Quatre Canadiens sur cinq auront suffisamment de revenus ou d'actifs pour subvenir à leurs besoins lors de la retraite. Aussi, contrairement au comité D'Amours sur les régimes de retraite, l'économiste Henri-Paul Rousseau, vice-président du conseil d'administration de Power Corporation, plaide pour des mesures ciblées plutôt que sur une hausse universelle des contributions qui pénaliserait la majorité.
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«Augmenter les prestations du Régime des rentes du Québec n'est pas une mauvaise recommandation en soi, mais on a besoin que 15 à 20 % de la population épargne davantage. Alors, va-t-on forcer 100 % de la population à hausser ses contributions ?» a demandé M. Rousseau, en marge du colloque sur les retraites et placements organisé par le Cercle finance du Québec et CFA Québec, le 20 novembre à Québec.
Si des mesures sont nécessaires pour renflouer plusieurs régimes de retraite à prestations déterminées, il y a une fausse perception de crise généralisée des régimes de retraite, selon diverses études, dont celle de Mackenzie, qui a été dévoilée dans le cadre du colloque.
Environ 80 % des Canadiens seront en mesure de maintenir leur niveau de vie à la retraite, car ils sont assis sur sept trilliards d'actifs, ce qui représente quatre fois le PIB du pays. Mais beaucoup d'études ne tiennent pas compte de la richesse globale et s'attardent seulement à l'épargne enregistrée, qui représente le tiers des actifs.
«Si on regarde les études englobantes, ça change la perspective», précise l'économiste Rousseau. Il souligne la possibilité de convertir ses actifs en revenus en vendant ses propriétés le temps venu.
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Les personnes à risque se retrouvent moins chez les pauvres que dans la classe moyenne. Avec la pension de la Sécurité de la vieillesse, le supplément de revenu garanti et la Régie des rentes du Québec, les moins bien nantis parviendront à maintenir leur niveau de vie à la retraite. Sauf les personnes seules, en majorité des femmes.
«C'est le problème principal et, pour le régler, il faut modifier le supplément de revenu garanti», plaide l'économiste.
Les 20 % de Québécois à risque de perdre leur pouvoir d'achat à la retraite gagnent 50 000 $ et plus par année, n'ont pas accès à un régime de retraite chez l'employeur et n'épargnent pas suffisamment. Le Régime volontaire d'épargne-retraite récemment mis en place est une bonne mesure pour ces personnes, estime M. Rousseau.
Plutôt que de faire payer la population entière pour ce problème ciblé, l'économiste souhaite que le gouvernement s'attaque à un problème plus criant : le financement de la santé, dont les coûts annuels atteignent aujourd'hui 40 % du PIB.
«C'est ça qui est préoccupant, et il faut se laisser de l'espace fiscal pour y faire face», a précisé M. Rousseau en entrevue.
L'économiste Pierre Fortin, professeur émérite à l'UQAM, qui participait aussi au colloque, a abondé dans le même sens : la priorité devrait être de réformer en profondeur le système de santé «qui écrase de plus en plus les autres missions de l'État».