De toutes les régions du Québec, c'est au Saguenay-Lac-Saint-Jean que la récession a frappé le plus durement. Le produit intérieur brut y a fléchi de 2,4 % en 2009.
" La crise forestière est l'élément clé. On a atteint le fond du baril, mais on ne sait pas à quel rythme nous remonterons ", dit Gilles Bergeron, économiste et professeur à l'Université du Québec à Chicoutimi (UQAC).
La région attend le grand projet qui lui donnera un second souffle. Le maire de Saguenay, Jean Tremblay, veut attirer une usine de composants de panneaux solaires ainsi qu'une usine de transformation de biomasse forestière en biodiésel.
Les investissements totaux seraient de 1,8 milliard de dollars (G$), et 800 emplois seraient créés. " Le premier projet pourrait se concrétiser d'ici cinq ans ", signale son porte-parole Richard Banford.
Le développement du Grand Nord est également dans la ligne de mire de la capitale régionale. Saguenay veut devenir le carrefour du Nord. Les autorités municipales ont investi 10 millions de dollars pour ériger un parc industriel à l'aérogare de Bagotville. " Dès le printemps prochain, une trentaine de terrains seront disponibles, surtout pour les manufacturiers en aéronautique qui desserviront le Nord ", précise Éric Gauthier, de Promotion Saguenay. La Ville entend aussi agrandir le port de Grande-Anse, à La Baie, et le relier par voie ferrée afin de répondre aux besoins des grands équipementiers.
L'énigme RTA
La région attend également beaucoup des projets de Rio Tinto Alcan (RTA). On saura d'ici la fin de 2011 si l'entreprise poursuivra la construction de l'usine-pilote AP50 à Jonquière. Des investissements de 3,6 G$ sont prévus. L'agrandissement éventuel de l'aluminerie d'Alma pourrait générer des retombées de 1 G$. Tout dépendra de la vigueur des marchés pour le métal gris.
Chose certaine, RTA n'agira pas comme force motrice de deuxième et de troisième transformation de l'aluminium. Cette sensibilité qui existait avec Alcan a disparu depuis son acquisition par Rio Tinto. La multinationale entend plutôt favoriser et accompagner la croissance locale et mondiale des équipementiers et des fournisseurs de service.
Ce choix en désole plus d'un. Il est qualifié de " tragédie " par l'économiste Roger Boivin, de la société-conseil Groupe Performance Stratégique. " Nous perdons le virage de la deuxième et troisième transformations ", estime quant à lui Alain Boulianne, directeur de la Société des fabricants régionaux.
L'économiste Marc-Urbain Proulx, de l'UQAC, suggère que RTA vende son aluminium à des tarifs préférentiels aux industriels qui s'établiraient dans la région. " À l'heure actuelle, les lingots coûtent le même prix, peu importe la localisation géographique du transformateur ", dit-il.