Le temps était frais, les prévisions météo changeantes, et le ciel couvert de nuages ne laissait rien présager de bon. C'est pourtant ce jour-là, le lundi 16 septembre, que Bombardier a procédé au vol inaugural du premier appareil de sa nouvelle famille d'avions CSeries, certainement l'un des événements marquants de 2013.
«La dernière chose que nous voulions était de devoir reporter l'événement de nouveau», se remémore Marc Duchesne, d'ordinaire directeur des communications de Bombardier, à qui incombait la responsabilité d'orchestrer les activités entourant ce premier vol. Celui-ci avait déjà été reporté à trois reprises pour des raisons techniques depuis novembre 2012.
Mais comme par magie, à environ 90 minutes de l'envol prévu, le plafond nuageux s'est dissipé, permettant au plus grand aéronef conçu jusque-là par Bombardier de s'élancer dans les airs, sous l'oeil et les applaudissements nourris de milliers de spectateurs, réunis pour l'occasion sur le tarmac de l'aéroport de Mirabel. De jamais vu au Québec.
L'avionneur québécois avait déjà procédé au lancement de plusieurs nouveaux modèles d'avion par le passé. Mais jamais auparavant ne l'avait-il fait avec autant d'éloquence, et de manière aussi publique, dans la pure tradition des lancements de gros porteurs perpétuée depuis des décennies par Boeing et Airbus.
L'idée remonte à juin 2013, à la veille du Salon aéronautique du Bourget, en France. Airbus procédait alors au premier vol de son nouvel A-350. Réunis devant l'écran, les membres de l'équipe montréalaise de Bombardier se sont regardés... et se sont mis à rêver. «Il fallait faire la même chose, et en mieux, explique Marc Duchesne, 41 ans. C'est devenu notre baseline, notre étalon.»
Rapidement, Bombardier décide de faire de ce premier vol un événement d'envergure, auquel pourraient prendre part ou assister les employés, les clients, les actionnaires, où qu'ils soient sur la planète.
Bombardier ne lésine pas sur les moyens : plus de quarante autobus sont loués pour transporter à Mirabel les quelque 2 300 travailleurs des installations de Saint-Laurent et de Dorval affectés au programme de développement de l'avion CSeries.
Déjà présents dans Charlevoix à l'invitation de Bombardier, des clients tels Lufthansa, Air Baltic et Porter Airlines sont amenés à Mirabel, où les attendent déjà les employés, des dirigeants et près de 125 journalistes.
Mais ce n'est pas tout. Au lieu de laisser les journalistes et les dizaines de vidéastes amateurs diffuser seuls les images de l'événement, Bombardier décide de produire sa propre émission de télévision. «À l'ère des médias sociaux, c'était la seule manière de garder une emprise sur l'événement, le contenu et la qualité de la diffusion», explique M. Duchesne.
Des renforts
C'est ainsi que Blue Storm Media, une boîte de production montréalaise, est appelée en renfort et qu'un véritable plateau de télévision, équipé de 15 caméras, prend forme aux abords de la piste de décollage. Deux professionnels sont recrutés pour assister la vice-présidente aux communications, Hélène Gagnon, à l'animation, pendant toute la durée du vol.
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Des renforts
C'est ainsi que Blue Storm Media, une boîte de production montréalaise, est appelée en renfort et qu'un véritable plateau de télévision, équipé de 15 caméras, prend forme aux abords de la piste de décollage. Deux professionnels sont recrutés pour assister la vice-présidente aux communications, Hélène Gagnon, à l'animation, pendant toute la durée du vol.
Résultat : l'émission est diffusée sur place de même qu'en direct sur 40 lieux de diffusion répartis dans ses usines du Canada, des États-Unis et d'Irlande du Nord, ainsi qu'au Mexique, au Maroc, en Inde et en Chine.
Simultanément, l'émission a été diffusée en deux langues sur le site de Bombardier, pendant un peu plus de deux heures, attirant 40 000 visiteurs uniques et plus de 23 000 autres en différé.
«Notre niveau d'adrénaline et d'excitation a atteint son sommet à plusieurs reprises, se souvient Marc Duchesne, à la tête pour l'occasion d'une équipe de 30 professionnels. Mais ça en aura valu la peine», estime-t-il, convaincu que l'opération a relevé à jamais les standards de diffusion et de rayonnement des vols inauguraux dans l'industrie de l'aéronautique.
Reste maintenant à Bombardier à accumuler davantage de commandes pour démarrer la production de sa nouvelle famille d'appareils, développés au coût de 3,9 milliards de dollars américains et censés offrir des économies de 15 % sur les coûts de fonctionnement et de 20 % sur le carburant.