L'agence immobilière Immodev est convaincue que le Québec mérite sa propre enseigne en immobilier commercial. Et elle compte remplir ce rôle dès maintenant.
À la fin d'octobre, l'agence Immodev, dont le siège social est situé à Boisbriand, a annoncé la nomination de Stephen Léopold au poste de président du conseil. Cet entrepreneur réputé dans l'immobilier depuis 40 ans a été embauché pour concrétiser les visées de l'entreprise.
«Avoir un bureau traditionnel au centre-ville de Montréal pour servir Boucherville, Mascouche ou Sherbrooke n'a pas de sens. Certes, les courtiers ont accès à des statistiques sur la disponibilité dans les marchés de banlieue, les marchés régionaux. Toutefois, ils ne peuvent pas donner aux clients des informations d'initiés. Quelle entreprise, par exemple, a l'intention de déménager dans un an ? Pour cela, il faut être présent physiquement dans le marché qu'on sert. Même les quartiers de Montréal, tels le Plateau, Griffintown, le Mile-Ex, ont besoin de courtiers sur place pour être mieux servis», estime Stephen Léopold.
Fondée en 1996 par Marc Vadeboncoeur, l'agence Immodev compte aujourd'hui une douzaine de courtiers immobiliers commerciaux. M. Léopold souhaite doubler ce nombre au cours des deux prochaines années. L'agence dit avoir déjà reçu des appels d'au moins une dizaine de courtiers immobiliers commerciaux en banlieue et en région, affiliés à de grandes agences résidentielles, qui désirent se joindre à l'équipe. «Ces courtiers, dit l'homme d'affaires, souhaitent faire partie d'un groupe qui pense et qui agit exclusivement en fonction du marché commercial et industriel de l'immobilier. Ce dont le marché de la province du Québec a besoin.»
L'Organisme d'autoréglementation du courtage immobilier du Québec (OACIQ) salue l'initiative d'Immodev. «On préfère voir ce type de développement immobilier commercial se mettre en place que de voir des entreprises de la province faire affaire avec des pseudo-conseillers immobiliers qui sont actuellement poursuivis par l'OACIQ en matière de courtage illégal», indique Robert Nadeau, président et chef de direction de l'OACIQ.
La naissance, poursuit-il, de cette enseigne commerciale québécoise partout en province constitue aussi une innovation. «Stephen Léopold n'en est d'ailleurs pas à sa première révolution dans le marché immobilier», rappelle M. Nadeau.
En effet, décrit comme une légende de l'industrie immobilière, Stephen Léopold a agi à titre de conseiller principal dans de nombreuses transactions immobilières, totalisant quelque 20 milliards de dollars en Amérique du Nord. «C'est lui qui avait introduit dans le marché la formule des courtiers représentant les intérêts des locataires», fait savoir Jacques Métivier, président du CA de l'Institut de développement urbain du Québec. M. Léopold a également contribué à l'aménagement de l'immense foire alimentaire de l'ex-World Trade Center.
Mieux servir les marchés locaux
Le volonté d'être présent plus localement se fait déjà sentir dans le milieu. Royal LePage, qui a vendu sa division immobilière commerciale à Cushman & Wakefield en 2005, en a mis une autre sur pied il y a deux ans. Royal LePage veut être plus présente dans les marchés commerciaux régionaux d'un océan à l'autre au pays.
Quelques coups de fil auprès d'agences immobilières commerciales régionales démontrent que l'immobilier commercial est avant tout une affaire de courtiers immobiliers locaux. «La clientèle de ce marché est très loyale auprès des gens qu'elle connaît. Les meilleures transactions s'effectuent généralement par des courtiers immobiliers qui maîtrisent très bien le marché local», indique Louis McCaffrey, qui exploite une agence immobilière commerciale à Longueuil depuis plus de 30 ans.
Il faut savoir que le travail d'un courtier immobilier commercial en est un de longue haleine. Les transactions peuvent s'échelonner sur six mois, un an, voire deux ans avant d'être officialisées.
Est-ce que l'arrivée d'Immodev changera quelque chose dans le marché ? «Depuis trois ans, le marché du courtage immobilier fait l'objet d'un jeu de chaises musicales. En quête de meilleures conditions de travail, de meilleurs outils de marketing, les courtiers changent d'enseignes pour faciliter leurs mandats. Le problème, c'est que le marché immobilier est dans le coma au Québec. De Saint-Jérôme à Boucherville, il fait la même température, on subit tous la même économie», soutient M. McCaffrey.
Expansion malgré la morosité
Stephen Léopold reste conscient que le marché immobilier a déjà connu de meilleurs moments. Mais il soutient qu'Immodev vient d'enregistrer une année record en profits, ce qui motive l'expansion de l'agence sur le territoire québécois. «Nos courtiers seront non seulement mieux informés, mieux outillés, mais ils vont recevoir une tarification similaire à celle que reçoivent les courtiers résidentiels», soutient M. Léopold. Les courtiers, explique-t-il, toucheront ainsi une plus grande part de leur commission au lieu d'en verser la moitié aux grandes agences internationales qui doivent assumer des frais de bureaux et de personnel au centre-ville de Montréal.
«En fait, assure Stephen Léopold, oui, le succès du modèle de l'approche locale a été maintes fois démontré et prouvé depuis les dernières années dans l'immobilier. Mais notre formule va améliorer les choses.»
900: Le Québec compte actuellement 900 courtiers immobiliers commerciaux répartis dans 280 agences immobilières de courtage immobilier commercial. Source : Organisme d’autoréglementation du courtage immobilier du Québec