Condo sur plan : c'est beau sur papier, sauf que...

Offert par Les affaires plus


Édition de Mai 2016

Condo sur plan : c'est beau sur papier, sauf que...

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Édition de Mai 2016

Acheter un condo dans un projet qui reste à construire peut être excitant. Mais le produit livré peut parfois être décevant. Que faire pour éviter les mauvaises surprises ?

L'achat de leur condo sur plan, Geneviève Dancause et son conjoint l'ont fait «à la dure».

«Nous cherchions un condo neuf dont nous pourrions choisir le plan à notre guise, plutôt que de devoir nous adapter à un condo déjà construit», explique la professionnelle dans la trentaine qui possédait déjà une copropriété avant de faire le saut.

En 2012, ils ont donc rencontré le promoteur et modifié le plan de leur unité en 3D en compagnie de l'architecte. Ils sont tombés amoureux du condo parfait... sur papier. La réalité les a toutefois rattrapés : retards de livraison, superficie plus petite que prévu, problèmes dans la qualité du produit livré, structure à refaire...

«Dès la visite du condo, nous aurions dû être accompagnés d'un inspecteur pour bien noter toutes les anomalies», dit-elle aujourd'hui, amère. Cela les aurait aiguillés quant à l'ampleur des correctifs à apporter et ils auraient communiqué plus rapidement avec la Régie du bâtiment du Québec (RBQ) pour obtenir de l'aide. Pendant un an, ils ont plutôt multiplié les suivis par téléphone et par courriel, sans que les réparations demandées ne soient jamais effectuées.

Un condo à visualiser

Les copropriétés poussent comme des champignons. À Montréal seulement, le nombre de constructions a plus que doublé depuis 2002, selon la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL). De ce lot, plusieurs sont vendus sur plan sans que l'acheteur puisse voir concrètement ce à quoi son prochain lieu de résidence ressemblera.

Comment éviter les mauvaises surprises et s'assurer de ne pas regretter son achat ?

À moins d'être architecte, l'acheteur moyen ne sait pas lire un plan et ignore souvent les éléments à examiner avec une plus grande attention.

«Si je n'avais pas demandé au promoteur le plan d'élévation qui montre bien l'emplacement des murs et des fenêtres, je ne me serais pas aperçue que pour aller sur le balcon, il fallait passer par la chambre des enfants, ce qui était un non-sens», lance Sandra Doyon, qui en est à son deuxième condo acheté sur plan avec son conjoint. Elle n'avait pas réussi à bien visualiser ce «détail» au moyen du plan qu'elle avait sous les yeux.

Le plan peut également vous montrer où se situe l'appareil de climatisation. Autrement dit, d'où proviendra le bruit du climatiseur s'il n'est pas intégré au système de ventilation ? Sera-t-il installé sur votre balcon ? Et qu'en est-il du climatiseur de votre voisin ?

Il faut aussi penser à la situation de son unité par rapport aux espaces communs de l'immeuble. «Si une unité se trouve à côté du gym, de la piscine ou d'une terrasse commune, cela engendre plus de va-et-vient près de chez soi, sans compter la luminosité», prévient Josée Dion, conseillère à la SCHL.

Et qu'en est-il de la promesse d'une vue imprenable sur un parc, ou encore de la lumière digne d'un solarium dans votre condo ? Rien n'est moins sûr, car cela dépend d'une part des projets de construction environnants, et d'autre part, parce qu'il est difficile de prévoir l'ensoleillement quand on ajoute des balcons ou des éléments de construction qui n'avaient pas été envisagés au départ.

Pour sa part, Sandra Doyon s'est rendue sur place pour essayer de le déterminer. Une bonne idée, mais malgré cela, une fois construit, son propre immeuble fait plus d'ombre qu'elle ne le croyait.

Pour vous faire une bonne idée de ce à quoi ressemblera votre futur condo, n'hésitez donc pas à utiliser tous les moyens du bord : sortez votre ruban à mesurer pour vous représenter la largeur des couloirs, et surtout, posez des questions lorsque certains éléments vous semblent nébuleux.

Le plan et ses limites

N'oubliez pas qu'il est pratiquement impossible qu'on ne fasse aucune modification au plan initial. On n'a qu'à penser aux vieux immeubles qu'on reprend dans Griffintown pour bâtir des condos neufs à partir de fondations existantes. Les entrepreneurs n'ont pas le choix de tenir compte de celles-ci. Par exemple, si le plan prévoyait le retrait d'une poutre, l'ingénieur pourrait l'interdire si ce n'est pas conforme aux normes de construction.

Par ailleurs, «il n'est pas rare de voir des différences de superficie de 8 à 12 %, un barème acceptable selon le calcul des dimensions brutes et les modifications qu'on a dû effectuer par obligation, dit Me Ghislain Raymond, avocat au cabinet De Grandpré Joli-Coeur. Au-delà de 15 %, par contre, il s'agit d'un changement substantiel pour l'acheteur.»

Si on nous a promis 100 m2 et qu'il nous en reste 85 à la fin du projet, c'est un bon motif pour exercer un recours ou pour faire réduire le prix de son condo. La jurisprudence compte d'ailleurs plusieurs cas de diminution de prix. Cependant, à sa connaissance, l'avocat n'a jamais vu de cas de rachat de condo.

C'est donc parce que le plan a ses limites que le promoteur ajoute souvent dans le contrat préliminaire d'achat une clause dans laquelle il se réserve le droit de modifier quelque peu le contenu de ce qui était initialement prévu.

«Un bon contrat pour l'achat d'un condo sur plan dévoile à l'avance des éventualités et les explique pour gérer les attentes des acheteurs», précise Ghislain Raymond. Il s'agit avant tout d'un accord de volonté. L'objectif consiste à concilier les aléas de la mise en chantier d'un immeuble et les besoins des clients.

Dans le cas de Geneviève Dancause et de son conjoint, le contrat ne prévoyait aucune clause «d'imprévus». «Une fois les murs construits, on s'est aperçu qu'on avait perdu quelques pieds carrés», explique-t-elle. En effet, le promoteur indique souvent au contrat les dimensions «brutes», calculées à partir du mur extérieur plutôt qu'à partir des cloisons intérieures.

La première visite

Lorsqu'on nous donne le feu vert pour visiter le condo avec l'entrepreneur, c'est un moment décisif pour gérer les problèmes. C'est à cette étape dite de «préréception» que vous devez noter ce qui cloche. Mais quand on n'est pas un expert, certains détails peuvent nous échapper.

C'est pourquoi il vaut mieux être accompagné d'une personne qui s'y connaît en construction, ou mieux encore, par un inspecteur en bâtiment.

Le rôle de l'inspecteur en bâtiment consiste à déceler les manquements aux normes établies et à dresser une liste des correctifs à apporter et des délais qu'a l'entrepreneur pour les effectuer.

«Il est presque impossible que les entrepreneurs ne fassent pas d'erreurs, et ce, sans qu'il y ait nécessairement de mauvaise foi de leur part», souligne Pascal Parent, président de l'Association des inspecteurs en bâtiments du Québec. Cela s'explique notamment par le nombre de sous-traitants qui peuvent participer au projet. Là où le bât blesse, c'est lorsque les erreurs sont à ce point substantielles qu'elles peuvent endommager prématurément le bâtiment. On parle alors de malfaçon.

En cas de problèmes avec l'entrepreneur, vous pouvez brandir la carte de garantie sur les bâtiments résidentiels neufs offerte par la RBQ, qui veillera à ce qu'il se soumette à ses obligations. À noter toutefois que ni les tours d'habitation de plus de quatre unités superposées ni les immeubles transformés n'y sont assujettis. L'entrepreneur offre aussi parfois une garantie semblable. Un coup de pouce dont on ne saurait se passer quand les choses vont mal.

Sachez par ailleurs que le promoteur pourrait exiger dans le contrat que vous emménagiez dans le condo, même si le reste du complexe immobilier n'est pas achevé. «Nous n'avons pas eu de terrasse de l'été parce qu'ils n'avaient pas terminé la construction des balcons, déplore Sandra Doyon. Sans compter la poussière à l'extérieur et les allées et venues des travailleurs dans les ascenseurs...»

L'achat d'un condo sur plan comporte son lot d'imprévus et de risques, mais toutes les histoires ne tournent pas au cauchemar non plus. À preuve, Sandra Doyon en est à sa deuxième expérience. Même s'il s'agit d'un choix fait «à l'aveuglette», il est possible de prendre toutes les mesures pour qu'il ne soit pas laissé au hasard.

CONDO SUR PLAN : 6 POINTS À NE PAS OUBLIER

1. Demandez au promoteur si vous pouvez apporter des modifications au plan avant le début des travaux, si des surcoûts seront liés à ces changements et si ceux-ci satisfont les normes de construction et les règlements de copropriété.

2. Vérifiez les antécédents judiciaires du promoteur, de l'entrepreneur et du constructeur auprès de la SOQUIJ, de l'Office de la protection du consommateur et de la Régie du bâtiment du Québec.

3. Visitez les projets de copropriétés déjà réalisés pour en savoir plus sur l'entrepreneur et sur la qualité de ses constructions.

4. Consultez la municipalité pour avoir l'heure juste sur les projets à venir autour de votre futur immeuble d'habitation.

5. Faites vérifier votre contrat par un professionnel.

6. Visitez le condo en compagnie d'un inspecteur en bâtiment ou d'un professionnel en construction pour vous aider à déceler les anomalies.

QUELQUES RESSOURCES

Registre des détenteurs de licence

Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs

SOQUIJ

Office de la protection du consommateur

Association des inspecteurs en bâtiments du Québec

 

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