Comment et quand changer d’administrateurs ?
Élus pour des mandats de 2 à 4 ans, les administrateurs qui avaient autrefois tendance à conserver leurs sièges durant plusieurs années sont aujourd’hui appelés à se renouveler en fonction des besoins de l’entreprise. Pour cela, les entreprises se sont dotées de nouvelles règles qui déterminent la durée et le cadre des mandats.
Si dans le passé, on voyait souvent des administrateurs rester durant 15 à 20 ans, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Les administrateurs sont souvent élus pour un mandat allant de 2 à 4 ans, renouvelable sous certaines conditions, ou non.
« Il existe une rotation dans la plupart des entreprises publiques et plusieurs ont instauré un âge légal de départ à la retraite », souligne Jacques Grisé, expert et auteur d’un blog sur la gouvernance.
L’objectif ? Favoriser le renouvellement des membres du CA et éviter qu’une routine ne s’installe…« Car lorsque la durée s’allonge, l’administrateur acquiert une bonne connaissance de l’entreprise mais peut, en contrepartie, perdre de son indépendance vis-à-vis de la direction. Sans compter qu’il y a de bonnes chances pour qu’au bout d’un certain temps, toutes les bonnes idées aient été dites», résume Michel Magnan, professeur et titulaire de la chaire de gouvernance d’entreprise Stephen A. Jarislowsky de l’École de gestion John-Molson de l’Université Concordia.
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Un cycle de vie à trouver
Pour les entreprises, toute la difficulté reste alors de trouver « le bon cycle de vie » d’un administrateur ! Pour José Mathieu, président de la PME Plastube et administrateur des PME Alta Précision, NSE-Automatech et Composites VCI, elle serait d’au moins 3 ans, « afin de prendre bien le temps de connaître les gens et le marché ». Mais cette durée peut s’avérer très variable en fonction de la nature et des enjeux que rencontrent les entreprises : « Au fur que l’organisation évolue, cela peut prendre des expertises différentes. Après avoir eu besoin de quelqu’un d’expert dans le développement des start-ups, une PME peut avoir besoin de quelqu’un qui est qualifié dans la mise en place de mécanismes de gestion par exemple», cite Jean-Daniel Brisson, directeur principal du Groupe-conseil stratégie et performance du cabinet Raymond Chabot Grant Thornton.
L’implication personnelle
Autre motif de renvoi : la trop faible implication d’un membre du CA. « C’est aussi souvent la responsabilité du président ou du comité de gouvernance d’aller demander à un administrateur de quitter si celui-ci est absent à la plupart des réunions, ou si sa contribution ne devient plus significative », résume Bruno Déry, président et chef de la direction du Collège des administrateurs de sociétés (CAS) Université Laval. Car quelqu’un qui ne mettrait pas le temps nécessaire dans sa préparation met à mal la réussite du CA : «Une personne qui aura manqué 3 CA d’affilée aura aussi manqué des conversations, des cheminements qui rendront ensuite les choses plus difficiles », met en garde Michel Verreault, président du Cefrio.
Mais congédier un membre du CA n’est jamais quelque chose de facile et revêt souvent un caractère politique, car il ne s’agit pas d’un employé, mais de l’un de vos pairs…C’est pourquoi Jean-Daniel Brisson conseille fortement aux entreprises de rémunérer leurs administrateurs. «Payer un administrateur vient renforcer l’indépendance et donne un caractère contractuel à la relation qui fait que si cela ne marche pas, il est plus facile d’y mettre un terme », estime-t-il.
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Des processus d’évaluation nécessaires
C’est pourquoi les CA matures ont tendance à se doter d’un processus d’évaluation individuel ou collectif, supervisé par le président du conseil. «Cela permet d’évaluer les administrateurs sur leur participation, leur attitude, ainsi que sur leur préparation et leur contribution aux décisions. Le président travaille ensuite avec ce matériel pour faire des correctifs ou inciter quelqu’un à céder son siège », ajoute Réjean Dancause, président et directeur général du Groupe Dancause et Associés et administrateur de sociétés privées. Tous les deux ans, il est également conseillé de faire appel à un consultant externe afin de réaliser une évaluation du fonctionnement du CA. « Cela permet de se dire les vraies affaires et d’avoir un point de vue extérieur et indépendant», ajoute Michel Nadeau, directeur général de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP).
Surveiller les conflits d’intérêts
Si la plupart du temps, le renouvellement des administrateurs se fait à la fin de leur mandat, il peut arriver que l’un d’entre eux soit obligé de quitter en cours d’exercice, notamment lorsqu’un conflit d’intérêt se présente avec une autre société sur laquelle il siège ou travaille. « Il faut toujours être attentif à ce qu’une des entreprises sur lesquelles vous siégez ne vienne pas en compétition avec une autre. Ou parfois, que l’entreprise dont vous êtes propriétaire ne devienne fournisseur de l’entreprise sur laquelle vous siégez », commente José Mathieu.
Savoir se retirer
Enfin, le président du Cefrio Michel Verreault estime aussi qu’il faut tout simplement savoir laisser sa place au bout de quelques mandats, afin de permettre un renouvellement d’idées. « Quand je suis dans un conseil, j’essaie de faire environ 5 années pour me retirer ensuite, car je pense que d’autres personnes pourraient aussi contribuer à l’organisation en faisant part de leurs idées », ajoute-t-il.
La carrière d’un administrateur est en conséquence assez courte et peut tout au plus s’étaler sur 15 à 20 ans.
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