José Boisjoli, pdg de BRP, était le conférencier du Rendez-vous financier Les Affaires, tenu le 18 septembre à Montréal. Il a répondu aux questions de notre journaliste Marie-Claude Morin.
Les Affaires - Lors de la publication de vos derniers résultats trimestriels (le 12 septembre), les marges bénéficiaires ont soulevé de l'inquiétude. Pourtant, vous dites avoir confiance d'atteindre votre objectif de l'année. Expliquez-nous.
José Boisjoli - Nous avions déjà anticipé une première moitié d'année plus difficile que la deuxième. Nous avons été, de plus, frappés par quelques éléments qui ne se répéteront pas.
D'abord, le taux de change, plus élevé que prévu. Maintenant, nous planifions en fonction du taux actuel pour les prochains mois. Ensuite, comme les ventes de produits hors route (VTT et côte à côte) avaient beaucoup baissé en avril et mai, nous avons mis en place des programmes de vente un peu plus généreux. À l'été, les ventes ont augmenté de 19 %, ce qui a fait en sorte que les coûts de ces programmes ont été plus élevés que ce qui était attendu. Le bon côté, c'est que les stocks sont très très bas chez les concessionnaires et qu'il faut remplir le réseau à l'automne.L.A. - Polaris, un de vos principaux concurrents, affiche des marges supérieures aux vôtres. Est-ce un objectif d'atteindre ces niveaux ?
J.B. - Tout à fait ! Le conseil me le rappelle tous les trimestres. (Rires) La différence marquée est que nous sommes à une différente phase de vie d'entreprise. Polaris réalise 70 % de son chiffre d'affaires dans les véhicules VTT et côte à côte. Ce sont des créneaux qui ont énormément évolué ces dernières années. De plus, comme elle est concentrée, Polaris profite d'économies d'échelle.
Chez BRP, nous sommes plutôt dans une phase de diversification. Et nous investissons encore beaucoup au Mexique. Nos marges se sont améliorées ces dernières années, elles seront à peu près stables cette année et la suivante, puis elles augmenteront durant l'exercice financier 2017.
L.A. - Pourriez-vous adopter la même stratégie que Polaris et vous concentrer sur certains produits ?
J.B. - Avoir des produits dans toutes les gammes nous permet de faire une offre intéressante à nos concessionnaires. Se reconcentrer serait donc difficile. En fait, revenir en arrière n'est pas une option. Par contre, nous ne voulons pas, du moins à moyen terme [2 ou 3 ans], lancer d'autres types de produits. Nous pouvons encore grandir dans ce que nous faisons actuellement.
L.A. - Vous lancez de plus en plus de véhicules milieu de gamme, alors que vous vous targuiez d'être dans le haut de gamme. Pourquoi et de quelle façon comptez-vous percer ce marché ?
J.B. - Nous avons de très bonnes parts de marché dans le haut de gamme, soit environ le tiers du marché. Ce qui est bien, étant donné qu'il y a quand même sept concurrents. Nous pouvons toujours en gagner, mais c'est plus difficile. La prochaine étape est donc d'attaquer le milieu et le bas de gamme, qui représentent 50 % du marché total, mais dans lesquels nous avons moins de 5 % de parts de marché. Les marges y sont un peu plus basses, mais c'est quand même une occasion de croissance pour nous.L.A. - Est-ce le même raisonnement avec la nouvelle motomarine SPARK, moins chère que vos autres modèles ?
J.B. - C'est un peu différent. Il y a moins de constructeurs - nous sommes trois, dont l'un est devenu très petit. Ce que nous avions noté au cours des dernières années, c'est que, pour chaque achat de motomarine neuve, il y en avait quatre d'occasion. C'est énorme ! Beaucoup de clients souhaitaient acheter une motomarine, mais ils trouvaient ça trop cher. Nous sommes donc arrivés avec un produit qui attaque le marché des véhicules usagés. Et ça fonctionne très bien.
L.A. - Vous présentez ces jours-ci un nouveau modèle de Spyder, un produit qui a franchi le cap des 300 M$ de ventes annuelles. Quelle place peut occuper le Spyder dans l'ensemble de BRP ?
J.B. - Nous pensons que ça peut devenir très important. Nos ventes nord-américaines pourraient augmenter de six ou sept fois si nous avions dans le reste de l'Amérique du Nord la même pénétration par personne qu'au Québec. Nous sommes très heureux de nos ventes de Spyder, mais en même temps, nous sommes frustrés, parce que ça prend plus de temps que nous ne le pensions. Mais nous mettons beaucoup d'efforts à faire connaître le produit. Et nous croyons que le nouveau modèle plaira à une plus large clientèle, surtout aux États-Unis.
L.A. - Vous avez mentionné que BRP générera suffisamment de liquidités pour envisager des acquisitions. À quel point est-ce dans vos plans ?
J.B. - Ce n'y est pas à moyen terme. Nous sommes capables de réaliser une bonne croissance dans les prochaines années juste en exécutant ce que nous avons déjà planifié. À plus long terme, c'est une chose que nous aurions effectivement la capacité de faire. Mais de quelle façon exactement ? Ce n'est pas clair encore. Nous sommes dans un créneau récréatif... Voudrions-nous aller dans un créneau plus utilitaire, qui nous permettrait d'être un peu moins cycliques ? C'est une option. Il y a aussi d'autres domaines dans le créneau récréatif où nous ne sommes pas encore. Ce sont des discussions que nous avons présentement avec le conseil d'administration. La beauté de notre situation est que nous ne sommes pas dans l'urgence. Nous avons quelques années devant nous pour organiser tout ça.