Entrepreneurs : êtes-vous suffisamment assurés ?


Édition du 28 Novembre 2015

Entrepreneurs : êtes-vous suffisamment assurés ?


Édition du 28 Novembre 2015

[Photo : Shutterstock]

Vous voilà désormais à votre compte, seul maître à bord d'une aventure que vous avez soigneusement planifiée. Avez-vous toutefois pensé à assurer vos arrières ?

Notre cas

Martin, début quarantaine, père de deux enfants en bas âge, est non-fumeur et en bonne santé.

Martin vient de troquer son statut d'employé pour celui de consultant en informatique. Ses compétences sont recherchées. Il peut déjà compter sur une clientèle récurrente et diversifiée. Comme la plupart de ceux qui se lancent en affaires, notre entrepreneur a pris soin de peaufiner tous les détails de son plan d'affaires. Il s'est fait bâtir une vitrine Web impressionnante et des cartes professionnelles qui ne laissent personne indifférent. Côté assurances personnelles cependant, c'est autre chose...

Jean-Benoît Nadeau, auteur du Guide du travailleur autonome 3.0, Daniel Guillemette, président du cabinet de services financiers Diversico, et Julie Carrier, présidente du cabinet de services financiers Solutions financières Julie Carrier, ont accepté d'examiner la situation du jeune père de famille. Deux priorités émergent de l'exercice. Elles pourraient fort bien vous inspirer.

D'abord, quelques chiffres...

Martin, début quarantaine, père de deux enfants en bas âge, est non-fumeur et en bonne santé. Son virage professionnel coïncide avec un changement personnel : il s'est récemment séparé et bénéficie d'une garde partagée. Notre trio habite une magnifique demeure évaluée à 395 000 $, dont l'hypothèque avoisine les 295 000 $. Le prêt est couvert par l'assurance du prêteur.

L'homme prévoit des revenus nets tirés de ses activités professionnelles d'environ 100 000 $ annuellement. Sa retraite ? Elle lui semble encore loin. Il ne possède aucune participation à un régime de retraite d'un ancien employeur, et son REER frôle les 50 000 $. Son CELI est bien garni de 25 000 $. Il ne possède aucune autre dette - excepté le prêt hypothécaire et la mensualité associée à la location de sa voiture.

Parmi les autres données susceptibles d'intéresser nos trois experts, notons la détention d'une police d'assurance vie permanente dotée d'un capital-décès de 100 000 $ ; l'absence d'un contrat d'invalidité ; et la présence d'un testament et d'un mandat en cas d'inaptitude.

PRIORITÉ no 1

Se prémunir contre les effets néfastes d'une éventuelle invalidité

Jean-Benoît Nadeau, Daniel Guillemette et Julie Carrier sont unanimes sur un premier point : Martin doit de prime abord colmater une importante brèche dans sa planification financière, celle de l'absence d'une protection contre l'invalidité. Actuellement, c'est son CELI, qui contient l'équivalent de trois mois de revenu net, qui agit comme premier rempart dans l'éventualité d'une invalidité. Les chiffres démontrent que Martin est manifestement à la merci du paiement régulier de ses clients.

«Il doit absolument protéger sa capacité à générer un revenu, sachant qu'il lui reste environ 25 années à travailler avant d'envisager la retraite. J'opterais pour un contrat doté des meilleures garanties dans ce cas-ci», explique Mme Carrier. Même son de cloche du côté de M. Guillemette : «En considérant sa situation familiale, les fluctuations potentielles de ses revenus liées à son statut professionnel et sa faible capacité d'épargne - il consacre déjà 18 000 $ nets d'impôt au paiement de son hypothèque -, je lui recommande de souscrire une solide protection d'assurance invalidité avec un délai de carence maximal de 60 jours pour éviter d'épuiser complètement son fonds d'urgence, le cas échéant». Jean-Benoît Nadeau, lui, ajoute qu'il vaut mieux ne pas attendre que la maladie apparaisse. «Puisque Monsieur n'a pas l'épargne nécessaire actuellement pour pallier le risque d'une invalidité prolongée, c'est dans son intérêt de s'assurer maintenant, pendant qu'il est en bonne santé», précise-t-il.

Que doit anticiper notre informaticien en herbe en matière de coûts, en considérant que sa profession fait partie de la classe 4A (voir encadré) aux fins de la tarification ? «Pour une prestation mensuelle de 5 000 $ non imposable, Martin doit s'attendre à payer une prime d'environ 1 600 $ par année et à s'organiser avec un délai de carence de 90 jours», calcule Julie Carrier. Le principe est que plus le délai avant le versement des prestations est long, moins la prime est élevée.

Proposition comparable de Daniel Guillemette, dotée d'un plus court délai de carence et d'une prestation légèrement plus élevée, à 5 775 $. Ici, c'est 2 500 $ que notre jeune père de famille devra débourser annuellement. «Cette protection représente le pilier de sa pyramide financière, et je lui recommande de ne pas faire de compromis à cet égard», résume celui qui vient de lancer la plateforme adjointes.com, destinée aux conseillers qui souhaitent dénicher une perle rare d'exception pour les appuyer dans leur travail quotidien.

L'a b c d'une solide protection d'invalidité

Puisque l'assurance invalidité est un produit financier relativement complexe à magasiner - les options disponibles sont nombreuses -, mieux vaut choisir un conseiller d'expérience. Vous pourriez, en premier lieu, vérifier s'il figure bel et bien au registre de l'Autorité des marchés financiers. Interrogez-le ensuite sur son expérience dans le domaine de l'invalidité ainsi qu'auprès d'entrepreneurs. Exerce-t-il un rôle-conseil auprès de certains d'entre eux ? «Tous les conseillers en sécurité financière sont dans l'obligation de faire une analyse complète des besoins financiers de leurs clients avant de proposer la meilleure protection applicable», rappelle d'ailleurs Julie Carrier, qui compte 12 années d'expérience dans l'industrie.

Celle-ci recommande de choisir un type de contrat irrévocable, c'est-à-dire non résiliable par l'assureur et avec garantie de renouvellement. «La police d'assurance de Martin ne peut être résiliée, et les primes ne peuvent être majorées jusqu'à 65 ans», explique-t-elle. Il pourra même maintenir cette assurance par la suite, sous réserve de certaines modifications, s'il poursuit ses activités à plein temps. «Ne soyez pas surpris, cependant : plusieurs contrats sont acceptés avec une clause d'exclusion de maladies préexistantes, qui vient restreindre (ou carrément exclure) la protection offerte en raison d'une maladie présente avant la prise d'effet du contrat», ajoute Jean-Benoît Nadeau.

Les prestations peuvent être fonction de la perte de revenus subie des suites de l'invalidité, et non de l'incapacité de travailler. Cette approche est avantageuse si, par exemple, vous êtes en mesure de travailler mais pas autant qu'auparavant. Vous pourriez d'ailleurs ne pas être en mesure d'effectuer le même type de travail (ou de tâches) qu'avant l'invalidité. «Sous le contrat proposé, Martin est admissible à des indemnités de remplacement du revenu non seulement lors d'une invalidité totale ou partielle, mais aussi en cas d'incapacité d'exercer sa propre profession. Il pourrait donc poursuivre un autre type d'activités professionnelles et conserver malgré tout le niveau de revenu qu'il avait auparavant», remarque Julie Carrier.

Sous ce même contrat, Martin bénéficie d'une option d'assurance additionnelle Revenu futur, de 15 000 $ au maximum dans ce cas-ci. Cette dernière lui permettra de souscrire plus tard, lorsque ses revenus augmenteront, un montant d'assurance supplémentaire sans égard à son état de santé ou à sa profession. La protection contre l'inflation (le revenu assuré est ajusté en fonction de l'indice des prix à la consommation), la rechute d'invalidité (qui propose la suppression du délai de carence lorsque vous redevenez invalide dans les douze mois qui suivent une invalidité précédente) et l'exonération des primes en cas d'invalidité sont d'autres exemples de garanties possibles.

Et les frais fixes à assumer ?

Au-delà du remplacement du revenu, cependant, un contrat d'assurance invalidité destiné aux entrepreneurs peut aussi servir à acquitter les frais généraux de votre entreprise (le loyer du local où sont situées vos installations et l'ensemble des coûts associés aux services publics utilisés). Ayant très peu de frais fixes à assumer pour faire rouler son entreprise, c'est un contrat dont Martin peut actuellement se passer. Qui plus est, l'assurance frais généraux d'entreprise n'est habituellement pas offerte au propriétaire d'entreprise dont le lieu de travail est dans son domicile. «Évitez le piège d'une trop lourde protection d'assurance qui viendrait limiter votre capacité financière. Rappelez-vous que tout est une question de risques : l'assureur fait, en quelque sorte, un pari légitime sur votre personne», résume Jean-Benoît Nadeau.

INVALIDITÉ : Le coût estimé pour Martin est de 1 600 à 2 500 $ annuellement.

CLASSIFICATION DES PROFESSIONS

Aux fins de toute tarification, l'assureur se base sur un tableau de professions pour déterminer le risque associé à un métier en particulier. Le consultant informatique - comme Martin - se retrouve dans la catégorie 4A, qui regroupe les professionnels et les cadres supérieurs qui peuvent bénéficier de taux préférentiels d'assurance invalidité. À l'inverse, la catégorie B représente les travailleurs exposés aux risques les plus dangereux : certaines professions ne peuvent donc donner droit aux taux de la catégorie A. Si Martin occupait un emploi d'opérateur d'équipement lourd, à titre d'exemple, la prime d'assurance invalidité à assumer serait plutôt d'environ 3 000 $ annuellement pour la même protection, exception faite d'une prestation mensuelle réduite et plafonnée à 3 500 $.

QUE RISQUE MARTIN ?

48 % Probabilité de décès, d'une maladie grave ou d'une invalidité avant 65 ans

32 % Probabilité de subir une invalidité avant 65 ans

25 % Probabilité de subir une maladie grave avant 65 ans

6 % Probabilité de décès avant 65 ans

Source : www.biensassurer.ca/evaluer-votre-risque/

Et la retraite ?

«Martin est en retard dans la planification de sa retraite !» s'exclame Julie Carrier. Grosso modo, en posant l'hypothèse d'une retraite dans 25 ans, d'un rendement annuel moyen composé de 5 % et d'une cotisation hebdomadaire de 220 $ - l'équivalent de 953 $ par mois - à effectuer dès maintenant au REER, son pécule avoisinera les 730 000 $ à 65 ans. «Sans même tenir compte de l'inflation, et en considérant qu'il souhaite pouvoir compter sur 70 % de ses revenus actuels une fois retraité, son REER sera épuisé lors de la seizième année de retraite», estime la conseillère. Les programmes gouvernementaux, parmi lesquels figurent la prestation de la Régie des rentes du Québec (RRQ) et le versement de la pension de la Sécurité de la vieillesse (PSV), aideront assurément Martin à cette étape de la vie. Il risque cependant de devoir compter sur la vente de sa résidence pour espérer jouir de la retraite souhaitée.

Daniel Guillemette rappelle de son côté l'importance d'épargner 10 % des revenus gagnés. «Un investissement de 10 000 $ à son REER réduira sa facture fiscale annuelle d'environ 4 500 $. En fonction du paiement mensuel qu'il consacre à la location de sa voiture, Martin me paraît en avoir la capacité», dit-il.

Notre informaticien doit donc dès maintenant jongler avec de nouvelles données à intégrer à son chiffrier Excel. À la base, c'est dans la gestion disciplinée de son budget qu'il pourra réussir à assumer l'ensemble de ses responsabilités financières. En plus de devoir «se payer en premier», Martin doit comprendre que le succès de son entreprise passe non seulement par la qualité du service qu'il offre aux clients, mais aussi par une saine gestion du risque associé à son statut de travailleur autonome.

«Sans même tenir compte de l'inflation [ ... ] son REER sera épuisé lors de la seizième année de retraite.»

PRIORITÉ NO 2

Des besoins en assurance vie, aussi

Avec deux enfants en bas âge, Martin doit également renforcer le volet assurance vie de sa planification financière. «Il possède déjà une base à ce chapitre, avec l'assurance permanente d'un capital-décès de 100 000 $. C'est amplement suffisant pour couvrir les frais funéraires, procurer un fonds d'urgence aux proches d'ici le règlement de la succession et régler les factures en suspens», explique Jean-Benoît Nadeau.

Compte tenu des moyens financiers de Martin, Julie Carrier suggère d'avoir recours à une assurance temporaire de 10 ou 20 ans pour garantir un fonds d'étude aux enfants, pour éliminer le solde hypothécaire résiduel et pour remplacer un certain pourcentage du revenu qu'aurait normalement gagné Martin (65 %, à titre d'exemple) jusqu'à ce que les enfants atteignent l'âge de 18 ou 21 ans.

«Mieux vaut avoir une assurance temporaire que pas d'assurance vie du tout», ajoute-t-elle. L'important, c'est de procéder à une analyse rigoureuse des besoins et d'être en mesure d'indiquer «le montant adéquat sur le chèque» en cas de décès, dit-elle. Si l'analyse détaillée révèle un besoin additionnel d'assurance vie de 1 million de dollars pour respecter les souhaits de Martin, à combien s'élèveront les primes en question ? «Annuellement, il s'agit d'environ 625 $ pour un contrat temporaire de 10 ans, et de 1 145 $ pour une protection valable 20 ans», calcule Mme Carrier.

S'il souhaite couvrir entièrement la valeur de son capital humain - la somme des revenus prévus sur une période de 25 ans en incluant une croissance prévue annuelle de 3 % de ceux-ci -, c'est une protection de 3,6 M$ qui pourrait se révéler nécessaire. «Une assurance vie temporaire d'un terme de 10 ans coûterait environ 200 $ par mois (2 400 $/année)», calcule Daniel Guillemette. Le remplacement de la valeur du capital humain représente le montant le plus élevé de capital assuré que Martin pourrait vouloir souscrire.

Martin pourrait cependant réaliser quelques économies au passage. Il serait préférable d'opter pour un contrat individuel d'assurance offert par un assureur au lieu de la solution proposée d'office par le prêteur hypothécaire. La première est moins coûteuse, et c'est surtout par sa flexibilité qu'elle se démarque de la seconde. Au lieu de ne couvrir que le solde hypothécaire, elle protège l'ensemble de votre passif : la prestation sera versée à votre bénéficiaire pour qu'il puisse gérer lui-même l'affectation des sommes reçues. «Le montant de la couverture diminue au fur et à mesure que le solde du prêt hypothécaire baisse lorsque le contrat est associé à l'hypothèque», rappelle Jean-Benoît Nadeau. «Et qu'arrivera-t-il à cette protection si jamais Martin doit changer de prêteur ?» demande à son tour Julie Carrier.

ASSURANCE VIE : Le coût estimé pour Martin varie de 625 à 2 400 $ annuellement, moins l'économie réalisée par l'annulation de la protection hypothécaire en vigueur actuellement.

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