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Jean Sasseville

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Jean Sasseville

Expert(e) invité(e)

Les multiples facettes d’une ville vivante

Jean Sasseville|Publié le 12 octobre 2022

Les multiples facettes d’une ville vivante

L’œuvre de l'artiste sherbrookoise Chantal Lagacé expose les moyens de connexion et interconnexion apparus et vécus d’une manière successive au fil des siècles dans l’histoire de la construction du paysage. (Photo: Chantal Lagacé)

BLOGUE INVITÉ. Les villes occupent 20% du territoire terrestre et 55% de la population mondiale y habite. C’était 30% de la population en 1950 et pas moins de 70% y habiteront d’ici 2050, selon la Banque mondiale. Et je crois que celles qui auront le plus de succès au cours des prochaines années, celles qui attireront le plus de nouveaux citoyens seront celles qui seront les plus vivantes.

Avec ses festivals, ses activités culturelles, ses restaurants, ses rues piétonnes, ses pistes cyclables et ses terrasses, Montréal est très vivante. Il y a plusieurs autres villes vivantes au Québec.

 

Végétaliser la ville 

Le terme ville vivante peut avoir plusieurs autres sens.

Il n’y a pas que l’activité humaine, et animale, qui rend une ville vivante.

On a longtemps opposé ville et nature. La ville durable tente de les rapprocher. L’objectif est de redonner sa place au vivant à tous les niveaux: trame verte, renaturation des sols, végétalisation, création d’espaces verts, agriculture urbaine, etc.

Nous avons conscience des effets du végétal sur la santé et sur le bien-être. Le végétal est la meilleure climatisation naturelle.

 

Architecture organique 

L’architecture organique cherche à s’intégrer au site, faisant du bâtiment et de son mobilier une composition unifiée et intriquée à son environnement.

L’architecture organique fut développée par les recherches de Frank Lloyd Wright, dont la maison la plus célèbre est intégrée à une cascade. Il considérait qu’une maison naissait de la rencontre des nécessités des gens et de l’esprit du lieu, à la manière d’un organisme vivant.

Métabolisme urbain

On utilise des qualificatifs du domaine de l’anatomie humaine: le cœur de la ville, les artères, les poumons (espaces verts), le centre névralgique, un immeuble intelligent et le ventre (marché).

Le métabolisme urbain est un concept relativement peu connu hors du milieu de la recherche. C’est pourtant un domaine riche, regroupant un grand nombre de méthodes et utilisé par plusieurs courants scientifiques.

Le développement des villes a suivi des lois économiques et sociales, qui, initialement, ne tenaient pas compte des limites du « capital naturel » disponible et de la capacité de l’environnement à absorber les rejets des sociétés humaines. Les phénomènes d’étalement urbain et du smog en sont des exemples. L’objectif premier des études de métabolisme urbain est de rendre compte des inefficiences au sein des villes. Quels sont les principaux pôles (organes) de consommation et de rejets? Que deviennent ces flux (eau, énergie, béton, émissions de CO2) une fois qu’ils sont entrés dans les sociétés urbaines? L’objectif est d’apporter un éclairage sur des stratégies de mitigation.

«Je considère que la ville fait partie de ce qu’on appelle un organisme artificiel vivant et que c’est le plus grand système artificiel vivant créé par l’homme. Je parlerai donc du métabolisme urbain, car comprendre son métabolisme, c’est-à-dire la manière dont les villes changent dans un monde qui change, est la grande problématique d’aujourd’hui», explique Carlos Moreno, professeur associé à la Sorbonne Business School et scientifique reconnu internationalement pour ses réflexions, travaux et propositions originales concernant les problématiques urbaines.

 

Morphologie urbaine 

La morphologie urbaine est une discipline qui étudie les formes et les caractéristiques d’une ville (les réseaux de circulation, le lotissement, le découpage du sol, les densités, les usages) et les phénomènes qui en sont à l’origine: topographie, histoire, influence culturelle, économie, règles d’urbanisme et contexte technologique ou énergétique. Elle est interdisciplinaire, entre histoire et géographie urbaines, urbanisme et archéologie.

 

Une ville comme une oeuvre d’art 

Et si un artiste s’intéressait aussi à la morphologie d’une ville?

Je suis amateur d’arts visuels. Mon plus récent coup de cœur a eu lieu lors de ma visite du Symposium international d’art contemporain de Baie-Saint-Paul. Je vous invite à consulter cette œuvre, intitulée Planer au-dessus de la continuité. Le Musée d’art contemporain de Baie-Saint-Paul en a fait son acquisition. Cette création, et ma rencontre avec l’artiste sherbrookoise Chantal Lagacé m’ont profondément marqué.

Cette œuvre sculpturale représente le territoire urbain de la ville de Baie-Saint-Paul sous la forme d’une carte géographique. Mesurant 120 pieds carrés, l’œuvre est articulée en 21 éléments représentant des secteurs, des quartiers et des zones vertes. Formellement, l’œuvre expose les moyens de connexion et interconnexion apparus et vécus d’une manière successive au fil des siècles dans l’histoire de la construction du paysage.

(Crédit photo: Chantal Lagacé)

«Par un jeu d’alternance entre la lumière naturelle du jour puis sous la lumière noire (ultraviolet), la carte présente tantôt la ville naturelle dans son aspect matériel puis soudain, sous la lumière noire, on ne voit que les connexions numériques par cellulaire d’un individu à l’autre, d’un ordinateur à l’autre. Car le numérique c’est ça, on ne le voit pas, mais il est toujours là, il modifie notre façon de vivre individuellement et collectivement», indique Chantal Lagacé.

Si Chantal Lagacé nous invite à regarder la trame urbaine et à nous laisser séduire par la composition picturale de son organisation, elle rend également compte de la nature vivante et expressive d’un milieu de vie.

«Du concept d’origine, souvent idéalisé, la ville devient ce que nous en faisons. De la ville quadrillée à la ville organique, les villes sont à l’image des gens qui l’habitent, souligne Chantal Lagacé. L’intervention de l’artiste sur la carte est le reflet de l’intervention de tout un chacun sur SA ville.»

Une ville n’est pas seulement qu’un endroit où on vit. On y reste parce que l’on y est bien. Dans cette ère de changements climatiques et de télétravail, façonnons notre ville pour la rendre plus vivante et agréable à vivre.

Je vous invite à consulter mes articles précédents.