Expérience-client: de l’importance de la bienséance (suite)
Daniel Lafrenière|Publié le 14 mars 2019Source: 123rf
BLOGUE. À moins d’oeuvrer dans un domaine très spécialisé, le savoir-être est souvent plus important que le savoir-faire. Un manque de bienséance fera qu’un client n’achètera pas, ne reviendra pas, ou partagera son expérience négative.
Ce sont les conclusions du plus récent sondage SOM-Lafrenière mené du 7 au 9 janvier 2019 auprès de 872 adultes francophones du Québec.
L’expérience client se définit comme l’émotion ressentie lors d’une interaction avec une marque, que ce soit en personne, au téléphone ou sur le web. L’émotion étant la pierre angulaire, elle a donc fait l’objet d’une nouvelle étude. Je voulais 1. mesurer la réponse émotionnelle des clients lorsqu’exposés à des situations inappropriées en commerces de détail, et 2. évaluer les conséquences sur l’intention d’achat, le bouche-à-oreille, et l’intention de revenir.
J’ai donc collaboré avec SOM pour élaborer un sondage. Nous avons présenté aux participants la mise en contexte suivante : «C’est samedi et vous avez prévu aller magasiner avec votre mère qui, bien qu’âgée, est en pleine forme. Comme vous avez tous les deux besoin de vêtements, vous visitez plusieurs boutiques.»
Puis, nous avons exposé quatre situations potentiellement irritantes — parmi sept — de façon aléatoire, allant de l’indifférence du personnel, en passant par des commentaires insultants jusqu’à l’engueulade d’un employé par son patron.
Pour chacune de ces situations, nous avons demandé aux répondants d’indiquer les émotions ressenties en utilisant la roue de Plutchik, ainsi que la probabilité d’acheter, de retourner dans le commerce et de partager l’expérience négative vécue. La roue de Plutchik présente huit émotions primaires déclinées en trois intensités, permettant à une personne d’indiquer clairement l’émotion ressentie.
Constats
Le manque de savoir-être suscite une réaction émotionnelle plus forte que le manque de savoir-faire.
Les situations évoquant un manque de savoir-faire (compréhension des besoins, conseils) sont celles qui ont le moins d’impact sur l’intention d’achat. Cela dit, dans un autre contexte — financier, médical ou autre — l’incompétence provoquerait probablement une réponse émotionnelle plus forte qu’un déficit de savoir-vivre.
Les situations où des émotions fortes sont présentes telles que la rage, la colère, le dégoût ou le mépris font chuter la probabilité d’achat à moins de 30%. C’est non négligeable! Dit autrement, le client est en magasin, il est prêt à acheter, mais il abandonnera le processus d’achat à la suite de l’inconduite d’un employé ou d’un patron.
Ces mêmes émotions négatives incitent les clients à partager leur expérience (80% de probabilité). Attention à la réputation! Ce constat est cohérent avec les conclusions d’autres études, notamment celle de Bernard Rimé publiée en 2009 intitulée Emotion Elicits The Social Sharing of Emotion: Theory and Empirical Review.
Tous les scénarios présentés dans le cadre du sondage peuvent mener à la perte définitive des clients. Encore une fois, les émotions négatives fortes ont un impact tout aussi négatif sur l’intention de fréquenter à nouveau un commerce.
Que peut-on faire? Premièrement, il faudrait porter une attention particulière au volet comportemental pendant les entrevues d’embauche. Je comprends bien la situation actuelle de pénurie de main-d’oeuvre, mais les risques liés à l’incivilité sont majeurs. La carence en savoir-être peut mener à la carence en clients.
Le savoir-faire, le métier, la technique, les produits, tout cela peut être enseigné… et doit l’être. Le savoir-être peut aussi être enseigné, même s’il peut être plus ardu de changer intrinsèquement une personne. Comme dans toute bonne communication avec les employés, énoncer clairement les attentes, donner un sentiment de progression ou d’amélioration, et souligner les bons comportements est certes un bon point de départ pour améliorer le savoir-être.
Consultez les résultats détaillés du sondage.