Majorque, mi-février. Les terrasses en pierres sèches de la Serra de Tramuntana sont couvertes d'oliviers, de figuiers, de citronniers et d'un grand manteau blanc. De la neige ? Que non ! Ce sont des milliers de fleurs d'amandier dont le parfum embaume les routes sinueuses et les cols de la plus montagneuse des îles Baléares, situées au large de l'Espagne.
À lire aussi:
À la mode de chez nous
Le styliste personnel, indispensable pour une garde-robe bien garnie
Les joailliers québécois, entre tradition et modernité
«Nous avons un grand capital de créativité» - Lili Fortin, Tristan
Dans ce décor féerique en pleine mer Méditerranée, des dizaines de pelotons de cyclistes ont commencé à prendre d'assaut les routes de l'île. La moitié d'entre eux ont les yeux rivés sur leur odomètre Garmin. De vraies machines. Au diable le paysage ! Ces rouleurs ne veulent faire aucun compromis sur la cadence, la distance franchie et la puissance générée par chaque coup de pédale. Et il y a les autres qui, les yeux pétillants, prennent le temps de contempler et d'immortaliser sur leur téléphone intelligent ce panorama agricole que l'UNESCO a inscrit au patrimoine mondial de l'humanité. Un peu rouillés et pompant l'air sec et salin à pleins poumons, ils regrettent de ne pas avoir fréquenté le gym plus souvent avant de traverser l'Atlantique. Gâtée par une température moyenne annuelle de 16 degrés Celsius, l'île de Majorque est devenue la destination coqueluche de nombreux mordus de vélo sur route qui veulent étirer le plus possible leur saison cycliste au printemps et à l'automne. Allemands, Français, Américains et Québécois s'y côtoient. Et plusieurs équipes professionnelles débarquent dans l'archipel des Baléares pour leur entraînement pré-tours.
Courir avec des champions
L'ancien coureur professionnel d'origine irlandaise Stephen Roche y a d'ailleurs établi son académie. Ce rare champion du triplé, soit le Tour de France, le Tour d'Italie et les championnats du monde dans la même année en 1987 (avant lui, seul Eddy Merckx avait réalisé l'exploit en 1974), organise depuis 20 ans des sorties vélos privées et de groupe sur toute l'île. «On sent une forte attirance de la part des cyclistes pour les destinations où ils peuvent côtoyer d'anciens professionnels du vélo. Tant qu'à investir quelque milliers de dollars pour s'équiper comme des pros, ils veulent rouler là où les coureurs le font», indique Alain Pelletier, gérant de la boutique Cycle Gervais Rioux, à Montréal. En plus de loger dans des établissements 4 étoiles, les cyclistes qui visitent l'île de Majorque ont l'occasion de participer à des stages pour améliorer leur performance. Un séjour de rêve accessible pour quelque 2 000 euros par semaine, sans compter le transport aérien. Les plus aisés, poursuit M. Pelletier, vont toutefois s'offrir «la coche» : une semaine en compagnie de l'ancien champion canadien Steve Bauer, dans les Alpes françaises. Si vous êtes prêts à payer 5 600 $, billet d'avion en sus, l'ex-coureur qui a porté le maillot jaune du Tour de France pendant neuf jours lors de l'édition 1990 vous entraînera au coeur des cols légendaires de l'Hexagone. Un petit groupe d'un maximum de 20 personnes peut participer à ce séjour exclusif qui a lieu au cours de la dernière semaine du Tour. Au menu cette année : quatre étapes du Tour, dont l'éprouvante Modane-Alpe D'Huez, un parcours de plus de 110 km qui compte deux cols (Télégraphe et Galibier) et une ascension finale de 13,8 km à 8,1 % incluant 21 virages. «L'itinéraire change chaque année. Il est conçu pour emprunter des sections du parcours de la présente édition du Tour de France» indique Josée Larocque, accompagnatrice et responsable de la logistique de Steve Bauer Bike Tours. Les cyclistes peuvent ainsi croiser les coureurs du Tour au départ ou à l'arrivée des étapes. À ce propos, le voyage se conclut à Paris, où les participants assistent à l'arrivée des coureurs sur les Champs Élysées. Populaire auprès des gens d'affaires du Canada, des États-Unis, du Japon, de l'Afrique du Sud et du Royaume-Uni, cette expérience haut de gamme comprend un ratio d'un d'accompagnateur pour quatre cyclistes, l'hébergement dans des établissements 4 étoiles (l'an dernier, tout le monde logeait dans un château privé), les petits-déjeuners, deux lunchs et quatre soupers, dont un dans un restaurant étoilé du Guide Michelin. Il y a aussi un gilet vélo souvenir, signé Steve Bauer. «Nous fournissons également des conseils pour aider les cyclistes à bien se préparer avant le départ», ajoute Mme Larocque.
À lire aussi:
À la mode de chez nous
Le styliste personnel, indispensable pour une garde-robe bien garnie
Les joailliers québécois, entre tradition et modernité
«Nous avons un grand capital de créativité» - Lili Fortin, Tristan
Poids plume mécaniques
«Le vélo est définitivement devenu une affaire de gros sous», constate Jacques Sennéchael, rédacteur en chef du magazine VéloMag. Non seulement les gens multiplient les voyages à l'étranger, mais ils investissent des petites fortunes dans leur équipement. D'après un sondage mené auprès de 10 000 lecteurs, un cycliste sur trois est prêt à payer plus de 3 000 $ pour s'offrir le meilleur vélo de route. Soit la valeur de base d'un vélo avec cadre en carbone. Chez Argon 18, on s'attend à vendre, pour la saison qui commence, deux bonnes douzaines de modèles Gallium Pro et Nitrogen à 12 500 $ chacun. Deux poids plume qui n'excèdent pas 7 kg. Il faut dire que l'entreprise montréalaise bénéficie d'un coup marketing sans précédent. Elle sera cet été le tout premier fabricant québécois de vélos haut de gamme à fournir des montures à une équipe du Tour de France. L'équipe allemande commanditée portera d'ailleurs le nom de Bora Argon 18. «Contrairement à d'autres vélos conçus pour les professionnels, les nôtres se veulent très confortables pour les amateurs», soutient l'ancien champion canadien Gervais Rioux, président-fondateur d'Argon 18. Le Gallium Pro, idéal pour les ascensions, et le Nitrogen, dessiné pour conquérir les longues distances, sont disponibles à partir de 6 000 $. À ce prix, vous ne bénéficierez cependant pas de l'équipement qui fait actuellement fureur : le système révolutionnaire Shimano Di2, qui change les vitesses électroniquement. Plus vous allongez les dollars, plus les boutiques bonifient votre achat. «On ne sortira pas le champagne, on vous servira tout au plus un espresso», mentionne Jacques Sennéchael. Plus sérieusement, pour les vélos de plus de 5 000 $, le guidon, la selle et les pédales seront compris, ainsi qu'un service de positionnement 3D d'une valeur de 250 $. Cette séance de deux heures, où vous aurez près d'une dizaine de capteurs collés aux chevilles, aux genoux, aux cuisses, aux épaules, aux coudes et aux mains, permet au technicien de la boutique d'ajuster à la perfection vos principaux points d'appui. Objectif : maximiser l'énergie produite par chaque coup de pédale. «Cela permet de rouler plus vite, tout en réduisant les risques de développer des problèmes physiques avec l'âge», dit Alain Pelletier, gérant de la boutique Cycles Gervais Rioux. Autrement dit, un service indispensable pour profiter le plus longtemps possible de votre investissement.
De ce côté-ci de l'Atlantique
Il n'y a pas que dans le sud de l'Europe qu'on peut démarrer plus tôt la saison de vélo. La région de Tucson, en Arizona, et son ascension du mont Lemmon, est une destination intéressante pour les premiers coups de pédale de l'année. Un gain de près de 2 000 mètres d'altitude étalé sur un peu plus de 50 km... Plus près d'ici, l'État de la Virginie bénéficie de températures printanières dès mars. Parfait pour s'attaquer au Skyline Drive et au Blue Ridge Parkway, deux routes touristiques qui surplombent la crête des Appalaches. Mais attention, pour savourer les panoramas de ces routes aux conditions presque parfaites, il vaut mieux avoir les genoux bien huilés. Ici, ça monte ou ça descend. Les plats sont quasi inexistants. C'est d'ailleurs en Virginie que le Blue Ridge Parkway (qui se rend jusqu'au Tennessee) présente sa plus longue ascension. De la rivière James jusqu'au sommet d'Apple Orchard Mountain, vous devez franchir plus de 1 000 m d'altitude sur 20 km. En jetant l'ancre au Clifton Inn, un hôtel Relais & Châteaux à Charlottesville, vous pourrez profiter d'un endroit chic au charme européen pour recharger vos batteries. Les chefs de la maison, deux athlètes de corps et d'esprit, vous préparent des menus en fonction de vos randonnées. De plus, l'aubergiste vous invite à ranger vos vélos pour la nuit dans sa cave à vin où d'autres trésors sont bien protégés.
Les choix de Gervais
Quand on a les moyens de s'offrir la meilleure monture, on souhaite également bénéficier des meilleurs accessoires pour vivre à fond de train sa fièvre pour le vélo de route. Depuis qu'il a mis fin à sa carrière d'athlète en 1990 pour fonder sa boutique Cycles Gervais Rioux, l'ancien triple champion canadien veille justement à ce que ses clients enfilent le nec plus ultra en matière d'équipement. Voici ses choix.
Le look Assos
Quand on parle de la crème des vêtements de vélo sur route, le nom d'Assos éclipse tous ses concurrents. Pour un duo tout étoile, optez d'abord pour le nouveau cuissard Campionissimo_S7 (539 $) avec bretelle et ergocompression. Le manufacturier suisse compare sa nouveauté à rien de moins qu'un jet supersonique par rapport au cuissard traditionnel. Afin d'habiller le haut, le maillot SSCento (269 $) est composé de matières synthétiques qui vous gardent au frais. On aime aussi sa fermeture éclair de haut en bas. Et tant qu'à enfiler du Assos, ajoutez les lunettes du fabricant à votre liste (480 $). Les verres, traités par Carl Zeiss, monsieur optique lui-même, offrent un champ de vision exceptionnel.
Bilan complet : Garmin Edge 810
En plus d'afficher vos parcours, cet ordinateur GPS à peine plus gros qu'un carton d'allumettes, permet de suivre votre vitesse, votre cadence, la distance, l'altitude ainsi que l'élévation parcourue. Compatible avec le Shimano Di2, l'appareil de 670 $ affiche également la puissance générée par vos coups de pédales, en autant d'avoir l'outil de mesure, un autre gadget, vendu à partir de 1 000 $.
Léger de la tête... aux pieds
Difficile de trouver plus léger que les chaussures italiennes Sidi Wire Carbon. Dotées de cuir synthétique et d'une semelle en carbone, ces chaussures de 599 $ la paire disposent d'un talon ajustable et d'un système de serrage arrière. Elles sont compatibles avec la plupart des pédales. Pour la tête, le casque Rudy Project Windmax propose à la fois légèreté (220 gr), protection, confort ainsi qu'une ventilation appréciée lors des ascensions.
À lire aussi:
À la mode de chez nous
Le styliste personnel, indispensable pour une garde-robe bien garnie
Les joailliers québécois, entre tradition et modernité
«Nous avons un grand capital de créativité» - Lili Fortin, Tristan