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EXPERT INVITÉ. S’il y a un sujet qui me tient à coeur, c’est bien celui de l’accès des investisseurs à des produits qui leur conviennent, en autant qu’ils puissent en comprendre les particularités, les risques et les inconvénients. La gestion indicielle déguisée, ou closet indexing, est, selon moi, le principal défaut de plusieurs portefeuilles d’épargnants, sans que ceux-ci en soient le moindrement conscients.
À une époque pas si lointaine, la seule façon pour un investisseur canadien d’avoir accès à un portefeuille d’actions diversifiées était par l’entremise d’un fonds commun distribué par les grandes banques et compagnies d’assurances canadiennes. Ce fut une démocratisation importante du processus d’investissement et l’épargnant moyen pouvait dès lors avoir accès directement aux marchés bousiers par l’entremise d’un conseiller.
La plus récente révolution dans le domaine a été des plus intéressantes pour l’investisseur. L’arrivée des fonds négociés en Bourse (FNB) de type passif a transformé fondamentalement le terrain de jeu de l’épargnant pour lui permettre d’accéder aux marchés en évitant l’utilisation d’un produit intermédiaire cher et sans réelle valeur ajoutée.
Il s’est alors produit une scission fondamentale des méthodes d’investissement. D’un côté, les FNB ont connu une croissance phénoménale, au détriment de fonds communs aux frais de gestion plus élevés et peu performants, comparativement à leurs indices de références. De l’autre côté s’est développée une offre de service en gestion privée où les portefeuilles sont construits sur mesure selon différentes démarches particulières à chaque société financière avec l’objectif d’offrir un rendement particulier selon des stratégies propres à chacun des gestionnaires.
Malheureusement, il existe toujours une distribution massive de fonds communs de gestion active qui sont en fait gérés de façon presque passive. Le client paie donc des frais plus élevés que s’il s’agissait d’une gestion passive sans avoir le service espéré.
Les raisons principales pour lesquelles ces produits existent toujours sont les suivantes:
1. Revenus additionnels
L’autre option, les FNB, affichent des frais de gestion beaucoup plus bas.
2. Gestion en interne
Il est relativement facile d’avoir les ressources en interne pour gérer ce type de produit. Les revenus ne sont alors pas partagés.
3. Réduction du risque relatif
Les chances de sous-performance importante par rapport à l’indice de référence sont minimes.
4. Facilité de la gestion
Moins de recherche et d’analyses sont nécessaires pour la construction du produit.
Il existe heureusement une façon simple de s’assurer que les fonds dans nos portefeuilles n’utilisent pas cette pratique de gestion passive déguisée:l’analyse des plus grandes positions du portefeuille. Prenons par exemple l’indice S&P/TSX au Canada. Ses constituants principaux, en matière de capitalisation boursière, sont actuellement:
- Banque Royale du Canada (RY, 88,65 $)
- Banque Toronto-Dominion (TD, 81,88 $)
- Canadien National (CNR, 148,34 $)
- Canadien Pacifique Kansas City (CP, 105,26 $)
- Enbridge (ENB, 45,79 $)
- Canadian Natural Resources (CNQ , 63,36 $)
- Shopify (SHOP, 87,69 $) g Banque de Montréal (BMO, 115,60 $)
- Thomson Reuters (TRI, 175,15 $)
- Banque Scotia (BNS, 47,07 $)
Ainsi, si les principaux composants de votre fonds commun sont partiellement identiques à ceux de l’indice S&P/TSX, il est fort probable que la gestion du fonds que vous avez choisi utilise la gestion indicielle déguisée, avec tous les désavantages énumérés précédemment.
Cela étant dit, avoir recours aux services d’un conseiller financier augmente fortement les possibilités d’atteindre les objectifs financiers fixés. Il est donc important pour l’investisseur de comprendre les options d’investissement qui lui sont offertes pour s’assurer que l’approche lui convient et qu’il en connaît les caractéristiques.
La gestion passive et la gestion privée active ont aussi certaines particularités qui doivent être bien comprises.
La gestion passive avec l’utilisation de FNB permet de passer outre l’utilisation d’un conseiller, ce qui peut à l’occasion avoir comme effet la mise en place d’un portefeuille trop risqué qui pourrait être vendu au pire moment par le détenteur en raison de biais comportementaux connus.
La gestion réellement active, de son côté, peut générer des rendements très différents de celui de son indice de référence. À l’occasion, la performance du portefeuille est inférieure à celle de l’indice, augmentant de façon matérielle la volatilité des capitaux.