Quand David Owen passe devant une usine abandonnée, il ne voit pas un bâtiment en piètre état, mais une occasion de s'enrichir.
Le président de Mondev a saisi l'occasion plus d'une fois. Environ 90 % de ses projets sont érigés dans des espaces industriels abandonnés. En février, il a racheté une partie du terrain de l'ancien concessionnaire GM Clermont, au coin des rues Saint-Denis et Saint-Grégoire, pour 3,5 millions de dollars (M$).
Il y érige 122 unités, un projet de 100 M$. " Ces terrains nous intéressent, car les espaces vacants bien situés à Montréal se font rares ", explique-t-il. Mondev négocie en ce moment pour acheter aussi la partie sud du terrain du concessionnaire.
Situés dans les quartiers à proximité du centre-ville, comme Hochelaga-Maisonneuve, le Centre-Sud ou Rosemont, plusieurs anciens espaces industriels et commerciaux suscitent la convoitise des aspirants propriétaires. "
Ces quartiers, qui avaient autrefois mauvaise presse, sont convoités par les jeunes professionnels qui veulent habiter près de leur milieu de travail et des attraits culturels ", constate Richard Shearmur, professeur en économie urbaine et régionale à l'Institut national de la recherche scientifique (INRS).
La proximité du centre-ville et des transports en commun facilite la reconversion du parc immobilier. Par exemple, l'arrivée du métro a mené la Ville de Laval à démolir une ancienne cour à bois près des stations De La Concorde et Cartier.Le promoteur Samcon a saisi l'occasion au bond. Son projet en construction de 66 unités, " Le Cartier Concorde ", sera prêt en mars 2011.
" Ce site n'était plus fonctionnel, car les camions avaient de la difficulté à circuler dans les rues résidentielles à proximité de la cour à bois, dit Paul Martin, vice-président, ventes et marketing, de Samcon. La Ville a donc accordé une subvention à l'entreprise pour qu'elle déménage. Elle a aussi offert un congé fiscal aux nouveaux propriétaires pour encourager la construction de copropriétés. "
Recyclage
D'autres bâtiments valent plus cher sur pied que démolis. Il y a de plus en plus d'amateurs pour l'esthétisme d'un ancien immeuble industriel transformé en habitations, dit Renaud Paradis, gestionnaire de projet au Groupe Cardinal Hardy. " Dans ce type de bâtiments, les plafonds sont souvent plus hauts, une particularité qui plaît aux propriétaires, dit-il. Ils ont l'impression d'avoir plus d'espace. Certains peuvent même se construire une mezzanine. "
M. Paradis gère la construction d'Espace MV, à Dorval. Le projet, qui en est à sa deuxième phase, a permis la transformation de l'ancien siège social de Novartis. Sous une grande rotonde, la cafétéria a été transformée en espace communautaire. On y trouve un point d'eau et une murale du peintre Jean-Paul Mousseau et du céramiste Claude Vermette. L'union des premières lettres du patronyme des deux artistes a donné le " MV " d'Espace MV.
Autre attrait des anciens espaces industriels : les bâtiments qui s'y trouvent sont plus faciles à démolir ou à transformer que ne peuvent l'être les églises, qui se cherchent, elles aussi, une deuxième vocation. " Il y a tellement de mauvaises surprises qui peuvent survenir lorsqu'on transforme une église, prévient Gilles Ouellet, spécialiste en marketing immobilier. On ne peut pas le faire sans payer un prix de fou. "
Même si les chantiers se multiplient, l'industrie ne craint pas de pénurie d'anciens terrains à mettre en valeur. " Il reste encore beaucoup de friches industrielles et de zones commerciales qui peuvent être converties ", croit Pierre Laliberté, directeur, division terrain, patrimoine et développement urbain, au Groupe Altus.
Les occasions dans certains quartiers se font toutefois plus rares, selon M. Ouellet. Les espaces à transformer sont presque inexistants au centre-ville. Dans le Plateau Mont-Royal, il devient difficile de lancer des projets rentables en raison du coût élevé des terrains. Même Hochelaga commencerait à montrer des signes d'essoufflement. " L'intérêt se porte surd'autres quartiers, explique M. Ouellet. Les promoteurs s'intéressent de plus en plus à l'ouest de la rue Jean-Talon. "