Des politiques de travail qui ont du chien... et du chat!

Offert par Les Affaires


Édition du 16 Février 2022

Des politiques de travail qui ont du chien... et du chat!

Offert par Les Affaires


Édition du 16 Février 2022

Par Catherine Charron

Les congés de «papaternité» (pawternity) et autres avantages sociaux spécialement destinés aux maîtres ne sont pas encore être monnaie courante. (Photo: Martin Flamand)

 

Bien que le nombre d’animaux de compagnie ait atteint un sommet au Québec en 2021, les congés de « papaternité » (« pawternity ») et autres avantages sociaux spécialement destinés aux maîtres ne semblent pas encore être monnaie courante. Ni l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés ni le Conseil du patronat du Québec n’ont souhaité se prononcer sur la question. 
Cela ne signifie pas pour autant que toutes les organisations tournent le dos à cette pratique novatrice qui contribue au bien-être de leurs salariés. C’est bien pour cette raison que chaque entreprise que « Les Affaires » a interviewée a adopté une politique de travail ouverte aux animaux de compagnie (« pet friendly »).
La société de développement de logiciels Flinks, fondée en 2016, fait partie de ce nombre. Soucieuse de permettre à ses employés de s’épanouir, la start-up leur offre notamment autant de journées de bien-être payées qu’ils le souhaitent, de même que la possibilité d’amener leur compagnon à quatre pattes au bureau. En plus du confort que leur procure cette présence, « ça évite qu’ils pensent à leur animal qui attend à la maison […], ça apporte une paix d’esprit », explique la conseillère en ressources humaines agréée Stéphanie Ouellet.
Gwladys Poharec, chef Personnes et culture de la Boutique 1861, est du même avis. Tous les employés, du bureau comme des magasins, peuvent amener leur chien ou leur chat s’ils en demandent la permission au préalable. Cet atout, qui s’ajoute à une longue liste d’avantages sociaux, est fort apprécié par les membres de leur équipe.
Grâce à la politique de travail flexible de l’entreprise, les collègues ajustent leur horaire ou leurs disponibilités s’ils doivent s’absenter pour s’occuper de leur bête. « Si la personne a du temps accumulé, ou même qu’elle veut piger dans ses vacances ou utiliser un sans-solde, elle le peut », indique Gwladys Poharec.
En cas de décès de leur fidèle compagnon, les salariés de Design Shopp, eux, ont droit à une journée de congé rémunéré. « Si quelqu’un est en deuil, personne n’est surpris qu’il s’absente », raconte sa vice-présidente, Melissa Reis. De toute façon, il ne sera pas concentré, ça ne sert en rien d’en ajouter. »
Celle qui a longtemps amené son cocker spaniel Charlie au travail témoigne de l’effet apaisant que la présence d’un animal a sur le niveau de stress de l’organisation, mais aussi sur sa cohésion, comme le montrent de nombreuses études. 
« Puisqu’on doit sortir le chien à quelques reprises, les collègues s’échangeaient les tours à l’extérieur, lorsqu’ils vont fumer ou prendre l’air. Tout le monde s’assure qu’il a de l’eau, joue avec… ça renforcit l’esprit d’équipe », a-t-elle observé. Même en télétravail, elle en constate les bienfaits. 
« C’est rassembleur, ça permet de communiquer sur autre chose que le travail. Je vous garantis que quand quelqu’un amène un nouvel animal, tous viennent lui dire “bonjour” », renchérit Gwladys Poharec.
Une entente tripartite
Légalement, rien n’oblige les entreprises québécoises à adopter de telles mesures pour accommoder les amoureux de boules de poils. Si tel est toutefois leur souhait, l’avocat en droit de l’emploi et en droit animalier, Me John-Nicolas Morello, indique que quelques principes doivent être respectés. 
Contrairement aux politiques de travail qui régissent l’utilisation d’un téléphone cellulaire, par exemple, celles qui encadrent la présence de Fido au bureau doivent tenir compte de son bien-être. « Depuis 2015, au Québec, la loi précise qu’un animal est doué de sensibilité. Il a des impératifs biologiques », explique-t-il.
La politique doit donc stipuler que le collègue poilu peut y être nourri, qu’il a accès à des aires de soulagement, tout en étant stimulé et socialisé. « S’il ne peut pas bouger, on peut se demander si c’est bien pour lui de venir au bureau », glisse l’avocat en entrevue.
C’est sans doute pourquoi toutes les PME sondées ont en place une politique de gestion des horaires flexibles. « Un employé doit pouvoir s’absenter pour permettre à son animal de faire ses besoins ; il faut penser à son bien-être aussi », souligne Gwladys Poharec.
Par ailleurs, une étude menée par la Nova School of Business and Economics, au Portugal, conclut que les horaires flexibles, l’autonomie des travailleurs et une bonne communication au sein de l’organisation ont leur pesant d’or pour réduire le niveau de stress et améliorer l’ambiance dans les entreprises qui veulent adopter une telle politique.
En plus de s’assurer que l’environnement de travail est sécuritaire pour ses collègues à quatre pattes, l’employeur doit aussi vérifier que son bail accepte les animaux. 
C’est ce qu’a fait l’équipe de Design Shopp, il y a un peu plus de six ans, lorsqu’elle était à la recherche de son bureau montréalais. Si sa politique de travail concernant la présence du fidèle compagnon de l’employé(e) était « informelle », aux dires de la vice-présidente, n’en demeure pas moins que « des limites étaient claires. S’il y a un dégât, ça doit être nettoyé immédiatement ».
Chez Flinks, où en moyenne de deux à trois chiens arpentaient les étages avant le début de la pandémie, le maître doit respecter l’environnement de travail et est responsable » en cas d’accident, dicte la politique.
Me John-Nicolas Morello ajoute que les personnes allergiques, ou encore incommodées par ces animaux, doivent aussi être prises en compte. « Il ne faut pas oublier que lorsqu’il y a des morsures, provoquées ou non, ça entre dans les accidents de travail de la CNESST. »
Aucune des entreprises sondées n’a jusqu’à présent rencontré de tels problèmes, ou une quelconque réticence à la présence d’un chien ou d’un chat. Gwladys Poharec de Boutique 1861, précise qu’ils indiquent néanmoins clairement où se trouvent leurs acolytes canins et félins. « On a la chance d’avoir plusieurs zones de pauses, de grands espaces, plusieurs cuisines… c’est très facile de ne pas croiser d’animal. »
Du cas par cas
Tous les candidats ou milieux de travail ne sont toutefois pas adaptés à une telle réalité. « Des dégâts, on en a ramassé », glisse Mélissa Reis, qui a elle-même cessé d’amener Charlie au boulot, devenu un « mangeur de sandwich en série ». Cela ne l’empêche pas de fortement recommander aux patrons de tenter le coup, à raison d’une journée par semaine ou d’un projet pilote, et de mesurer les répercussions que ça aura sur leur équipe.
Stéphanie Ouellet suggère aux entreprises qui envisagent de mettre en place une telle mesure de sonder leurs coéquipiers afin de s’assurer qu’elle fait réellement partie de leurs besoins. Elles doivent ensuite s’accorder avec leur culture d’entreprise, rappelle-t-elle.
Ce serait la clé pour décupler les effets d’une politique de travail ouverte aux animaux, selon les auteurs de l’étude de la Nova School of Business and Economics, bien plus que si « ce n’est qu’un instrument pour augmenter la satisfaction et l’engagement, ou pour bonifier sa marque employeur », concluent-ils.

 

Bien que le nombre d’animaux de compagnie ait atteint un sommet au Québec en 2021, les congés de «papaternité» (pawternity) et autres avantages sociaux spécialement destinés aux maîtres ne semblent pas encore être monnaie courante. Ni l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés ni le Conseil du patronat du Québec n’ont souhaité se prononcer sur la question. 

Cela ne signifie pas pour autant que toutes les organisations tournent le dos à cette pratique novatrice qui contribue au bien-être de leurs salariés. C’est bien pour cette raison que chaque entreprise que Les Affaires a interviewée a adopté une politique de travail ouverte aux animaux de compagnie (pet friendly).

La société de développement de logiciels Flinks, fondée en 2016, fait partie de ce nombre. Soucieuse de permettre à ses employés de s’épanouir, la start-up leur offre notamment autant de journées de bien-être payées qu’ils le souhaitent, de même que la possibilité d’amener leur compagnon à quatre pattes au bureau. En plus du confort que leur procure cette présence, «ça évite qu’ils pensent à leur animal qui attend à la maison […], ça apporte une paix d’esprit», explique la conseillère en ressources humaines agréée Stéphanie Ouellet.

Gwladys Poharec, chef Personnes et culture de la Boutique 1861, est du même avis. Tous les employés, du bureau comme des magasins, peuvent amener leur chien ou leur chat s’ils en demandent la permission au préalable. Cet atout, qui s’ajoute à une longue liste d’avantages sociaux, est fort apprécié par les membres de leur équipe.

Grâce à la politique de travail flexible de l’entreprise, les collègues ajustent leur horaire ou leurs disponibilités s’ils doivent s’absenter pour s’occuper de leur bête. «Si la personne a du temps accumulé, ou même qu’elle veut piger dans ses vacances ou utiliser un sans-solde, elle le peut», indique Gwladys Poharec.

En cas de décès de leur fidèle compagnon, les salariés de Design Shopp, eux, ont droit à une journée de congé rémunéré. «Si quelqu’un est en deuil, personne n’est surpris qu’il s’absente, raconte sa vice-présidente, Melissa Reis. De toute façon, il ne sera pas concentré, ça ne sert en rien d’en ajouter.»

Celle qui a longtemps amené son cocker spaniel Charlie au travail témoigne de l’effet apaisant que la présence d’un animal a sur le niveau de stress de l’organisation, mais aussi sur sa cohésion, comme le montrent de nombreuses études. 

«Puisqu’on doit sortir le chien à quelques reprises, les collègues s’échangeaient les tours à l’extérieur, lorsqu’ils vont fumer ou prendre l’air. Tout le monde s’assure qu’il a de l’eau, joue avec… ça renforcit l’esprit d’équipe», a-t-elle observé. Même en télétravail, elle en constate les bienfaits. 

«C’est rassembleur, ça permet de communiquer sur autre chose que le travail. Je vous garantis que quand quelqu’un amène un nouvel animal, tous viennent lui dire “bonjour”», renchérit Gwladys Poharec.

 

Une entente tripartite

Légalement, rien n’oblige les entreprises québécoises à adopter de telles mesures pour accommoder les amoureux de boules de poils. Si tel est toutefois leur souhait, l’avocat en droit de l’emploi et en droit animalier et président fondateur de l'organisme de bienfaisance Droit animalier Québec - DAQ, Me John-Nicolas Morello, indique que quelques principes doivent être respectés. 

Contrairement aux politiques de travail qui régissent l’utilisation d’un téléphone cellulaire, par exemple, celles qui encadrent la présence de Fido au bureau doivent tenir compte de son bien-être. «Depuis 2015, au Québec, la loi précise qu’un animal est doué de sensibilité. Il a des impératifs biologiques», explique-t-il.

La politique doit donc stipuler que le collègue poilu peut y être nourri, qu’il a accès à des aires de soulagement, tout en étant stimulé et socialisé. «S’il ne peut pas bouger, on peut se demander si c’est bien pour lui de venir au bureau», glisse l’avocat en entrevue.

C’est sans doute pourquoi toutes les PME sondées ont en place une politique de gestion des horaires flexibles. «Un employé doit pouvoir s’absenter pour permettre à son animal de faire ses besoins; il faut penser à son bien-être aussi», souligne Gwladys Poharec.

Par ailleurs, une étude menée par la Nova School of Business and Economics, au Portugal, conclut que les horaires flexibles, l’autonomie des travailleurs et une bonne communication au sein de l’organisation ont leur pesant d’or pour réduire le niveau de stress et améliorer l’ambiance dans les entreprises qui veulent adopter une telle politique.

En plus de s’assurer que l’environnement de travail est sécuritaire pour ses collègues à quatre pattes, l’employeur doit aussi vérifier que son bail accepte les animaux. 

C’est ce qu’a fait l’équipe de Design Shopp, il y a un peu plus de six ans, lorsqu’elle était à la recherche de son bureau montréalais. Si sa politique de travail concernant la présence du fidèle compagnon de l’employé(e) était «informelle», aux dires de la vice-présidente, n’en demeure pas moins que «des limites étaient claires. S’il y a un dégât, ça doit être nettoyé immédiatement».

Chez Flinks, où en moyenne de deux à trois chiens arpentaient les étages avant le début de la pandémie, le maître doit respecter l’environnement de travail et est responsable en cas d’accident, dicte la politique.

Me John-Nicolas Morello ajoute que les personnes allergiques, ou encore incommodées par ces animaux, doivent aussi être prises en compte. «Il ne faut pas oublier que lorsqu’il y a des morsures, provoquées ou non, ça entre dans les accidents de travail de la CNESST.»

Aucune des entreprises sondées n’a jusqu’à présent rencontré de tels problèmes, ou une quelconque réticence à la présence d’un chien ou d’un chat. Gwladys Poharec de Boutique 1861, précise qu’ils indiquent néanmoins clairement où se trouvent leurs acolytes canins et félins. «On a la chance d’avoir plusieurs zones de pauses, de grands espaces, plusieurs cuisines… c’est très facile de ne pas croiser d’animal.»

 

Du cas par cas

Tous les candidats ou milieux de travail ne sont toutefois pas adaptés à une telle réalité. «Des dégâts, on en a ramassé», glisse Mélissa Reis, qui a elle-même cessé d’amener Charlie au boulot, devenu un «mangeur de sandwich en série». Cela ne l’empêche pas de fortement recommander aux patrons de tenter le coup, à raison d’une journée par semaine ou d’un projet pilote, et de mesurer les répercussions que ça aura sur leur équipe.

Stéphanie Ouellet suggère aux entreprises qui envisagent de mettre en place une telle mesure de sonder leurs coéquipiers afin de s’assurer qu’elle fait réellement partie de leurs besoins. Elles doivent ensuite s’accorder avec leur culture d’entreprise, rappelle-t-elle.

Ce serait la clé pour décupler les effets d’une politique de travail ouverte aux animaux, selon les auteurs de l’étude de la Nova School of Business and Economics, bien plus que si «ce n’est qu’un instrument pour augmenter la satisfaction et l’engagement, ou pour bonifier sa marque employeur», concluent-ils.

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