Les stratégies de faible volatilité sont-elles faites pour vous?


Édition de Juin 2020

Les stratégies de faible volatilité sont-elles faites pour vous?


Édition de Juin 2020

voilier

(Photo: Mohamed Nashah pour Unsplash)

CLASSE D'ACTIFS. La popularité des fonds de faible volatilité n'est pas nouvelle. Cette stratégie a procuré des rendements ajustés au risque souvent supérieurs à celui du marché, particulièrement sur de longues périodes. Ces fonds sont-ils la solution à la nervosité des marchés boursiers que nous connaissons en ce moment ?

Selon des données historiques recueillies par BMO Gestion mondiale d'actifs, les fonds à faible volatilité captent en moyenne de 70 % à 90 % des hausses de marché. Quant à l'effet «réduction du risque» lorsque les Bourses baissent, il peut varier de 20 % à 30 % en moyenne, selon les évaluations.

Cette stratégie a très bien performé dans le monde, notamment aux États-Unis, mais aussi au Canada ces dernières années. «On retrouve dans le marché canadien plusieurs secteurs cycliques, comme l'énergie, et, en les sous-pondérant, les fonds à faible volatilité se sont démarqués», souligne Chris Heakes, directeur général et gestionnaire de portefeuille FNB à BMO Gestion mondiale d'actifs.

L'attention suscitée par cette stratégie ne date pas d'hier. L'économiste américain, Fischer Black, en faisait déjà mention en 1972 dans ses travaux*. Plusieurs recherches empiriques ont montré que les actions moins risquées performent normalement mieux sur de longues périodes que celles qui sont plus risquées. En d'autres mots, le rendement excédentaire observé n'est pas seulement proportionnel au bêta, ou risque spécifique des titres en question (voir encadré).

«Cela peut semer la confusion auprès des investisseurs, puisque ces résultats contreviennent à un principe financier fondamental : plus on prend de risque, plus on est récompensé», remarque Daniel Straus, chef de la recherche et de la stratégie sur les FNB à Financière Banque Nationale.

Comment explique-t-on cette surperformance ? Le comportement des investisseurs et leur excès de confiance sont notamment pointés du doigt. «Les données révèlent qu'ils ont tendance à accorder une attention démesurée à des titres plus risqués, car ils souhaitent faire beaucoup d'argent rapidement. On va acheter une petite société pétrolière en espérant que son prix double en quelques mois», indique Chris Heakes.

Quand on examine les titres qui font partie de ces fonds à faible volatilité, on remarque que ce sont des entreprises de qualité qui paient des dividendes réguliers, comme les services publics ou des produits de consommation courante (secteurs défensifs). La plupart de ces fonds ne détiennent pas ou très peu d'actions du secteur de l'énergie ou des technologies de l'information.

«Ce sont des blue chips ennuyeuse dont le rendement sera potentiellement moins volatil et aussi, croit-on, moins payant. Pourtant, ces titres permettent plutôt d'éviter le piège de courir après les rendements en optant pour des entreprises à la mode et dont les rendements sont souvent très volatils», ajoute l'expert de Financière Banque Nationale. Pensons à l'engouement pour l'industrie du cannabis en 2018 et l'amère déception qui a suivi en 2019.

Ainsi, on a intérêt à miser sur des entreprises qui vont nous procurer un rendement de 6 % à 7 % sur une longue période plutôt qu'à espérer claquer des coups de circuit qui nous feront doubler ou tripler notre investissement rapidement.

Le portefeuille 80/20

Devant de tels résultats, devrait-on substituer des fonds à faible volatilité à nos fonds d'action ? Aux États-Unis, des gestionnaires proposent d'interchanger la portion en actions ordinaires de notre portefeuille équilibré (60/40) par des actions à faible volatilité vu les rendements supérieurs ajustés au risque. Avec la faiblesse des taux d'intérêt, certains sont même tentés d'augmenter la portion en actions du portefeuille à 75 %, voire à 80 %, en incluant uniquement des titres à faible volatilité. Est-ce une bonne idée ?

Certainement pas, nous disent les experts consultés. «Ces titres restent des placements en actions et ils sont risqués. Vous pouvez perdre 100 % de votre investissement», met en garde Daniel Straus. Le coronavirus a fait chuter les places boursières de plus de 30 % en février et mars dernier. Les FNB de faible volatilité ont alors fléchi presque autant en valeur, soit quelques points de pourcentage en moins.

Avant de considérer le profil risque- rendement d'une position dans un portefeuille, les épargnants doivent plutôt s'attarder à leur répartition en obligations, souligne-t-il. La portion à revenu fixe doit jouer pleinement son rôle de protection. Bien sûr, il faudra aussi détenir des titres de qualité dans cette portion de nos placements que l'on souhaite moins risquée.

Attention à la concentration !

D'autre part, les titres de faible volatilité ne sont pas sans faille. On reproche souvent à ces fonds leur concentration sectorielle. Les fiducies de placement immobilier et les entreprises de services publics sont des activités économiques caractéristiques d'une stratégie de faible volatilité. «Des positions concentrées dans de tels secteurs peuvent rendre ces FNB plus sensibles aux mouvements des taux d'intérêt, par rapport à un portefeuille type d'actions canadiennes», juge Daniel Straus.

Si les taux devaient monter subitement, ces titres seront impactés négativement dans leur ensemble. C'est le cas des titres qui paient des dividendes stables. On ne peut ignorer, selon lui, ce risque de perte extrême (tail risk), même s'il demeure faible. D'ailleurs, plusieurs détracteurs de cette stratégie pensent que cette anomalie est liée aux faibles taux d'intérêt, qui sont en baisse depuis 40 ans. Un jour ou l'autre, cette prime va disparaître, croient-ils.

Avant d'acheter un FNB de faible volatilité, il importe enfin de comprendre la méthode d'investissement des gestionnaires du fonds. Certains vont choisir les titres ayant le bêta le plus faible, d'autres vont plutôt miser sur la faible volatilité mesurée par l'écart-type. Certaines entreprises de fonds imposent des plafonds par titre ou limitent le poids d'un secteur, d'un pays. Il faut donc se renseigner.

Il existe également une troisième méthode plus complexe qui fait appel à un algorithme d'optimisation. «Cet algorithme a la tâche de sélectionner des actions et des pondérations parmi un univers de titres admissibles, tout cela en tenant compte de leurs corrélations. Des contraintes de diversification sont aussi en place», souligne Raymond Kerzhérho, chef de la recherche de PWL Capital, dans une étude menée en janvier dernier.

Daniel Straus estime, pour sa part, que «la méthode de faible bêta est particulièrement prometteuse, car elle s'appuie sur le principe à la base de cette anomalie, soit que les actions ayant un bêta élevé n'enrichissent pas l'investisseur». Les autres méthodes ne sont pas inintéressantes et vont minimiser les chutes boursières, selon lui. Dans le cas d'un algorithme, on obtient un portefeuille dont la ventilation sectorielle mime davantage celle de l'indice de marché.

On plonge ?

Un FNB de faible volatilité pourrait ajouter un volet plus stratégique à notre portefeuille. C'est ce que les experts appellent un placement satellite. «Ce pourrait être le cas en fin de cycle économique ou à l'approche d'une récession alors qu'on veut investir dans des secteurs plus défensifs», remarque Chris Heakes.

Ce genre de stratégie peut intéresser un investisseur à la retraite ou à l'approche de la retraite. On doit alors être prêt à ne pas participer entièrement à certaines envolées boursières, tout en étant un peu mieux protégé quand le marché baisse. Il faut également avoir la discipline de conserver ces FNB s'ils devaient sous-performer durant quelques années. «La persévérance est essentielle pour qu'une telle stratégie fonctionne», croit Raymond Kerzhérho.

«Cette anomalie, si elle en est une, pourrait disparaître puisque rien n'est certain en finance», rappelle Daniel Straus. N'oublions pas qu'adopter une stratégie de faible volatilité signifie qu'on va renoncer à certains rendements juteux et qu'on manquera certains coups de circuit. «Aux États-Unis, des entreprises du secteur technologique, comme Google, Amazon et Facebook, ont connu ces dernières années des rendements spectaculaires, mais ne faisaient pas partie d'une stratégie de faible volatilité», rappelle-t-il.

Les FNB de faible volatilité demeurent une stratégie marginale au Canada. Selon les recherches de Raymond Kerzhérho, ces titres représentent environ 4 % du marché total des FNB, évalué à près de 200 milliards de dollars avant la pandémie. Il souligne également le coût plus élevé de ces fonds. «Leur ratio des frais de gestion (RFG) moyen est de 0,46 %, comparativement à une moyenne autour de 0,15 % pour les FNB de base.»

* Black, Fisher (1972), « Capital market equilibrium with restricted borrowing », The Journal of Business, vol. 45, 444-455

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Bêta et écart-type, quelle différence ?
Il existe plusieurs façons d’évaluer le risque d’un titre boursier. Le bêta mesure la sensibilité des rendements d’une action par rapport aux rendements du marché dans son ensemble. C’est le risque spécifique à ce titre. Selon la théorie financière classique, il devrait y avoir une relation linéaire et positive entre le bêta et le rendement espéré d’une action. 
Par définition, le bêta du marché équivaut à un (1). Plus un investissement est risqué, plus son bêta sera élevé (supérieur à 1). Une entreprise dont le bêta est de 2 croîtra de 2 % lorsque le marché monte de 1 % (soit deux fois plus). Dans les mêmes conditions, un titre avec un bêta de 0,5 progressera de seulement 0,5 %. 
Quant à l’écart-type, il mesure plutôt la dispersion des rendements d’un titre autour de sa moyenne. Plus ces rendements s’écartent de leur moyenne, plus l’écart-type (calculé en pourcentage) sera élevé et plus le titre boursier sera risqué. Il tient également compte des données extrêmes.

 

Bêta et écart-type, quelle différence?

Il existe plusieurs façons d’évaluer le risque d’un titre boursier. Le bêta mesure la sensibilité des rendements d’une action par rapport aux rendements du marché dans son ensemble. C’est le risque spécifique à ce titre. Selon la théorie financière classique, il devrait y avoir une relation linéaire et positive entre le bêta et le rendement espéré d’une action. 

Par définition, le bêta du marché équivaut à un (1). Plus un investissement est risqué, plus son bêta sera élevé (supérieur à 1). Une entreprise dont le bêta est de 2 croîtra de 2 % lorsque le marché monte de 1 % (soit deux fois plus). Dans les mêmes conditions, un titre avec un bêta de 0,5 progressera de seulement 0,5 %. 

Quant à l’écart-type, il mesure plutôt la dispersion des rendements d’un titre autour de sa moyenne. Plus ces rendements s’écartent de leur moyenne, plus l’écart-type (calculé en pourcentage) sera élevé et plus le titre boursier sera risqué. Il tient également compte des données extrêmes.

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