(Image courtoisie)
On parle de la ville intelligente depuis plus de dix ans, mais elles sont rares les municipalités dans le monde qui ont adopté cette approche où on accumule des données sur les diverses activités en ville, afin de les utiliser ou les partager dans des contextes d’amélioration des processus.
La raison est simple : le concept a d’abord été inventé par des géants informatiques dont IBM qui souhaitaient créer un nouveau marché pour leurs logiciels d’entreprise. Mais depuis, l’idée de la ville intelligente a éclaté, et est de nos jours plus décentralisé qu’à l’époque. Les données ouvertes et la culture de startups permet d’imaginer une économie locale se nourrissant des données municipales (anonymes et sécurisées) pour créer des applications et des services dont se servent les différentes organisations publiques et privées sur le territoire de la ville pour être plus performantes. Même chose pour le citoyen, qui pourrait ainsi, en théorie, savoir plus précisément quand sa rue sera déneigée, ou quand le camion de recyclage est dans son quartier.
Une ville intelligente en français, SVP
Faisant déjà affaires dans l’Afrique francophone, la société K2 Geospatial de Québec a mis au point un système de cartographie satellite qui peut servir de canevas pour ces applications de ville intelligente. «Mais en ce moment, les villes qui l’utilisent n’en exploitent que 10 pour cent des capacités», se désole la société. C’est pourquoi elle s’est alliée avec la firme Arche Innovation, de Montréal, afin de créer une solution tout-en-un s’adressant spécifiquement aux municipalités du Québec.
«Nous ne sommes pas les seuls, ni même les premiers à offrir une telle solution, mais nous ciblons tout spécifiquement le Québec et la Francophonie, car on y voit un retard dans l’adoption de technologies qui sont, pour la plupart, la réalisation d’entreprises américaines ou anglophones», explique Noah Redler, fondateur d’Arche Innovation, pour expliquer ce geste.
Ainsi, tandis que K2 fournit la technologie, Arche ajoute le conseil, la formation, en un anglicisme, l’intelligence. «Notre but n’est pas de s’incruster. On offre une aide qui peut durer au plus deux ou trois ans aux gestionnaires municipaux afin qu’ils comprennent ce qu’il est possible de faire avec la technologie qu’ils ont entre les mains.»
Cette technologie peut être configurée sur-mesure, et s’avère modulaire. Une plus petite ville peut donc décider de simplement suivre l’état de la circulation sur ses rues pour en améliorer la fluidité. Une autre ville plus imposante peut coordonner les réparations de sous-sol. Le chantier permanent de la rue Ste-Catherine, dans l’ouest du centre-ville de Montréal, aurait été bouclé bien plus rapidement si toutes les agences qui avaient besoin d’y bouger des câbles, des tuyaux et autres infrastructures avaient su mieux coordonner leur passage avec la ville.
«Ça peut aller plus loin. En intégrant des données de météo et de l’état des cours d’eau, la ville intelligente aurait pu prédire les inondations des dernières semaines et en éviter le pire», ajoute M. Redler.
On a beau parler d’interdire les nouvelles constructions en zones inondables, on ne rasera pas de pleins quartiers déjà bâtis au cours des prochaines semaines. Peut-être que d’investir dans des solutions de prévention pour les prochaines fois serait plus raisonnable, et redonnerait de la valeur à ces secteurs immobiliers qui risquent fort de coûter cher à leurs propriétaires…
Des applications prêtes à être développées
Créer des applications de ville intelligente est une opération complexe car elle implique plusieurs acteurs qui ne se connaissent pas très bien. Ça prend un conseil municipal prêt à faire le premier pas, en investissant dans des outils de collecte de données. K2 Geospatial estime que sa propre solution, vendue sous licence, coûte 50 000 dollars par an.
Ensuite, il faut ouvrir le tout aux éditeurs, programmeurs, codeurs qui verront dans ces données un potentiel applicatif attrayant. Compter le nombre d’autos qui passe à un coin de rue chaque jour, ce n’est pas très excitant. Récupérer les données de plusieurs compteurs sur le réseau routier d’une ville, puis appliquer un algorithme qui cadencera les feux de circulation pour réduire de plusieurs minutes le temps de transit des automobilistes (les rois de la banlieue, quoi qu’on en dise), ça commence à être payant.
La même logique appliquée à la collecte de déchets, aux loisirs municipaux, au paiement des taxes, etc., rend une municipalité beaucoup plus efficace et justifie l’investissement initial, assure Noah Redler. «Nous avons tous les composants logiciels pour que les développeurs puissent commencer à créer des applications sur-le-champ.»
En d’autres mots, pour les villes qui souhaiteraient créer un petit écosystème d’experts informatiques, la clé est déjà dans le démarreur.
On peut même aller un peu plus loin : on peut imaginer comment tout ça s’intégrerait à une application que les résidents de la ville installent sur leur sans-fil pour avoir un point de contact centralisé. De quoi renforcer l’engagement citoyen, celui-ci étant plus à même de s’intéresser aux services municipaux existants. Ça aussi, ça a une certaine valeur.
Et tout ça, à l’abri des Facebook, Amazon et autres géants américains de la donnée numérique. Voilà une autre sorte de vague qui semble vouloir nous submerger et qui vaut bien la peine d’être évitée par les administrations publiques…
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