Retrait d'un REER avant la retraite: un pensez-y bien


Édition du 21 Février 2015

Retrait d'un REER avant la retraite: un pensez-y bien


Édition du 21 Février 2015

Par Jean Décary

[Photo: iStock]

Il existe une conception répandue dans la population selon laquelle on ne peut retirer des sommes de son REER avant l'âge de la retraite. Rien n'est plus faux. Si l'argent ne provient pas d'un régime de retraite et qu'il n'est pas immobilisé, le cotisant peut retirer son pécule quand il le souhaite. Mais attention, les retraits hâtifs ont leur conséquence fiscale, et celle-ci est souvent importante.

L'épargnant n'y échappera pas, tôt ou tard il aura à payer de l'impôt sur les sommes investies dans son REER. Ce qu'il contrôle, c'est le moment où il le fera. Il a tout avantage à choisir une période de sa vie où son taux d'imposition est le plus faible. Pour le commun des mortels, ce moment est la retraite. La raison en est fort simple : le salaire d'un retraité est généralement moins élevé que celui d'un travailleur actif. Il paiera donc moins d'impôt sur les retraits de ses REER.

« À moins de faire face à une situation exceptionnelle, on ne devrait pas toucher à nos REER avant la retraite », rappelle Raphaël Hainault, conseiller en gestion de patrimoine à la Financière des professionnels. Il souligne que l'impact fiscal d'un retrait hâtif est important. Dans certains cas, il peut engendrer une perte nette d'argent. « Une cotisation faite à un bas taux d'imposition donne lieu à une petite déduction fiscale. Or, quelques années plus tard, à la faveur d'une hausse salariale, il y a des chances pour que le taux d'imposition du cotisant soit plus élevé. S'il y a retrait hâtif, il se pourrait même qu'il en ressorte perdant [le retrait étant plus imposé que la déduction reçue]. »

Pour chaque retrait d'un REER, l'institution financière de l'épargnant doit procéder à une retenue d'impôt à la source. Celle-ci varie selon le lieu de résidence. Pour les résidents du Québec, cette retenue s'élève à 21 % pour les montants inférieurs à 5 000 $ (5 % sont prélevés par le fisc canadien). Le taux est de 26 % (10 % au fédéral) pour les montants supérieurs à 5 000 $ et inférieurs à 15 000 $. Enfin, la retenue est de 31 % (15 % au fédéral) pour les sommes dépassant 15 000 $. La retenue fiscale à la source peut ne pas être suffisante. Lorsque le titulaire du REER aura déclaré son retrait dans sa déclaration de revenus, il pourrait devoir payer la différence selon son taux d'imposition de l'année.

Une perte de droits de cotisation futurs

Retirer son REER avant la retraite présente un autre inconvénient de taille : celui de perdre son espace de cotisation. « Les montants retirés ne s'ajouteront pas aux droits de cotisation futurs. Ces montants seront donc, en quelque sorte, perdus », souligne Julie Pronovost, porte-parole régionale à l'Agence du revenu du Canada. À moins que ces sommes n'aient été perçues dans le cadre du Régime d'accession à la propriété (RAP) ou du Régime d'encouragement à l'éducation permanente (REEP), vous ne pourrez pas remettre l'argent retiré de votre REER.

Ce qui est peut-être plus important comme pénalité, aux yeux des planificateurs financiers, c'est le fait que le cotisant ne pourra profiter pleinement des années où ces placements auraient pu croître à l'abri du fisc. « C'est la perte d'abri fiscal à long terme qui me paraît être plus pénalisant lorsqu'on fait un retrait hâtif dans son REER », souligne Raphaël Hainault, conseiller en gestion de patrimoine à la Financière des professionnels. « Mille dollars investis tôt dans une vie en valent pas mal plus à la retraite, trente ans plus tard. »

Il y a aussi les complications et les frais que suppose un retrait de son REER. Dans certains cas, il faudra vendre un titre, auquel s'ajoute une commission. Dans d'autres, il se peut que des sommes d'argent ne soient pas disponibles. Elles ont pu, par exemple, être placées dans des certificats de placements garantis (CPG) qui ont une date d'échéance et qui ne peuvent pas être vendus.

Pour de nombreux planificateurs financiers et investisseurs, le retrait d'un REER avant la retraite relève presque du crime de lèse-majesté. C'est une ligne à ne pas franchir. « Le REER doit d'abord et avant tout être considéré comme un instrument d'épargne pour la retraite », insiste Raphaël Hainault, de la Financière des professionnels. « On ne devrait pas se servir du REER pour se payer des biens de tous les jours, comme une voiture. » À ceux qui ne savent pas quand ils auront besoin de leur argent investi, il suggère plutôt de commencer à cotiser à un compte d'épargne libre d'impôt (CELI). « Il ne sera pas trop tard pour éventuellement contribuer à leur REER à l'aide des sommes accumulées. En cas de besoin, ils pourront piger dans leur CELI et recouvrer leurs droits de cotisation l'année suivante. »

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