Finies les excuses, Bombardier doit respecter ses engagements


Édition du 07 Novembre 2015

Finies les excuses, Bombardier doit respecter ses engagements


Édition du 07 Novembre 2015

Ils acceptent un gel de salaire pour la première année de leur nouveau contrat de travail. Cela aidera certainement, étant donné l'état des finances de l'organisation. On ne parle pas des employés de l'État... Non, il s'agit plutôt des quelque 4 700 machinistes et autres employés de production du secteur aéronautique de Bombardier, qui ont entériné par une forte majorité, dimanche dernier, l'entente qu'on leur soumettait.

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Ils pourront quand même se reprendre un peu, puisque cette nouvelle convention collective comprend une augmentation globale de 6 % sur quatre ans, assortie de bonifications au régime de retraite.

Les syndiqués ont clairement compris que, dans les circonstances, ils devaient être conciliants. Ils devaient aussi envoyer un message aux autres partenaires potentiels qui viendraient épauler financièrement Bombardier, en attendant qu'on puisse enfin faire résonner la caisse grâce à la livraison des appareils CSeries... et en espérant que leur mise en service stimulera les commandes.

Mais la suite ne sera pas facile pour Bombardier. Juste au moment où on espérait une pause dans le cortège de mauvaises nouvelles, voici que se profile un éventuel concurrent au portefeuille bien garni. La société chinoise Comac vient de présenter son dernier-né, le moyen-courrier C919, d'une capacité de 168 passagers. Plus volumineux que le CSeries, il jouera toutefois dans les mêmes platebandes. Son budget de développement est évalué pour l'instant à 15 milliards de dollars canadiens. C'est plus de deux fois ce qu'on a investi chez Bombardier (environ 6 G$, avec un plafond estimé à 7 G$).

L'appareil chinois ne sera pas prêt demain. Il est déjà question d'un report de son entrée en fonction jusqu'en 2020, en tenant compte des certifications internationales toujours délicates à obtenir. Il n'en demeure pas moins que Comac écrémera certainement le marché chinois convoité par Bombardier depuis un bon moment. On lui attribue déjà 517 commandes, toutes d'origine chinoise, à l'exception d'une dizaine d'exemplaires pour la thaïlandaise Thai City Airways. Et ça ne fait que commencer.

Les géants Boeing et Airbus sont déjà présents dans ce créneau, respectivement avec le 737 et l'A320. Ils n'apprécieront pas la concurrence chinoise et seront en mesure de livrer une guerre d'usure. Au moins, cela détournera leur attention du CSeries, qui ne faisait qu'effleurer ce segment de marché avec ses avions moins gros. Mais les aires de trafic deviendront rapidement encombrées.

Tout est maintenant une question de rapidité et de résistance.

Rapidité, parce qu'on doit à tout prix accélérer la cadence chez Bombardier pour être en mesure de livrer - comme convenu - les premiers appareils dans la première moitié de 2016, et plus tôt que tard. Il ne faudrait pas que les clients confirmés s'impatientent. Et une fois le CSeries en fonction, on pourra mieux vérifier si les prétentions de ses concepteurs sont fondées, puisqu'il est censé être plus économique à l'usage et plus silencieux.

Par contre, il ne faudrait surtout pas que la livraison des appareils soit retardée davantage. Bombardier est en train de ternir sa réputation à cet égard. Sa division Transport vit les mêmes problèmes : la Toronto Transit Commission, exaspérée, s'apprête à lui infliger une amende 50 millions de dollars pour les délais répétés dans la livraison des 204 voitures de tramways assemblés à son usine de Thunder Bay. C'est sans compter la patience dont fait preuve la Société de transport de Montréal qui attend, elle aussi, la mise en service progressive de ses 468 voitures de métro Azur.

On peut bien rejeter la faute sur les défaillances de sous-traitants. Au bout du compte, la responsabilité finale incombe au maître d'oeuvre. Être systématiquement en retard n'est pas un bon argument de vente.

Bombardier devra aussi être résistante.

Le pari de proposer un nouvel appareil était audacieux. Il semble aujourd'hui téméraire. Mais on est rendu trop loin pour reculer, même si la trésorerie en a souffert. L'essentiel est de regrouper les forces pour traverser les vents mauvais qui prennent de plus en plus l'allure d'une tempête financière.

L'injection de 1 G$ US par le gouvernement du Québec offre de l'oxygène. Le fédéral pourrait suivre, ce qui ne serait pas déplacé compte tenu de l'aide massive dont a bénéficié General Motors Canada lors de la crise de 2008-2009 (13,7 G$ d'Ottawa et de Toronto). Pour une énième fois, on avance même l'hypothèse d'une participation de la Caisse de dépôt.

Mais s'ils acceptent de donner un coup de pouce à Bombardier, peut-on leur suggérer d'être plus exigeants que Québec ? En effet, le gouvernement provincial a versé l'équivalent d'un chèque en blanc, sans qu'on lui garantisse une présence au conseil d'administration. Québec n'a pas obtenu non plus une entrée formelle au capital de l'entreprise. L'État hérite plutôt d'une participation à une sorte de filiale qui chapeaute le CSeries, mais qui n'a pas encore de revenus et qui ne saurait être profitable avant 2021, quand on aura - théoriquement - épongé le coût du développement de l'appareil.

Avec plus de 17 000 employés au Québec, Bombardier joue un rôle immense. La société bénéficie également d'un très grand capital de fierté. Mais il n'est pas inépuisable. Il est temps de respecter les engagements.

De mon blogue lesaffaires.com/rene-vezina

Retraite

Les investisseurs et les épargnants à la dure On a eu le jour même un exemple de l'impact que cette progression poussive de l'économie peut avoir sur les épargnants. Cette année, les obligations d'épargne du Canada, jadis un placement recherché et prisé parce qu'il est hautement sécuritaire, n'offriront qu'une pitance en matière de rendement : 0,50 % - même pas l'inflation, pourtant elle aussi au plancher. Autrement dit, pour un investissement de 1 000 $, on obtiendra un fabuleux rendement annuel de... 5 $. Vous voulez vous bâtir une retraite avec ça ? Ces rendements de misère deviennent un enjeu tant individuel que collectif.

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