L'industrie du gaz de schiste appelle à la rescousse l'ancien premier ministre péquiste Lucien Bouchard, quelques jours après que le gouvernement ait changé radicalement de ton dans ce dossier, n'excluant plus l'éventualité d'un moratoire.
L'Association pétrolière et gazière du Québec (APGQ) a annoncé mardi la nomination de M. Bouchard au poste de président de son conseil d'administration, en remplacement d'André Caillé.
Souffrant de surmenage, M. Caillé, ex-pdg d'Hydro-Québec, avait cessé temporairement ses activités, en octobre dernier, à la suite d'une tournée d'assemblées publiques d'information visant à démythifier l'exploitation des gaz de schiste.
Juste avant, M. Caillé s'était montré insatisfait des résultats de cette démarche, qui avait notamment mis en lumière les inquiétudes des citoyens et groupes environnementaux.
Dans un communiqué, l'APGQ a indiqué que M. Bouchard entrera en fonction le 21 février prochain et succédera à M. Caillé, "dont le mandat était arrivé à terme".
"Conscient qu'il reste du travail à faire, je suis heureux qu'un homme de la trempe de Lucien Bouchard ait accepté de prendre ma relève. Je suis convaincu qu'il sera en mesure de rallier les Québécoises et les Québécois autour de ce projet créateur de richesses", a déclaré dans le communiqué M. Caillé.
La semaine dernière, le ministre du Développement durable, Pierre Arcand, a jugé que l'industrie ne contrôlait plus la situation, en raison notamment d'un problème prolongé de fuite dans un puits d'exploration.
M. Arcand a affirmé qu'il y aura de l'exploration et de l'exploitation des gaz de schiste à la condition que cela soit fait correctement.
Dans un communiqué diffusé par l'APGQ, M. Bouchard a déclaré qu'il voit la découverte au Québec de volumes importants de gaz naturel comme "un atout très important" pour le développement économique et le financement des missions de l'État.
"Je suis tout à fait conscient de la nécessité de procéder à ce développement dans le plein respect d'exigences exemplaires du point de vue de l'environnement, de la sécurité publique, de la transparence et de l'acceptabilité sociale, a-t-il dit. S'impose également la nécessité de faire de ce développement une contribution réelle à l'enrichissement public et non pas seulement privé."
Premier ministre du Québec de 1996 à 2001, M. Bouchard a également été ministre fédéral de l'Environnement.
Son arrivée à la tête du lobby de l'industrie gazière va assainir le débat, pense la ministre des Ressources naturelles, Nathalie Normandeau.
En vacances en Floride, Mme Normandeau a tenu à réagir à la nomination de l'ex-premier ministre péquiste, la qualifiant "d'agréable surprise".
"C'est un homme qui a toujours été reconnu pour ses qualités de leader, de rassembleur, il est extrêmement rigoureux. On pense que ça va contribuer à améliorer le débat pour les étapes à venir", a dit la ministre en entrevue téléphonique.
Selon elle, le recrutement de M. Bouchard envoie aussi un signal fort de la part d'une industrie qui cherche à se refaire une image.
"C'est clair que l'association a senti le besoin, en nommant M. Bouchard, de travailler à développer des modèles d'affaires avec les communautés et qu'il y ait une plus grande communication entre les entreprises et les citoyens. Et M. Bouchard a cette capacité de faire atterrir ça", a-t-elle dit.
Le gouvernement Charest a haussé le ton la semaine dernière envers les promoteurs du gaz de schiste, les enjoignant de faire preuve de plus de rigueur, en raison notamment d'un cas de fuite dans un puits d'exploration.
Québec ne fera aucun compromis sur la sécurité de la population, a répété mardi la ministre des Ressources naturelles.
"On a toujours dit que cette filière ne se développera pas à n'importe quel prix et que si l'industrie gazière ne se conforme pas aux lois et règlements et qu'elle refuse de se conformer aux standards, c'est évident qu'elle sera invitée à investir ailleurs qu'au Québec", a-t-elle dit.
En faveur de l'exploitation des gaz de schiste, Gérard Deltell a applaudi l'entrée en scène de M. Bouchard.
M. Bouchard est un "homme de réalisation, de leadership, de conviction et qui a la confiance des Québécois, contrairement à Jean Charest qui n'a rien de tout ça", a lancé le chef de l'Action démocratique, en point de presse, au terme du caucus de son parti à Québec.
Avec son charisme et le respect qu'il inspire, l'ancien premier ministre est l'homme qu'il faut pour faire tourner le vent en faveur des gaz de schiste, croit M. Deltell.
"C'est bon signe pour le Québec parce qu'on a besoin de cette industrie, on a besoin des retombées économiques, on a besoin de développer cette industrie pour nos finances publiques mais également pour notre industrie en général", a-t-il fait valoir.