Fondé par trois anciens d'Ubisoft, le studio montréalais de jeux vidéo Red Barrels mise sur l'horreur pour se faire un nom, et la stratégie rapporte, confie l'un des cofondateurs de l'entreprise, Philippe Morin.
Selon le dirigeant, Outlast, premier jeu du studio, a été téléchargé environ 2,5 millions de fois depuis sa sortie en septembre 2013 sur PC. Il a aussi été lancé respectivement sur PS4 et Xbox One en mai et en juin dernier.
«Le jeu a coûté 1,4 million de dollars à produire et a déjà rapporté des revenus de 11 M$», dit-il, en précisant que Red Barrels a profité d'un «vide» laissé par les grands studios.
M. Morin soutient que les cofondateurs du studio avaient une bonne expérience dans les jeux de type action-aventure pour joueurs solos. «Au départ, on voulait continuer de faire ce qu'on aimait, tout en tablant sur notre expertise. Nous voulions également travailler avec une petite équipe et que nos projets soient rentables», dit celui qui a fondé Red Barrels en compagnie de David Châteauneuf et Hugo Dallaire.
À ce moment, l'idée de concevoir un jeu d'horreur a émergé. «C'était un nouveau défi qui nous permettait de récupérer l'expérience acquise au fil des ans. De plus, en faisant une analyse de marché au début de 2011, nous nous sommes aperçus qu'au cours des six mois précédents, un seul jeu d'horreur avait été lancé, et le projet avait été rentable. À notre avis, cela confirmait qu'il y avait de la place pour d'autres titres dans ce créneau», explique le cofondateur, aussi designer de jeux.
L'histoire d'Outlast se déroule dans l'asile psychiatrique Mount Massive, situé dans les montagnes du Colorado. Longtemps abandonné, l'endroit a été secrètement rouvert par une entreprise qui y mène des activités de «recherche et de charité». Puis arrive le journaliste Miles Upshur, qui enquête sur les pratiques de ladite entreprise et qui entre à l'intérieur de l'établissement en catimini. Une fois à l'intérieur, le héros sera pourchassé par diverses créatures, dont un médecin (ou était-ce un boucher ?) qui est vêtu uniquement d'un tablier et collectionne les membres humains. Son unique moyen de survivre sera de s'échapper ou de se cacher de ses assaillants. L'objectif du joueur est de trouver le «terrible secret» de l'établissement et d'en faire sortir le journaliste vivant. Le jeu a obtenu une note de 80/100 sur le site Metacritic, une référence dans le domaine de la critique.
Grâce au FMC
M. Morin affirme qu'il a amorcé les démarches pour fonder son studio à l'occasion du Sommet international du jeu de Montréal (SIJM) de 2010, organisé par Alliance numérique, organisme à but non lucratif qui a fait une retentissante faillite de 468 000 $ en 2013. Alliance numérique a émergé de la protection des tribunaux le 31 mars dernier en recentrant ses activités uniquement sur la promotion de l'industrie du jeu vidéo - elle avait auparavant quatre sections : jeu, mobilité, logiciel et formation en ligne.
«Durant le SIJM de 2010, j'ai assisté à des conférences sur le volet financement et démarrage d'un studio. J'ai alors pu rencontrer des gens d'Exportation et développement Canada (EDC) et du Fonds des médias du Canada (FMC). Sans eux, Red Barrels n'aurait pas vu le jour», dit-il. L'édition 2014 du SIJM aura lieu en novembre.
Fort de son premier succès, le studio travaille à la suite de la franchise Outlast et explore la possibilité d'amener la propriété intellectuelle sur d'autres plateformes, comme la bande dessinée ou le cinéma. «Il s'agit de démarches préliminaires. Nous avons été approchés par des producteurs, mais nous sommes un peu frileux pour le moment. Nous voulons avant tout nous assurer de ne pas détruire ce que nous avons bâti jusqu'à présent en poussant Outlast sur de nouveaux marchés», dit-il.
Philippe Morin assure que Red Barrels, dont la clientèle se situe surtout aux États-Unis, en Russie et en Allemagne, n'aura pas besoin de financement supplémentaire pour produire son deuxième jeu, qui pourrait voir le jour en 2016.