«Si plusieurs milliards de dollars en investissement ont été injectés dans la filière batterie, nos efforts ne se feront sentir que dans une dizaine d’années. Comment accélérer la cadence alors que les projets commencent tout juste à sortir de terre?» (Photo: 123RF)
Par Karl Blackburn, président et chef de la direction du Conseil du patronat du Québec
COURRIER DES LECTEURS. Cette semaine, le gouvernement du Canada annonçait qu’il emboîte le pas à ses confrères américain et européen en imposant une surtaxe sur l’acier, l’aluminium et les véhicules à zéro émission chinois.
C’était une décision justifiée. La saine concurrence doit être privilégiée. Après tout, plus de 125 000 emplois partout au pays dépendent de l’industrie automobile. On en compte presque autant dans les domaines de l’acier et de l’aluminium. Protéger ces secteurs-clés d’une concurrence déloyale et s’harmoniser avec nos alliés commerciaux s’avèrent une évidence.
Il faut toutefois déplorer qu’Ottawa agisse souvent en réaction, et très peu en concordance avec une politique plus globale. On n’apporte ici qu’une réponse partielle à un défi titanesque qui est la décarbonation de notre économie.
Dans un contexte où nos cibles de réduction d’émission de gaz à effet de serre sont ambitieuses, on n’a pas le choix de ramer plus fort.
Déjà, on peine à répondre à la demande mondiale dans les minéraux critiques. Si plusieurs milliards de dollars en investissement ont été injectés dans la filière batterie, nos efforts ne se feront sentir que dans une dizaine d’années. Comment accélérer la cadence alors que les projets commencent tout juste à sortir de terre?
L’opportunité de changer la donne
Le gouvernement fédéral entreprend ces jours-ci une nouvelle consultation notamment pour les batteries, les produits d’énergie solaire et les minéraux critiques. C’est l’occasion parfaite d’instaurer une réelle stratégie pour développer l’économie verte d’ici tout en établissant des règles du jeu équitables pour tous.
L’outil tarifaire n’est pas une stratégie valable à long terme. En revanche, une taxe carbone à la frontière, dont l’Europe s’est déjà dotée, mérite d’être envisagée. C’est un mécanisme qui apporterait une prévisibilité à nos partenaires commerciaux et permettrait de répondre aux plus hauts standards en matière de durabilité. Les manufacturiers locaux auraient ainsi tous les atouts pour réussir dans la nouvelle économie. Donnons-leur les moyens pour qu’ils ne soient pas affaiblis face à la concurrence déloyale étrangère.
La transition énergétique demande bien plus qu’un traitement à la pièce. C’est une vision d’ensemble «à la canadienne» dont nous avons besoin.