À contre-courant, Québec ouvrira un bureau à Moscou

Publié le 13/06/2012 à 13:23, mis à jour le 13/06/2012 à 17:07

À contre-courant, Québec ouvrira un bureau à Moscou

Publié le 13/06/2012 à 13:23, mis à jour le 13/06/2012 à 17:07

Par François Normand

Alors qu’Ivanhoé Cambridge, la fliale immobilière de la Caisse de dépôt et placement du Québec, remet en question sa présence en Russie, le gouvernement du Québec s’apprête à ouvrir un bureau dans la capitale Moscou.

Ivanhoé Cambridge détient une participation de 60% dans un centre commercial moscovite Vremena Goda, acquis avant la récession mondiale de 2008-2009. L’autre actionnaire est la banque autrichienne Volksbank.

Dans un entretien à Les Affaires le 3 mars, Claude Sirois, vice-président principal, marchés émergents, chez Ivanhoé Cambridge, indiquait que sa société réfléchissait à son avenir en Russie en raison de la faiblesse du marché. «Nous ne sommes pas à la recherche de nouveaux investissements sur le marché russe», disait-il.

L’ouverture de ce bureau du Québec à Moscou, au courant de l’été, survient dans une conjoncture économique difficile dans ce pays de 141 millions d’habitants, l’un des rares dans le monde à voir sa population diminuer.

«Nous sommes conscients du climat économique dans ce pays, mais nous estimons que la Russie représente un potentiel intéressant pour les entreprises québécoises», dit Suzanne Guy, porte-parole au ministère des Relations internationales à Québec.

Le bureau sera logé à l’intérieur des locaux de l’ambassade canadienne. Il comptera trois employés, dont un attaché commercial. Le principal mandat de cette représentation québécoise sera économique. Elle aidera les entreprises québécoises à exporter sur le marché russe.

«Les besoins en infrastructures et en technologies sont importants en Russie. Cela représente des occasions d’affaires pour nos entreprises entre autres dans la construction, les infrastructures et la machinerie agricole», dit Suzanne Guy.

Pierre Fournier, analyste en gestion du risque géopolitique à la Financière Banque Nationale, estime que l’ouverture de ce bureau n’est pas nécessairement une mauvaise chose si elle vise à attirer des investissements russes au Québec.

«La Russie abrite beaucoup de sociétés de capital de risque qui quittent le pays pour investir ailleurs dans le monde car ils sont sceptiques sur la santé économique de leur propre pays!» dit-il.

Même chose au niveau des exportations. Si ce bureau du Québec aide des PME québécoises à vendre leurs produits en Russie, ce bureau peut être justifié, selon Pierre Fournier.

En 2011, les expéditions de marchandises du Québec en Russie ont totalisé 562 M$. Nous y exportons surtout du porc, des avions et des turbines à gaz. En 2009, en pleine récession, les expéditions québécoises en Russie avaient toutefois chuté de près de 60%, à 187 M$.

C’est en matière d’investissement qu’il est le plus dangereux de faire des affaires en Russie, souligne Pierre Fournier. «Un investisseur institutionnel qui a un horizon de 5 à 20 ans dans ce pays doit être très prudent et sceptique», dit-il.

Les secteurs des mines et des hydrocarbures, jugés stratégiques par le gouvernement russe, sont très risqués pour les investisseurs étrangers, selon l’analyste de la FBN. «La plupart des grandes pétrolières occidentales ont été forcé de céder des participations au gouvernement russe dans leurs projets en Russie».

L’un des cas célèbres est celui de la pétrolière anglo-néerlandaise Shell. En 2006, le gouvernement russe a forcé l’entreprise à céder le contrôle dans le projet de gaz naturel liquéfié Sakhalin-2 (un projet estimé à 20 milliards de dollars américains) au profit de la société d’État énergétique Gazprom.

Dans une analyse sur la Russie, Exportation et développement Canada (EDC), une agence fédérale, confirme effectivement qu’«il est arrivé que le gouvernement intervienne dans des secteurs jugés stratégiques pour la politique étrangère, la sécurité ou la politique commerciale de la Russie, comme le pétrole et le gaz naturel, les minéraux, la défense et l’aéronautique.» Les investissements canadiens en Russie totalisent 538 M$.

La Russie est aussi un pays où la corruption est endémique. Selon la Banque mondiale, l’indice de contrôle de la corruption dans ce pays en 2010 s’établissait à –1,07 (selon cette échelle, le pire score est -2,5; le meilleur score est +2,5). Ce taux en Russie est deux fois plus élevé que celui de la Chine (un pays qui a aussi des problèmes de corruption), où l’indice s’élevait à -0,53 en 2009.

L’exemple du géant du meuble Ikea illustre à quel point il peut être difficile de faire des affaires dans ce contexte en Russie. En 2009, l’entreprise suédoise avait mis sur la glace tous ses nouveaux projets d’investissements en Russie. Selon le New York Times, la multinationale faisait face à plusieurs demandes de pot-de-vin pour y faire des affaires.

 

 

 

 

 

 

 

 

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