BLOGUE. Demain, le travail ne ressemblera à rien de ce qu’on connaît aujourd’hui. À rien du tout. Fini le 9 à 5! Fini la fidélité de l’employé envers son employeur! Fini les week-ends! Fini aussi les collègues de longue date avec lesquels on a noué des liens d’amitié! En 2025, ce sera chacun pour soi, et seuls les plus habiles parviendront à tirer leur épingle du jeu…
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Cette projection dans le futur vous fait-elle peur? Ou du moins vous attriste-t-elle? C’est possible, mais il va falloir vous y résoudre. C’est du moins ce qu’avance Lynda Gratton, professeure de management à la London Business School (LBS), après des mois de recherche sur le sujet avec deux de ses collègues, Julia Goges-Cooke et Andreas Voigt.
Ainsi, Mme Gratton a rencontré quelque 200 hauts-dirigeants de 21 multinationales, entre octobre 2009 et mai 2010, pour les questionner sous toutes les coutures sur les tendances émergentes en matière de travail. Parmi ces entreprises figuraient Nokia, Nomura, Tata, Shell, Thomson Reuters, SAP, et autres BT. Elles ont répondu à des interrogations comme «Quelles tendances actuelles vont influencer le travail de vos employés dans les prochaines décennies?» et «Comment comptez-vous vous préparer aux changements à venir en matière de méthodes de travail?».
Résultat? Des réponses passionnantes desquelles transparaissent quatre tendances majeures, appelées à changer notre manière de travailler d’ici les 15 prochaines années, dévoile la chercheure dans un article de la Business Strategy Review…
1. L’avènement de la compétence. Demain, être généraliste sera obsolète. Seules les personnes ultra-compétentes dans un domaine parviendront à briller. Pourquoi? «Parce que si vous demeurez généraliste, des milliers, voire des millions, de gens seront capables de faire la même chose que vous, mais plus vite, moins cher, et peut-être mieux», dit-elle, en soulignant que «l’important sera de se distinguer de la masse».
2. L’avènement de la connectivité. Paradoxalement, il vous faudra, demain, non seulement vous différencier des autres, mais aussi nouer des liens avec tous ceux qui seront en mesure de vous aider dans votre travail. Être excellent dans son domaine, mais œuvrer tout seul dans son coin ne vous permettra pas d’exprimer tout votre potentiel. Non, il vous faudra bien vous entourer, et donc bien vous intégrer à un groupe de personnes tout aussi brillantes que vous, mais dans leurs propres champs de compétence.
3. L’avènement de la qualité de vie. Demain, les gens ne voudront plus travailler pour gagner de l’argent ou pour «faire ce qu’ils aiment», et donc ne voudront plus accepter certains «sacrifices» pour y parvenir. L’une de leurs grandes priorités consistera à avoir une qualité de vie appréciable au travail. Qu’est-ce que ça signifie concrètement? «Que des mots comme «bonheur» et «régénération» passeront dans le langage courant dès que les gens parleront de travail», dit Mme Gratton.
4. Défis et opportunités. C’est clair, de nouvelles méthodes de travail vont devoir être adoptées dans les années à venir, si l’on veut suivre les trois tendances précédentes. «Des méthodes qui ne sont encore qu’embryonnaires, comme une plus grande démocratisation des décisions d’importance pour l’entreprise», illustre la chercheure. «Cela va demander beaucoup d’essais-erreurs, et peut-être créer des tensions entre les employés et les managers, mais cette étape va être nécessaire», ajoute-t-elle.
Bien entendu, ces changements vont avoir un impact direct sur certains aspects des meilleures entreprises de demain, d’après la professeure de la LBS…
1. Transparence et authenticité. Demain, les membres d’une équipe seront connectés entre eux comme jamais, si bien que le leader sera de plus en plus perçu comme l’un d’eux, et non comme le «boss». Oui, celui-ci sera vu comme la personne capable d’aider les autres à atteindre leurs buts, et à même à grandir dans leur carrière. Bref, le leader est appelé à devenir une nouvelle sorte de coach, transparent et authentique.
2. Des équipes virtuelles ultra-compétentes. Les équipes soudées au bureau, ce sera du passé. De plus en plus, les membres d’une équipe vivront dans des lieux distincts (les uns à Montréal, les autres à Toronto, et le boss à New York, par exemple), et ne se rencontreront la plupart du temps que de façon virtuelle (Skype, Google+, etc.). Le travail du leader n’en sera donc que plus ardu, mais aussi que plus nécessaire…
3. Capital social. De quoi s’agit-il? D’une nouvelle façon de voir les entreprises, en tenant compte de la quantité et de la qualité des liens sociaux qu’elle a, tant à l’interne qu’à l’externe. Autrement dit, plus une entreprise est connectée avec l’extérieur et plus ses employés sont réellement en contact les uns avec les autres, plus elle a de chances d’avoir du succès dans ce qu’elle entreprend. Et par suite, plus elle a de chances d’attirer les personnes talentueuses. Pour bien saisir ce phénomène, un truc consiste à regarder l’entreprise comme l’un des éléments de l’écosystème dans lequel elle évolue : plus elle a de liens avec les autres éléments, plus elle a de chances de grandir harmonieusement.
4. Des relations fructueuses. Dans le même ordre d’idées, les entreprises de demain vont devoir accorder une attention toute particulière aux relations qu’elles entretiennent avec leurs partenaires, leurs clients, et même leurs concurrents. Car les points de contacts entre les uns et les autres vont se multiplier, et vont devoir être gérés autrement qu’ils ne le sont aujourd’hui : par exemple, on peut imaginer qu’un concurrent pourra se montrer féroce sur un point, mais pourra sans problème se transformer en allié sur un autre…
5. Flexibilité. Ce sera sans nul doute le maître-mot de demain. Employés et dirigeants devront s’adapter à de nouvelles façons de travailler, et rivaliser d’imagination sur ce plan : travail à domicile, travail à temps partiel, partage de poste et autres «flexi-heures» (le nombre d’heures allouées à la réalisation d’une mission est réparti comme le souhaite par l’employé, en accord avec le manager) vont ainsi devenir la norme.
Voilà donc ce à quoi devrait ressembler votre travail demain… Du moins, les grandes lignes, car Mme Gratton et ses collègues n’ont pas fini leurs recherches sur le sujet. Depuis octobre dernier, elles ont entrepris la seconde phase de leur projet, qui consiste à aller plus en profondeur dans les quatre tendances qui vont marquer les prochaines décennies. La chercheure tient d’ailleurs un blogue à ce propos, partageant avec ceux que ça intéresse ses dernières trouvailles sur Future of Work.
L’écrivain américain Paul Auster disait dans Moon Palace : «Une fois qu’on a goûté au futur, on ne peut pas revenir en arrière»…
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