Est-ce que vos employés demandent de la rétroaction ?
Événements Les Affaires|Publié le 20 mars 2019Après 15 ans d’existence et quelque 3000 employés, la plateforme de commerce électronique Shopify vient de se doter de son premier système de gestion de la performance. Et comme la rétroaction est au cœur de ce système, l’entreprise a participé au développement d’une application web pour la favoriser. Philip Di Loreto, partenaire d’affaires sénior RH, viendra en parler lors de la conférence Gestion et évaluation de la performance, présentée à Montréal le 29 mai par les Événements Les Affaires.
Pourquoi avoir attendu si longtemps avant d’encadrer la gestion de la performance ?
Philippe Di Loreto : Chez Shopify, on a très peu de processus en place. Il y a une raison derrière cela : on veut être agiles, pouvoir bouger rapidement. Cependant, en grandissant, on a constaté que c’était une lacune que de ne pas avoir de système de gestion du rendement, ni même quelque chose d’informel pour guider les gestionnaires. Il fallait réduire l’ambiguïté.
Que voulez-vous dire ?
P.D.L. : Il y a beaucoup d’ambiguïté dans notre entreprise. C’est une conséquence de la quasi-absence de processus, mais c’est aussi intentionnel. On veut encourager l’autonomie des employés de tous les niveaux. On veut qu’ils utilisent leur jugement pour prendre des décisions. Cela dit, on a connu une croissance importante et rapide. Comme tout est plus complexe, il y a maintenant trop d’ambiguïté. C’était devenu nécessaire de préciser nos attentes envers les gestionnaires en matière de gestion du rendement.
Quels sont les éléments principaux de votre nouveau système ?
P.D.L. : Il comporte trois étapes : mettre en place des objectifs de concert avec l’employé; poursuivre la conversation en continu et réaligner les objectifs au besoin; évaluer l’employé. Les gestionnaires disposent de lignes directrices, mais ils ont toujours de la latitude quant à la manière de faire. Cependant, on s’attend à ce qu’ils donnent régulièrement du feedback aux employés. Ça ne doit pas être à sens unique. On préconise le dialogue. Les employés aussi doivent communiquer aux gestionnaires leurs attentes et leurs besoins.
Parlez-nous de l’outil que vous avez mis en place pour favoriser la rétroaction ?
P.D.L. : Il s’agit de l’application Fellow, développée par un entrepreneur externe avec notre collaboration. Les employés et les gestionnaires l’utilisent pour échanger, préparer des rencontres individuelles, s’entendre sur des points de discussion, établir des objectifs de rendement, se donner de la rétroaction. Un aspect intéressant, c’est ce que l’application documente les interactions. Chaque personne dispose donc d’une sorte de journal de bord qui facilite l’évaluation de son rendement. De plus, l’outil permet aux employés de demander du feedback, par exemple aux collègues avec qui ils ont fait une réunion. Un gestionnaire peut aussi solliciter de la rétroaction sur un membre de son équipe. Une sorte de 360, mais en beaucoup plus simple. Autre bon point : Fellow s’intègre à Slack, une application de collaboration qu’on utilise beaucoup chez Shopify.
Quels sont les résultats ?
P.D.L. : On constate que plus des deux tiers des employés et des gestionnaires se servent de l’application pour établir les objectifs de rendement et préparer les rencontres. Pour un outil RH dont l’utilisation est facultative, c’est très bon. Cependant, il reste du travail à faire pour ce qui est de la rétroaction. Les gestionnaires utilisent les fonctionnalités de feedback lorsque c’est le temps de prendre des décisions sur la rémunération. Mais beaucoup moins le reste de l’année. Quant aux employés, ils ne se demandent pas assez de feedback entre eux. On continue donc de travailler avec l’équipe de Fellow pour améliorer le volet rétroaction de l’application. On cherche aussi à recréer une culture forte de la rétroaction à l’interne. C’était très présent au début de l’entreprise, mais ça s’est dilué avec le temps.