Dure semaine pour l'économie québécoise. Les nuages noirs se sont accumulés au cours des derniers jours. S'il est encore trop tôt pour évoquer une récession, un ralentissement prononcé est en cours, notamment en raison de la détérioration rapide du marché de l'emploi.
Voici six facteurs que nous avons relevés au cours de la dernière semaine et qui représentent des risques importants pour la croissance de la province.
1-Le commerce de détail faiblit
Si 2011 a été difficile pour les détaillants, 2012 s’annonce encore pire selon le Conseil québécois du commerce de détail CQCD. L’organisation prévoit en effet une croissance des ventes au détail dans la province de « 2 à 2,2 % », ce qui est inférieur à l’augmentation de 2,5 % enregistrée l’an dernier.
Rappelons que les résultats de 2011 sont les plus faibles depuis 2005, si l’on exclut 2009 (décroissance de -1,1 %).
« Dans un contexte où l'emploi reste stable et où la confiance des consommateurs vacille au Canada, il importe de rester prudents, mais confiants, dans les prévisions de ventes au détail », affirme Gaston Lafleur, pdg du CQCD.
Cet appel à la « prudence » lancé en février semble de mise puisque l’International Council of Shopping Centers (ICSC) a révélé cette semaine que les ventes dans les centres commerciaux du Canada ont chuté de 2 % en janvier par rapport au mois précédent. Il s’agit de la dégringolade la plus sévère depuis avril 2010 (-3,3%).
Statistique Canada observe pour sa part que les ventes au détail au pays ont augmenté de 0,5% en janvier, un résultat décevant pour les analystes qui prévoyaient plutôt une hausse de 1,8%.
2-Le marché de l'emploi se détériore rapidement
Le marché québécois de l'emploi s'était rapidement relevé de la crise financière de 2008-2009, mais il s'est détérioré à vitesse grand V au cours des trois derniers mois. Plusieurs entreprises manufacturières et du secteur pharmaceutique ont annoncé d'importantes mises à pied.
Cette semaine seulement, la fermeture abrupte du fournisseur de services d'entretien aéronautique Aveos a entraîné la mise à pied de 1800 salariés à Montréal. Transcontinental a aussi annoncé la supression de 200 postes dans la métropole, tandis que la pharmaceutique Novartis a reconnu qu'elle s'apprêtait à sabrer dans ses effectifs prochainement.
Autre donnée négative publiée cette semaine: le Québec a encaissé la plus forte hausse en pourcentage du nombre de prestataires d'assurance-emploi au pays, selon les plus récentes données de Statistique Canada.
Le nombre de personnes touchant de l'assurance-emploi en janvier a bondi de 5,3 % au Québec, soit 8 640 prestataires de plus par rapport au mois de décembre 2011, pour un total de 172 190.
PLUS : Le PIB du Québec loin derrière celui du Canada
3-Des prévisions pessimistes
L'économie québécoise devrait continuer à croître plus lentement que celle du reste du pays, ont dit cette semaine les économistes de la Banque Royale. Le PIB du Québec connaîtrait une croissance de 1,6% en 2012, contre une progression de 2,6% au Canada.
Avec un taux de croissance identique en 2011, le Québec se dirige vers la plus faible période de croissance sur deux ans depuis 1995-1996 (en excluant les périodes de récession).
L'économiste en chef de la RBC, Craig Wright s'inquiète de la perte de 61 000 emplois durant l'année 2011, ce qui est presque aussi important que les 64 000 emplois perdus durant la récession 2008-2009.
4-La croissance chinoise s'essoufle
Les prix des métaux industriels ont trébuché cette semaine, refroidis par les inquiétudes persistantes sur la vigueur de la demande chinoise, les grands groupes miniers affichant à l'égard de la Chine une prudence appuyée.
La Chine, premier pays consommateur de métaux de base, a hanté les investisseurs cette semaine, qui redoutent les conséquences d'un ralentissement trop prononcé de la croissance économique du géant asiatique.
"Une salve d'indicateurs encourageants aux États-Unis suggèrent que l'économie américaine progresse sur le chemin de la reprise, mais la Chine apparaît plus fragile que d'habitude, et les stocks très élevés de métaux qui ne cessent d'enfler dans le pays, ne sont pas pour rassurer les investisseurs", a dit à l'AFP Dan Smith, analyste de Standard Chartered.
La Chine devrait bientôt ralentir à «un taux de croissance à un chiffre, si ce n'est déjà fait», a déclaré cette semaine Ian Ashby, président de la branche minerai de fer de BHP. Son concurrent Rio Tinto a quant à lui mis en garde contre le fort ralentissement à court terme de la croissance économique de la Chine.
Un ralentissement trop prononcé de l'économie chinoise est une mauvaise nouvelle pour le secteur minier québécois, qui a été une des locomotives de la province au cours des derniers mois.
5-La TVQ fait grimper le taux d'inflation
Tandis que l'économie de la province ralentit, la hausse des prix des produits et services s'accélère. Selon les données publiées par Statistique Canada vendredi, le taux d'inflation a augmenté de 3,2 % en février au Québec par rapport au même mois il y a un an.
C'est au Québec que les prix ont progressé le plus rapidement au Canada au cours des 12 derniers mois.
«Cette forte inflation est attribuée à l'augmentation d'un point de pourcentage de la TVQ en janvier qui perdurera pour l’ensemble de l’année, ainsi que la hausse des prix à la pompe et chez l’épicier », écrit dans une note Marie-Claude Guillotte, économiste à la Banque Laurentienne.
6-Les grèves paralysent l'économie
Plusieurs milliers d'étudiants opposés à la hausse des droits de scolarité se sont réunis au centre-ville de Montréal, jeudi après-midi. Cette manifestation était le point culminant des protestations qui se tiennent depuis plus d'un mois.
Bien que difficilement mesurable, la prolongation de la grève risque d'avoir des effets négatifs sur l'économie québécoise et pourrait nuire aux entreprises qui embauchent des étudiants durant la période estivale.
Par ailleurs, au cours de la dernière semaine, des grèves survenues chez Air Canada ont entraîné de nombreux retards et des annulations de vols.
Avec Marie-Eve Fournier et AFP.