Tout ce que vous devez savoir sur l'assouplissement quantitatif américain

Publié le 12/01/2014 à 09:42, mis à jour le 12/01/2014 à 10:06

Tout ce que vous devez savoir sur l'assouplissement quantitatif américain

Publié le 12/01/2014 à 09:42, mis à jour le 12/01/2014 à 10:06

Par lesaffaires.com

Photo: Bloomberg

Depuis la crise financière de 2007-2010, il ne se passe pas une semaine sans que l'on parle d’assouplissement quantitatif (quantitative easing ou simplement QE). Il s’agit d’un sujet d’une importance capitale dans la réalité économique actuelle. Pourtant, encore bien peu de gens sont familiers avec le concept, même dans le milieu des affaires. Voici un portrait de cette politique et de ses retombées sur l'économie et votre portefeuille.

Le quantitative easing est une politique monétaire applicable par les banques centrales visant à augmenter la liquidité dans l’économie locale. Le programme fut mis de l’avant par la Banque du Japon en 2001, afin de combattre la déflation qui régnait dans le pays.

Une banque centrale est une institution publique, complètement ou partiellement indépendante du pouvoir politique. Elle est notamment responsable de la mise en oeuvre des politiques monétaires du pays. Elle a pour mission de contrôler la quantité de monnaie en circulation dans une économie locale ainsi que des taux d’intérêt en vigueur en vue de prévenir ou de limiter l’inflation et la déflation.

En apparence, le principe de l’assouplissement quantitatif est bien simple et il semble avoir des répercussions positives sur l’économie. La banque centrale achète aux institutions financières privées (les institutions de dépôts / les banques commerciales) des obligations ainsi que d’autres actifs financiers généralement non performants.

Pour ce faire, la banque centrale doit d’abord créer de l’argent électroniquement, donc littéralement à partir de rien. Ceci a pour effet d’augmenter la masse monétaire disponible. Ainsi, les banques commerciales disposes d’une plus grande liquidité. On suppose que ces nouveaux capitaux seront destinés à augmenter et à favoriser les emprunts aux particuliers et aux entreprises, ce qui devrait ultimement stimuler l’économie.or

Or, pour atteindre cet objectif, une banque centrale va généralement diminuer le taux d’intérêt auquel les institutions financières peuvent lui emprunter. Étant indépendant des taux d’intérêt, le quantitative easing est une politique dite non conventionnelle. C’est aussi une des raisons pour laquelle on entend souvent dire qu’il s’agit d’une politique de dernier recours.

Le cas américain

À l'apogée de la crise financière, à l'automne 2008, il fallait à tout prix trouver une solution pour relancer le marché immobilier, faciliter l’accès au crédit, maximiser l’emploi, bref sortir de l’impasse économique au plus vite. Ben Bernanke, président de la banque centrale américaine (la Federal Reserve System ou Fed), a donc lancé son programme d’assouplissement quantitatif, également nommé Large-Scale Asset Purchase Programs (Programmes d’achat d’actifs à grande échelle).

En novembre 2008, la Fed s’engage à acheter pour 600 milliards $ US (tous les montants sont en dollars américains) en titres adossés à des créances hypothécaires (Mortage-backed securities ou MBS) ainsi qu’en dette bancaire. Du coup, elle sauve de la faillite des institutions qui prêtent et garantissent des hypothèques telles Fannie Mae et Freddie Mac, qui passeront sous la tutelle du gouvernement. Quatre mois plus tard, la Fed annonce l’achat de 300 milliards $ d’obligations du trésor, 750 milliards $ de plus en MBS ainsi que 100 milliards $ de plus en dette bancaire. De plus, en décembre 2008, le Federal funds rate (le taux auquel les institutions de dépôts américaines peuvent emprunter à la Fed), passe à 0%-0,25%, soit le taux plancher encore en vigueur aujourd’hui.

Bien que le programme soit efficace et offre une amélioration notable en Bourse, l’effet escompté n’est pas tout à fait obtenu puisque les institutions de dépôts ne semblent toujours pas prêter suffisamment. Elles retiennent en effet la plus grosse partie de cette nouvelle liquidité. C’est pourquoi en novembre 2010, un deuxième programme de rachat d’actifs à grande échelle (QE2) est lancé. La Fed communique ses intentions d’acheter pour 600 milliards $ d’obligations du trésor à long terme, soit pour environ 75 milliards $ par mois jusqu’en juin 2011.

En septembre 2012, l’histoire se répète. La Fed entreprend le troisième round du programme d’assouplissement, le QE3. Ce dernier consiste en l’achat mensuel de 40 milliards $ de MBS et 45 milliards $ d’obligations du trésor pour une période indéfinie, d’où le surnom QE Infinity. Une diminution progressive du montant du QE3 était envisagée à l’été 2013, dans l’éventualité où les données portant sur l’emploi atteignaient un certain seuil.

Cependant, la Fed a annoncé le 18 septembre 2013 qu’absolument aucune réduction ne serait faite. Par contre, elle a communiqué ses intentions trois mois plus tard de mettre en œuvre une première réduction de 10 milliards $ par mois au début de 2014. Ces achats mensuels persisteront encore et tout porte à croire que la nouvelle présidente de la Fed, Janet Yellen, qui entrera en poste le 31 janvier 2014, poursuivra cette politique monétaire.

Les problèmes rencontrés

Même si les Bourses américains touchent des sommets, l’économie de nos voisins ne s’est pas améliorée conformément aux attentes. En annonçant la poursuite de son troisième programme de rachat d’actifs à grande échelle, la Fed envoie clairement le signal que les résultats ne sont pas satisfaisants. Avant le début de la crise de 2007, celle-ci possédait moins d’un trillion $ en actifs sur son bilan, un montant relativement stable depuis longtemps. Après cinq ans d’assouplissement quantitatif, ce montant est maintenant supérieur à 4 trillions $.

La banque centrale américaine n’avait acheté de titres adossés à des créances hypothécaires en presque 100 ans d’existence. Aux dernières nouvelles, elle possède près de 1,5 trillion $ de ces titres. Soulignons aussi que ces mêmes titres sont à la source de la crise économique, qui fut d’abord une crise immobilière. Ils font parti des titres que l’on appelle des papiers commerciaux adossés à des actifs non bancaire (PCAA).

Où est rendu tout cet argent nouvellement introduit dans l’économie? Ne devrait-on pas voir de l’inflation du dollar américain avec cette hausse marquée de la masse monétaire?

Andrew Huszar, anciennement employé à la Fed et jadis responsable de l’exécution du premier round du programme d’assouplissement (QE1), s’est récemment exprimé dans le Wall Street Journal dans le but de présenter ses excuses à tous les Américains. Les doutes qu’il entretenait à l'égard de la politique monétaire controversée, avant même la réalisation de celle-ci, se sont confirmés suite à sa mise en place.

Bien que M. Huszar a joué un rôle clé dans l’exécution de cette politique monétaire, il explique que cette dernière n’aidait en rien les citoyens ordinaires à obtenir plus aisément des prêts bancaires. Elle permettait plutôt aux institutions financières privées de s’enrichir substantiellement. En effet, dû à la forte demande artificielle crée par la Fed, ces institutions ont vu la valeur d’une importante part de leurs actifs augmenter considérablement.

Et compte tenu du fait que la majorité des transactions dans le cadre du programme d’assouplissement quantitatif sont orchestrées par ces mêmes institutions, le programme leur permettait d’empocher de fortes commissions. Les banques commerciales bénéficient toujours d’un coût quasiment nul pour emprunter (leur taux d’intérêt à l’emprunt étant au plancher depuis 2008).

La majorité des trillions de dollars injectés dans les institutions financières par la Fed au cours des cinq dernières années dorment encore dans les réserves excédentaires de celles-ci. Les réserves excédentaires représentent le montant de capital qui excède ce qui est exigé par la loi, en pourcentage des dépôts liquides, et ne sont pas obligatoires.

Depuis la chute de Lehman Brothers en septembre 2008, point crucial de la dernière crise financière, les réserves excédentaires totales des institutions de dépôts sont passées de moins de 2 milliards $ à près de 2,4 trillions $. Autrement dit, elles sont maintenant plus de 1200 fois ce qu’elles étaient avant ou équivalent à près de 5 fois la valeur totale d'Apple en Bourse, la première capitalisation boursière du monde. Là est le plus grand problème associé à l’assouplissement quantitatif; la vélocité de la monnaie n’a pas augmenté ( la vitesse à laquelle la monnaie circule dans le système). Les institutions de dépôts retiennent la majeure partie de cette liquidité au lieu d’en prêter davantage aux individus et aux firmes. On peut traduire ceci par un «gel de la liquidité». Cette liquidité est considérée par plusieurs comme l’oxygène des marchés et est plus qu’essentielle à leur bon fonctionnement.

Cet article constitue le deuxième essai rédigé par les étudiants du fonds commun de placement Fonds Alpha de la Faculté des Sciences de l’Administration de l’Université Laval. Je me nomme Charles-Antoine Montreuil, présentement étudiant à la maîtrise en finance à la faculté d’administration de l’Université Laval et également analyste financier au sein du Fonds Alpha. Le Fonds Alpha est géré par des étudiants. Nous investissons l’argent des étudiants de notre faculté qui nous confient leurs économies. Notre stratégie de placement repose sur la préservation du capital et l’investissement à long terme. Nous tentons de trouver des entreprises qui nous semblent sous-évaluées pour profiter d’un rebond de leur prix vers leur juste valeur.

 

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