Faire pousser les immeubles au centre-ville et amener tous les travailleurs au même endroit ? Très peu pour Québec. Les acteurs du développement immobilier de la capitale veulent plutôt continuer à bâtir une ville qui aura des pôles d'affaires multiples, quitte à voir pousser des tours aux quatre coins du territoire.
«On a cherché des exemples de villes aussi multipolaires dans le monde et on n'en a pas trouvé, admet le directeur régional de l'Institut de développement urbain (IDU) Québec, Stéphane Dion. Mais il y a des aspects positifs à ça, notamment dans la gestion des déplacements, car ça favorise la mobilité.»
Le 10 mars, les promoteurs immobiliers de la région se réuniront à l'Université Laval, à l'initiative du Conseil régional de Québec de l'IDU Québec, pour définir sa vision 2050 d'une ville efficiente, dans une perspective de développement durable et intelligent.
Sept chantiers
Sept comités ont été formés l'automne dernier pour définir une vision de développement selon sept chantiers, notamment les pôles d'activité économique, le développement résidentiel durable, le développement industriel et technologique, les transports et le patrimoine.
Les présidents de chacun des comités, qui travaillent de concert depuis quelques mois, communiqueront l'ébauche d'une vision d'ensemble à l'occasion du colloque du 10 mars. Ils veulent ainsi amorcer la discussion avec les maires et les Chambres de commerce de Québec et de Lévis, ainsi qu'avec les citoyens et les organisations intéressés. Près de 300 personnes sont attendues.
«On a décidé de se projeter plus loin, parce qu'on souhaite avoir une influence sur le développement futur, explique Nathalie Roussin, d'Immeubles Roussin, présidente du Chantier pôles d'activité économique. Mais c'est un exercice difficile, parce que beaucoup d'éléments influenceront le développement, notamment le climat économique et l'immigration. La démographie est un facteur de grande incertitude sur une aussi longue période.»
Les acteurs de l'immobilier aiment voir loin et doivent le faire, car la réalisation de projets d'envergure prend du temps et il faut choisir les bons endroits pour les démarrer.
Grâce au nouveau projet Le Phare, une tour de 65 étages située à l'entrée des ponts, l'aspect multipolaire de la ville se cristallise, car Lebourgneuf est aussi en expansion, D'Estimauville est à redévelopper et Lévis veut aussi sa part. Toutefois, l'IDU promet que le centre-ville de Québec restera là où il se trouve, dans Saint-Roch et aux abords de l'hôtel du Parlement de Québec.
Des pôles spécialisés et distinctifs
«Autrement, il n'y aura pas nécessairement un pôle dominant, car on souhaite un équilibre entre les pôles, mais on veut les spécialiser, donner à chacun un caractère distinctif», précise Stéphane Dion.
L'aspect qui préoccupe le plus le comité sur les pôles d'activité économique est celui du commerce de détail, en pleine mutation, et de ses impacts sur l'immobilier.
«À cause de la hausse des achats en ligne, nous nous attendons à une reconfiguration importante des espaces commerciaux. Les détaillants auront tendance à rapetisser leurs succursales, à avoir des entrepôts plus grands pour servir la clientèle Web, et on pense que les magasins de l'avenir devront prévoir des lieux pour que le client ramasse les achats faits en ligne», dit M. Dion, qui croit que des pick-up stores remplaceront la livraison à domicile des achats en ligne, celle-ci étant trop coûteuse pour les détaillants.
Redéfinir des parcs industriels
En matière de développement technologique et industriel, les défis sont de taille. La ville a pris de l'expansion avec les ans, et les industries lourdes ou les usines dont les activités comportent des irritants pour les citoyens sont aujourd'hui ceinturées d'habitations.
«Quand on veut développer une ville, on souhaite que ces activités se déroulent en périphérie de l'activité urbaine, donc il est possible de penser à requalifier des parcs industriels», entrevoit M. Dion, pour qui le Parc technologique métropolitain est un exemple à suivre grâce à ses espaces verts et sa discrétion dans le tissu urbain.
«En 2050, il ne sera plus seul, il aura des cousins», dit-il.
Les développeurs immobiliers espèrent que l'idée d'inclure les citoyens à la réflexion Québec 2050 aidera à favoriser l'acceptabilité sociale des projets.
«Pour ceux qui ont quelque chose à dire, c'est maintenant l'occasion de participer !» affirme Mme Roussin.
16 %: La population de la Capitale- Nationale passerait à 824 300 habitants en 2036, soit une croissance de 16 % en 25 ans (à partir de 2011). La part des 65 ans et plus atteindrait 28 % en 2036. Source : Institut de la statistique du Québec
1,1: Valeur des investissements, en milliards de dollars, dans le secteur non résidentiel de la région métropolitaine de Québec en 2014. Source : Québec International