Congestion à prévoir pour les matériaux


Édition de Mars 2022

Congestion à prévoir pour les matériaux


Édition de Mars 2022

Par Charles Poulin

Ceux qui ont reporté leurs projets de construction ou de rénovation résidentielle n’attendront pas une année de plus. (Photo: 123RF)

Le prix des matériaux a connu une spectaculaire croissance depuis le début de la pandémie, ce qui a mis en veilleuse de nombreux projets de construction et de rénovation de propriétés. Ces « retardataires » vont s’ajouter au marché et à une demande déjà robuste en ­elle-même en 2022, ce qui risque de créer une forte congestion dans les commerces de matériaux de construction et de rénovation.
Les coûts de construction d’une propriété ont grimpé, en moyenne, de 20 % en 2021, rappelle le président de l’Association québécoise de la quincaillerie et des matériaux de construction (AQMAT), ­Richard ­Darveau. Il ne s’attend pas à une frénésie similaire cette année, mais anticipe tout de même des prix 10 % plus élevés que ceux de 2020 pour l’acquisition des matériaux seulement.
« ­Honnêtement, si ça n’avait pas été du variant ­Omicron pour démarrer l’année, nous aurions connu une autre année record en 2022, ­estime-t-il. Tout était aligné. Plusieurs projets sont restés inactifs et cela fait que le premier semestre de l’année sera plus tranquille. Sans le virus, ça aurait été la folie furieuse. »
Disponibilité
La ­COVID-19 affecte tous les secteurs d’activité, et la production de matériaux de construction n’y échappe pas. La pénurie de ­main-d’œuvre observée au cours des dernières années s’est exacerbée avec la pandémie, et le variant ­Omicron en a ajouté une autre couche, souligne ­Richard ­Darveau. Qui dit moins d’employés au travail dit plus de retard de production.
« À cause du virus, il y a un accès plus limité aux matériaux, ­révèle-t-il. Les carnets de commandes des producteurs sont pleins et en retard. Présentement, ils sont rendus à livrer ce qu’ils n’ont pas envoyé l’an dernier. »
La conséquence directe, remarque ­Richard ­Darveau, est que les chantiers de construction ont pris beaucoup de retard. On parle de deux semaines à deux mois pour des livraisons prévues entre mars et juin.
Les fournisseurs sont également dans l’incapacité de garantir les commandes de matériaux parce que leur production est déjà entièrement vendue. Les acheteurs doivent donc patienter, le temps que la production rattrape la demande.
Fin des reports
Cela ne semble toutefois pas tempérer l’ardeur des entrepreneurs ni celle des consommateurs, affirme ­Richard ­Darveau. Ceux qui ont reporté leurs projets de construction ou de rénovation résidentielle n’attendront pas une année de plus. La plupart voudront saisir la chance que leur offre la baisse relative du coût des matériaux.
« L’an passé, les gens se sont dit que les matériaux étaient trop chers et qu’il valait mieux attendre, ­explique-t-il. Comme c’est moins cher cette année, ils vont aller de l’avant, souvent parce que c’est impossible de retarder plus, même si les ouvriers ne sont pas nécessairement au ­rendez-vous. »
Avec une « barrière à l’entrée » moindre, ­Richard ­Darveau s’attend ainsi à ce que l’année 2022 soit un peu moins fertile que 2021 pour la construction et la rénovation résidentielle, mais demeurera tout de même « unique » et meilleure que durant les années de 2018 à 2020.
« ­Le deuxième semestre de 2022 sera très, très fort, ­prédit-il. Omicron devrait avoir été assimilé, la crise dans le secteur du camionnage sera derrière nous, nous aurons une économie plus normalisée et il y aura beaucoup de nouveaux projets. »
Les producteurs locaux risquent de ne pas être en mesure de suivre le rythme, soutient ­Richard ­Darveau. Ils sont aux prises avec des problèmes de ­main-d’œuvre, particulièrement en région, ce qui ralentit ce qu’ils pourraient fournir, et cette situation fera grimper les prix.
L’influence de la ­Chine aura également des répercussions dans la chaîne d’approvisionnement des matériaux de construction. Richard ­Darveau rappelle que beaucoup d’entreprises ­là-bas ont modifié leur chaîne de production pour fabriquer des produits rendus nécessaires par la pandémie et ont donc détourné une partie de la production de matériaux.
Il ne faut pas oublier non plus que le problème de congestion du transport maritime n’a pas été réglé, ce qui a fait grimper en flèche les prix de livraison des conteneurs. « ­En magasin, où s’alimentent les entrepreneurs, il n’y a pas de tout et surtout pas à prix sympathique, laisse tomber ­Richard ­Darveau. N’oublions pas que les entreprises asiatiques, particulièrement celles de ­Chine, produisent à peu près 50 % de ce que vous retrouvez dans votre maison. »
Boom de rénovations prévu
Les problèmes d’approvisionnement seront vraisemblablement exacerbés à court et à moyen terme par une forte demande du côté de la rénovation au ­Québec.
Un sondage de l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du ­Québec (APCHQ) réalisé en décembre révèle que 72 % des propriétaires questionnés ont l’intention d’effectuer des travaux à l’intérieur de leur résidence d’ici trois ans, avec un budget moyen de 21 000 $. L’extérieur de plusieurs résidences sera lui aussi revampé, 47 % des répondants voulant améliorer terrasse, balcon ou patio. Le budget moyen est de 22 000 $. Un autre 6 % a comme projet de modifier ou d’agrandir sa résidence. Le coût moyen projeté est de 80 000 $.
Produits rares
Richard ­Darveau croit que le bois d’œuvre sera l’un des produits les plus populaires en 2022, et probablement celui qui sera le plus compliqué à obtenir. « C’est simple : il y a plus de clients que de bois, ­tranche-t-il. Ça va être disponible en quantité limitée, et les clients les plus sérieux seront privilégiés. »
Ces clients sérieux sont les entrepreneurs qui s’engagent d’avance, sur de plus gros volumes et à long terme, ­précise-t-il. Ceux qui demanderont du bois à la dernière minute risqueront de devoir attendre.
Les portes et fenêtres seront également plus rares, mentionne ­Richard ­Darveau. Les fabricants sont souvent dans l’attente de composants pour les terminer. Pour les armoires de cuisine, le volume de production au ­Québec et en importation ne suffit pas.
Le directeur du ­Service économique de l’APCHQ, ­Paul ­Cardinal, ajoute à cette liste les fermes et poutrelles de toit et, dans une moindre mesure, le béton et le gypse. « ­Les chantiers vont tout de même se terminer, mais ce sera probablement un peu plus long », ­laisse-t-il savoir. – ­Charles ­Poulin

Le prix des matériaux a connu une spectaculaire croissance depuis le début de la pandémie, ce qui a mis en veilleuse de nombreux projets de construction et de rénovation de propriétés. Ces « retardataires » vont s’ajouter au marché et à une demande déjà robuste en ­elle-même en 2022, ce qui risque de créer une forte congestion dans les commerces de matériaux de construction et de rénovation.

Les coûts de construction d’une propriété ont grimpé, en moyenne, de 20 % en 2021, rappelle le président de l’Association québécoise de la quincaillerie et des matériaux de construction (AQMAT), ­Richard ­Darveau. Il ne s’attend pas à une frénésie similaire cette année, mais anticipe tout de même des prix 10 % plus élevés que ceux de 2020 pour l’acquisition des matériaux seulement.

« ­Honnêtement, si ça n’avait pas été du variant ­Omicron pour démarrer l’année, nous aurions connu une autre année record en 2022, ­estime-t-il. Tout était aligné. Plusieurs projets sont restés inactifs et cela fait que le premier semestre de l’année sera plus tranquille. Sans le virus, ça aurait été la folie furieuse. »

 

Disponibilité

La ­COVID-19 affecte tous les secteurs d’activité, et la production de matériaux de construction n’y échappe pas. La pénurie de ­main-d’œuvre observée au cours des dernières années s’est exacerbée avec la pandémie, et le variant ­Omicron en a ajouté une autre couche, souligne ­Richard ­Darveau. Qui dit moins d’employés au travail dit plus de retard de production.

« À cause du virus, il y a un accès plus limité aux matériaux, ­révèle-t-il. Les carnets de commandes des producteurs sont pleins et en retard. Présentement, ils sont rendus à livrer ce qu’ils n’ont pas envoyé l’an dernier. »

La conséquence directe, remarque ­Richard ­Darveau, est que les chantiers de construction ont pris beaucoup de retard. On parle de deux semaines à deux mois pour des livraisons prévues entre mars et juin.

Les fournisseurs sont également dans l’incapacité de garantir les commandes de matériaux parce que leur production est déjà entièrement vendue. Les acheteurs doivent donc patienter, le temps que la production rattrape la demande.

 

Fin des reports

Cela ne semble toutefois pas tempérer l’ardeur des entrepreneurs ni celle des consommateurs, affirme ­Richard ­Darveau. Ceux qui ont reporté leurs projets de construction ou de rénovation résidentielle n’attendront pas une année de plus. La plupart voudront saisir la chance que leur offre la baisse relative du coût des matériaux.

« L’an passé, les gens se sont dit que les matériaux étaient trop chers et qu’il valait mieux attendre, ­explique-t-il. Comme c’est moins cher cette année, ils vont aller de l’avant, souvent parce que c’est impossible de retarder plus, même si les ouvriers ne sont pas nécessairement au ­rendez-vous. »

Avec une « barrière à l’entrée » moindre, ­Richard ­Darveau s’attend ainsi à ce que l’année 2022 soit un peu moins fertile que 2021 pour la construction et la rénovation résidentielle, mais demeurera tout de même « unique » et meilleure que durant les années de 2018 à 2020.

« ­Le deuxième semestre de 2022 sera très, très fort, ­prédit-il. Omicron devrait avoir été assimilé, la crise dans le secteur du camionnage sera derrière nous, nous aurons une économie plus normalisée et il y aura beaucoup de nouveaux projets. »

Les producteurs locaux risquent de ne pas être en mesure de suivre le rythme, soutient ­Richard ­Darveau. Ils sont aux prises avec des problèmes de ­main-d’œuvre, particulièrement en région, ce qui ralentit ce qu’ils pourraient fournir, et cette situation fera grimper les prix.

L’influence de la ­Chine aura également des répercussions dans la chaîne d’approvisionnement des matériaux de construction. Richard ­Darveau rappelle que beaucoup d’entreprises ­là-bas ont modifié leur chaîne de production pour fabriquer des produits rendus nécessaires par la pandémie et ont donc détourné une partie de la production de matériaux.

Il ne faut pas oublier non plus que le problème de congestion du transport maritime n’a pas été réglé, ce qui a fait grimper en flèche les prix de livraison des conteneurs. « ­En magasin, où s’alimentent les entrepreneurs, il n’y a pas de tout et surtout pas à prix sympathique, laisse tomber ­Richard ­Darveau. N’oublions pas que les entreprises asiatiques, particulièrement celles de ­Chine, produisent à peu près 50 % de ce que vous retrouvez dans votre maison. »

 

Boom de rénovations prévu

Les problèmes d’approvisionnement seront vraisemblablement exacerbés à court et à moyen terme par une forte demande du côté de la rénovation au ­Québec.

Un sondage de l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du ­Québec (APCHQ) réalisé en décembre révèle que 72 % des propriétaires questionnés ont l’intention d’effectuer des travaux à l’intérieur de leur résidence d’ici trois ans, avec un budget moyen de 21 000 $. L’extérieur de plusieurs résidences sera lui aussi revampé, 47 % des répondants voulant améliorer terrasse, balcon ou patio. Le budget moyen est de 22 000 $. Un autre 6 % a comme projet de modifier ou d’agrandir sa résidence. Le coût moyen projeté est de 80 000 $.

 

Produits rares

Richard ­Darveau croit que le bois d’œuvre sera l’un des produits les plus populaires en 2022, et probablement celui qui sera le plus compliqué à obtenir. « C’est simple: il y a plus de clients que de bois, ­tranche-t-il. Ça va être disponible en quantité limitée, et les clients les plus sérieux seront privilégiés. »

Ces clients sérieux sont les entrepreneurs qui s’engagent d’avance, sur de plus gros volumes et à long terme, ­précise-t-il. Ceux qui demanderont du bois à la dernière minute risqueront de devoir attendre.

Les portes et fenêtres seront également plus rares, mentionne ­Richard ­Darveau. Les fabricants sont souvent dans l’attente de composants pour les terminer. Pour les armoires de cuisine, le volume de production au ­Québec et en importation ne suffit pas.

Le directeur du ­Service économique de l’APCHQ, ­Paul ­Cardinal, ajoute à cette liste les fermes et poutrelles de toit et, dans une moindre mesure, le béton et le gypse. « ­Les chantiers vont tout de même se terminer, mais ce sera probablement un peu plus long », ­laisse-t-il savoir. 

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