont pas encore en position de grève légale.
Même si le CN a levé son propre lock-out jeudi soir, la compagnie craint de devoir interrompre à nouveau le service si le tribunal décide que le personnel peut toujours faire la grève pendant le processus d’arbitrage.
Les deux camps se lancent la balle
Avant de rendre la directive d’arbitrage exécutoire, le ministre du Travail a subi des pressions de la part de groupes d’entreprises, qui ont averti que l’arrêt de travail aurait des conséquences économiques et ont exhorté Ottawa à résoudre le conflit.
Lors d’une conférence de presse jeudi, M. MacKinnon a affirmé que le gouvernement était totalement engagé envers la négociation collective, mais a déclaré que les répercussions de l’arrêt de travail se font sentir sur tous les Canadiens.
Le ministre a déclaré que le gouvernement a donné aux négociations «toutes les chances possibles de réussir».
Chaque partie a accusé l’autre de ne pas avoir négocié sérieusement. Le syndicat a soutenu qu’il ne voulait pas d’arbitrage exécutoire parce que les questions étaient trop importantes pour être laissées à une tierce partie.
«La meilleure façon d’obtenir un contrat est de négocier. Nous ne croyons pas qu’il faille laisser une tierce partie décider de nos conditions de travail», a indiqué M. Laporte.
Sean O’Brien, président de Teamsters International, a qualifié le lock-out de «honte», ajoutant que «la cupidité des entreprises est omniprésente».
Le CN a riposté vendredi, affirmant que le syndicat tient «le Canada en otage».
«Le CN se concentre sur la reprise afin de relancer l’économie. Les Teamsters se concentrent sur le retour aux piquets de grève et la fermeture de tout», a déclaré le porte-parole Jonathan Abecassis en entrevue téléphonique.
Les Teamsters prétendent que les deux entreprises tentent d’affaiblir les protections concernant les périodes de repos, la durée des quarts de travail et l’horaire, mettant ainsi en péril la sécurité des travailleurs. Le CN envisage également de déplacer certains employés vers des endroits éloignés pendant plusieurs mois pour combler la pénurie de main-d’œuvre, selon le syndicat.
La directive du ministre à la commission des relations industrielles indique que les parties sont dans une «impasse», ce qui nécessite une intervention. L’arbitrage exécutoire produirait un règlement pour «assurer la paix industrielle » et protéger la réputation du Canada en tant que partenaire commercial fiable ainsi que les secteurs touchés, de l’agriculture à l’énergie, en passant par le commerce de détail, a écrit M. MacKinnon.
Sa directive, consultée par La Presse Canadienne, exige que le tribunal «ordonne à la CPKC de reprendre ses activités» et aux travailleurs «de reprendre leurs fonctions».
Des utilisateurs dans l’incertitude
L’arrêt de travail a touché non seulement les chaînes d’approvisionnement à travers le pays, mais aussi des dizaines de milliers de voyageurs à Toronto, à Montréal et à Vancouver dont les lignes circulent sur des voies appartenant au CPKC.
Dans la région de Montréal, trois des lignes de train du réseau Exo resteront suspendues vendredi, soit celles de Vaudreuil/Hudson, Saint-Jérôme et Candiac. Les trains circulant sur le réseau du CN, soit les lignes de Mont-Saint-Hilaire et de Mascouche, conservent un service normal.
La porte-parole d’Exo, Catherine Maurice, a indiqué que le délai de reprise des services reste inconnu. «Nous attendons les instructions du CPKC avant de statuer sur les modalités et le moment de reprise du service des trains de banlieue», a-t-elle précisé jeudi.
Des voyageurs déconcertés ont été refoulés des lignes ferroviaires fermées jeudi, et l’agence responsable de GO Transit en Ontario a déclaré que le service resterait interrompu vendredi sur la ligne Milton et à la gare GO de Hamilton.
Le transporteur régional de la Colombie-Britannique, TransLink, a annoncé que le service du West Coast Express resterait également hors service vendredi.
Via Rail a déclaré que les trains sur sa ligne Sudbury-White River de 480 kilomètres, qui circule trois fois par semaine dans le nord de l’Ontario, sont annulés jusqu’à ce que l’arrêt de travail soit résolu.
Les trains de banlieue concernés en Ontario et en Colombie-Britannique circulent également sur des lignes appartenant au CPKC.
Le CPKC indiquait jeudi que de plus amples détails sur le calendrier de reprise du service seraient fournis une fois qu’il aurait reçu l’ordre du conseil des relations industrielles.