Trop imposés. Mal taxés… S’il y a un élément que les gens d’affaires estiment urgent de corriger pour accroître la compétitivité de Montréal sur la scène internationale, c’est bien celui de la fiscalité.
La quasi-totalité des dirigeants d’entreprise qui prenaient la parole au Palais de congrès de Montréal vendredi dernier ont identifié le niveau d’imposition et de taxation élevé du Québec comme le principal obstacle à la prospérité de la métropole et de ses entreprises.
L’événement était organisé par la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM) autour du thème de la présence décroissante du nombre de sièges sociaux d’entreprises à Montréal.
Exode des sièges sociaux
Entre 1990 et 2010, Montréal a vu le nombre de sièges sociaux de grandes entreprises canadiennes (Top 500 du Financial Post) diminuer de 15,6%, passant de 96 à 81. Pendant cette même période, Calgary a vu elle la présence de ses sièges sociaux grimper de 70,5%, passant de 44 en 1990 à 75 en 2010.
Sans attribuer l’ensemble de ces déménagements de sièges sociaux de grandes entreprises à la seule question fiscale, Robert Gagné, directeur du Centre sur la productivité et la prospérité de HEC Montréal, estime que notre régime fiscal n’a certainement rien fait pour l’en empêcher.
«Les facteurs fiscaux sont simplement pas favorables à l’implantation d’entreprises ici», résume-t-il.
Taxe sur la masse salariale montrée du doigt
Selon ses calculs, le poids de la fiscalité sur les entreprises au Québec est de 25% supérieur à la moyenne canadienne et atteindrait parfois le double de ce qu’une entreprise doit supporter au même chapitre dans certains États américains.
La taxe sur la masse salariale était particulièrement visée par les représentants d’entreprise invités par la Chambre de commerce. En 2008, cette taxe représentait 1,1% de la production brute des entreprises au Québec, comparativement à seulement 0,5% en Ontario et au Manitoba, et 0,2% à Terre-Neuve. Ailleurs, cette taxe n’existe tout simplement pas.
«Le problème avec cette taxe, estime M. Gagné, est que contrairement à d’autres (comme l'impôt sur les bénéfices) qui taxent le succès, cette taxe est payable que l’entreprise fasse un bénéfice ou non.»
Au total, le Centre sur la productivité et la prospérité de HEC évalue qu'en prenant en compte l'ensemble des taxes impôts et cotisations sociales auquel les entreprises sont exposées, les coûts fiscaux totaux des entreprises s’élèvent à 5,1% de la valeur de la production totale des entreprises au Québec, comparativement à 4,0% en Ontario, et 3,9% en Alberta.
Robin des bois
Par contre, une fois ces impôts redistribués sous forme de subventions ou autres aides de l’État, M. Gagné constate que le poids de la fiscalité sur les entreprises du Québec demeure globalement supérieur au reste du pays, mais que l’écart entre provinces diminue énormément. Les coûts fiscaux net des entreprises du Québec s’élève à 3,6% de la valeur net de production brute, comparativement à 3,5% en Ontario et en Alberta.
«Le gouvernement du Québec est effectivement celui qui taxe le plus en Amérique du Nord, dit-il. Mais il est aussi celui qui distribue le plus de subventions aux entreprises. Le problème, est que cette redistribution ne favorise que 5% à 10% des entreprises.»
À son avis, cette stratégie qu'il compare à la philosophie de Robin des Bois, qui prend aux riches pour redistribuer ensuite, s'est avérée inefficace et mériterait d’être questionnée. «Cette stratégie n’est pas payante à long terme. Surtaxer un grand nombre d'entreprises pour en favoriser un petit groupe qu l'on veut attirer n'est pas une bonne stratégie.»
Ce dernier estime que ce régime fiscal n'a pas fait la preuve de sa supériorité sur celui des autres provinces et qu'une réflexion sérieuse s'impose. Faire l'économie d'une telle réflexion, croit-il, équivaudrait à «se tirer un peu dans le pied».
Les modalités d'une éventuelles refonte de système resteraient à préciser. Mais dans l'ensemble, résume-t-il, le Québec devrait cesser de lourdement favoriser un petit nombre d'entreprise en surtaxant la majorité».