Les fiducies de placement immobilier (FPI) sont vulnérables à une hausse du taux des obligations de 10 ans, mais une majoration prononcée de ce taux semble improbable dans le contexte économique actuel de faible inflation et de croissance économique modérée, selon des gestionnaires interrogés par Les Affaires.
«Les cours des FPI s'ajustent rapidement à des taux d'intérêt plus élevés, et le taux des obligations fédérales de 10 ans a été, de loin, l'indicateur le plus important pour prévoir cette tendance depuis deux ans. Or, toutes les fois où ce taux a subi des soubresauts durant cette période, il a ensuite redescendu», dit Lee Goldman, gestionnaire du First Asset REIT Income Fund.
«On ne voit guère de resserrement de la politique monétaire ailleurs dans le monde, et l'inflation aux États-Unis ne justifie pas encore des taux beaucoup plus élevés. Nous n'assisterons pas à une hausse en flèche des taux, mais plutôt à une hausse graduelle», estime Michael Missaghie, cogestionnaire du Fonds de placement immobilier Sentry.
La rapide remontée du taux des obligations 10 ans de 1,32 %, le 14 avril, à 2,22 % le 1er juin a fait reculer l'indice plafonné des FPI S&P/TSX de 3,6 %. En 2013, cet indice avait perdu 18,2 % d'avril à août, alors que le taux des obligations 10 ans était passé de 1,69 % à 2,61 %.
«Les circonstances étaient différentes. Les investisseurs avaient alors très mal réagi à la fin annoncée du programme d'achats d'obligations par la Réserve fédérale. Une hausse de taux ne serait pas une surprise aujourd'hui mais, compte tenu des évaluations correctes des FPI, celles-ci ne devraient pas reculer autant. Parce qu'une légère augmentation des taux sur un horizon de 12 à 24 mois reflète une amélioration de l'économie, on pourrait s'attendre à ce que le taux d'occupation des FPI progresse et qu'elles puissent augmenter leurs loyers. Le défi est de repérer les FPI qui pourront faire croître leurs flux de trésorerie dans un environnement de taux à la hausse», soutient Michael Missaghie.
Il concède qu'il s'inquiéterait davantage si une hausse de taux survenait sans croissance économique. Dans ce scénario, il n'y a pas d'augmentation du taux d'occupation et des loyers, mais les coûts d'intérêt augmentent.
Les FPI financent leurs immeubles dans des proportions oscillant entre 50 % et 70 %. Lorsque le coût de financement baisse, les FPI ont le vent dans les voiles. Lorsqu'il monte, elles reculent. Les FPI refinancent de 10 à 15 % de leur dette chaque année.
Durant la dernière crise financière, la valeur en Bourse des FPI canadiennes a chuté de 66 % de février 2007 à mars 2009. C'est la baisse appréhendée de la valeur des immeubles, résultant du coût de financement plus élevé, qui avait le plus contribué à leur écrasement. L'indice plafonné des FPI S&P/TSX n'est revenu à son niveau de février 2007 qu'en avril 2013, niveau qu'il n'a jamais dépassé depuis, bien que le taux des 10 ans ait atteint un creux à 1,24 % en février.
«Si le taux 10 ans n'augmente pas, les FPI devront générer un revenu d'environ 6 %, auquel on peut greffer une appréciation de 3 à 4 % provenant de l'augmentation des loyers ou de la baisse des taux d'intérêt», dit Lee Goldman.
«Les FPI sont correctement évaluées et, par conséquent, nous les sous-pondérons dans notre portefeuille», relate Michael Brown, gestionnaire du Fonds de revenu élevé Fiera Capital.
Les FPI sont pondérées à leur niveau normal dans les quatre portefeuilles de pension personnels Sentry, niveau qui varie de 2,5 % à 10 % selon les mandats.
Il existe aussi quatre fonds négociés en Bourse canadiens spécialisés dans les FPI, dont le First Asset Active Canadian REIT ETF, également géré par Lee Goldman.
Parmi les trois autres qui sont gérés passivement, le plus important est l'iShares S&P/TSX Capped REIT Index (XRE), avec un actif de 1,3 G$. Ce fonds, de même que le Vanguard FTSE Canadian Capped REIT Index (VRE), tente de reproduire des indices fondés sur la capitalisation boursière, mais plafonne le poids d'un titre à 25 % du portefeuille. Le fonds Vanguard est le moins coûteux, avec un ratio de frais de gestion de 0,39 %, par rapport à 0,60 % pour l'iShares.
Le BMO équipondéré de FPI (ZRE) adopte une pondération fixe où celle des 17 FPI oscille entre 5,5 % et 6,2 %, pour réduire le risque de concentration. Ainsi, au lieu de compter pour 20 % du portefeuille dans le XRE, le titre de Riocan ne compte que pour 6 % dans le ZRE. Cette démarche n'a pas réduit sa volatilité de manière dramatique par rapport au fonds iShares. Mais la volatilité n'est pas la seule mesure de «risque».