Certains dirigeants hésitent avant d'intervenir. C'est une erreur. (Photo: 123RF)
EXPERTE INVITÉE. Lorsque vient le temps d’intervenir dans la gestion d’un climat qui nuit autant aux opérations qu’aux relations entre les équipes, le droit de gérance devient alors fondamental pour faire cesser cette dynamique qui peut conduire à du harcèlement psychologique.
La Commission des normes, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) définit le droit de gestion comme suit: «le droit de l’employeur de diriger ses travailleuses et travailleurs et de prendre des décisions pour assurer la rentabilité de son entreprise et la bonne marche de ses affaires. Il permet à l’employeur d’encadrer son personnel pour qu’il se conforme aux règles en vigueur dans l’entreprise.»
Certains pourront tarder ou craindre de devoir intervenir lorsque des situations nocives sont portées à leur attention. Pourtant, le droit de gérance devient d’autant plus important si l’employeur désire prévenir et combattre le harcèlement psychologique dans son milieu de travail.
Pour l’exercer correctement, il doit notamment «faire des demandes claires et fermes fondées sur les besoins» de l’organisation et «superviser de manière objective et respectueuse l’exécution et la qualité du travail». Il doit également communiquer ses attentes et créer un contexte propice à la réussite de son employé, tout en s’assurant que ses mesures disciplinaires sont graduelles, qu’elles s’appuient sur des faits, mais aussi qu’elles sont «raisonnables», «équitables» et «appropriées», toujours selon la CNESST.
Assurer la santé psychologique de ses employés, c’est aussi devoir intervenir rapidement et appliquer la gradation des sanctions selon la politique en vigueur dans l’entreprise. Voici quelques exemples où l’employeur a de bonnes raisons d’intervenir auprès d’un employé:
- Un employé intimide un collègue en lui faisant des commentaires désobligeants sur sa manière de parler, de s’habiller ou de se comporter.
- Une gestionnaire lève le ton régulièrement auprès de ses employés et a des exigences démesurées envers eux. Elle est rarement satisfaite.
- Un employé fait circuler des rumeurs sur son supérieur immédiat.
- Un gestionnaire courtise ses employées, leur envoie des textos en dehors des heures de bureau et leur fait des avances sexuelles.
Quand de tels actes sont portés à la connaissance de l’employeur, ils doivent faire l’objet d’une intervention. Le dirigeant doit d’appliquer rigoureusement des mesures disciplinaires.
Lorsqu’une ambiance nocive règne dans l’entreprise, avec le temps, cela finit par prendre des proportions démesurées qui peuvent coûter cher en temps et en argent. D’abord, l’employeur peut se retrouver à devoir gérer des plaintes, constater une baisse de productivité, une augmentation du taux de roulement et une baisse de motivation des équipes.
Que faire comme intervention pour appliquer son droit de gérance dans une situation de climat nocif?
- Collaborer en équipe avec le département RH. Si l’employeur n’a pas de département RH, il doit avoir une politique qui décrit la gradation des sanctions en situation de mesures disciplinaires.
- S’assurer que la politique de prévention et de prise en charge du harcèlement psychologique soit à jour.
- Rencontrer les individus impliqués et leur faire part de ce que vous leur reprochez, ce qu’ils doivent faire pour corriger leurs comportements et les conséquences qui suivront en cas de non-respect.
- Documenter la rencontre et faire les suivis nécessaires pour encadrer les comportements non désirés.
- Recourir au congédiement lorsque les mesures disciplinaires faites de façon graduelle ne portent pas fruit. Consultez un avocat en droit du travail, si nécessaire, pour obtenir un accompagnement légal.
Les sanctions dépendent de la gravité des comportements reprochés. Sauf en cas de faute grave comme des menaces de mort ou l’agression sexuelle d’un collègue, le congédiement immédiat est un dernier recours.
À la suite des mesures disciplinaires, le congédiement devrait être imposé uniquement lorsque les autres solutions ont été tentées, que l’employeur a pris les moyens nécessaires pour informer l’employé de ce qui lui est reproché, et que celui-ci a eu le temps raisonnable pour se corriger. Une gestion rigoureuse des dossiers disciplinaires est nécessaire, pour assurer le suivi et éviter que des comportements fautifs se répètent dans le temps.