La baisse du prix du baril de pétrole et quelques mauvaises surprises ont plombé la sélection de nos experts. Ensemble, leurs 12 titres ont procuré un rendement de 0,6 % depuis notre table ronde du 30 août dernier, si on tient compte de l'appréciation du dollar américain. C'est mieux que le S&P/TSX de Toronto, mais un fonds indiciel copiant le S&P 500 à New York aurait créé plus de valeur sur cette courte période, avec ou sans l'effet de devise. Les Affaires fait le suivi.
Jacques Maurice : un premier de classe prudent
Jacques Maurice a beau avoir obtenu le meilleur rendement, à 19,3 %, il est le plus prudent des experts au cours de notre premier suivi. Le conseiller principal en gestion de patrimoine de ScotiaMcLeod se met sur les lignes de côté pour deux de ses trois choix.
Précision Castparts (NY, PCP, 242,70 $ US) offre la meilleure occasion, selon lui. Le fabricant de pièces mécaniques a dévoilé un bénéfice inférieur aux attentes des analystes, mais son action devrait profiter de la «fermeté» du secteur de l'aérospatiale. «De mes trois choix, c'est le titre que je mettrais en avant», précise le conseiller. Le titre, qui monte de 5,2 %, échappe au rouge grâce à l'appréciation du dollar américain.
M. Maurice conserve Visa (NY, V, 263,35 $ US) et Actavis (NY, ACT, 266,06 $ US), qui ont enregistré un rendement de 28,9 % et 23,9 %, respectivement, mais il ne serait pas acheteur aux cours actuels. Les derniers résultats de Visa étaient excellents. La croissance des ventes en ligne pour la période de Noël lui sera favorable, résume le conseiller.
Actavis, pour sa part, a damé le pion à la lavalloise Valeant en achetant le fabricant de botox Allergan pour 66 milliards de dollars américains. «Ça va leur prendre un an ou deux pour digérer l'acquisition, mais fondamentalement, c'est positif», estime M. Maurice.
Christine Décarie : de mauvaises surprises chez Lumenpulse
L'actualité a réservé quelques surprises à Christine Décarie, vice-présidente et gestionnaire de portefeuille chez Groupe Investors. Ses choix reculent de 3,8 %.
En retrait de 16,4 % depuis la table ronde, Lumenpulse (Tor., LMP, 16,91 $) a «déçu» celle qui gère un fonds de sociétés québécoises. Le spécialiste montréalais de l'éclairage a connu des difficultés opérationnelles inattendues. Des dirigeants ont également vendu des actions en pleine correction boursière, une décision malhabile, faite au mauvais moment, selon Mme Décarie. «Je ne pense pas que ma thèse sur le fort potentiel de croissance de l'éclairage DEL soit brisée, mais à court terme j'aimerais m'assurer que tout rentre dans l'ordre.» Le portrait pourrait être différent au moment où vous lisez ces lignes, puisque la société publie ses résultats le 11 décembre.
Dans un autre dossier, le départ soudain à la retraite du Québécois Louis Chênevert, le pdg de United Technologies (NY, UTX, 111,29 $), n'est pas sans soulever lui aussi son lot de questions. Mme Décarie est rassurée cependant de voir le chef des finances Greg Hayes, un vétéran au sein de l'entreprise, lui succéder. Son opinion reste inchangée : l'entreprise devrait profiter de deux cycles favorables dans l'aérospatiale et la construction non résidentielles. Le titre a gagné 8 %, toujours en tenant compte de l'effet de devise favorable aux investisseurs canadiens.
L'actualité a été moins volatile en ce qui concerne Rona (Tor., RON, 13,44 $), dont les ventes comparables (une donnée clé pour mesurer la croissance interne d'un détaillant) ont augmenté lors des plus récents résultats après «trois à quatre années» de déclin. Mme Décarie, qui mise sur le plan de redressement de la nouvelle équipe et les faibles attentes du marché, y voit un signe encourageant. Le titre perd 3,8 %
Philippe Hynes : un résultat plombé par le secteur pétrolier
Le verre de Philippe Hynes, président et gestionnaire de portefeuille de Tonus Capital, est à moitié plein. Même si la baisse du pétrole a heurté ShawCor (Tor., SCL, 43,56 $) et PHI (Nasdaq, PHIIK, 41,87 $ US), ceux-ci ont mieux performé que le secteur pétrolier. Ses trois choix ont décliné de 6 %.
L'action du producteur de revêtement de pipeline ShawCor a glissé de 27,2 %. «À court terme, je ne peux pas prévoir ce que va faire le pétrole, mais à long terme, les perspectives sont bonnes pour ShawCor, qui a un bilan solide», commente M. Hynes. Il note que l'entreprise continue d'enregistrer de lucratifs contrats et que la majorité de ses activités proviennent du gaz naturel, dont le prix est stable.
Les activités du spécialiste de transport par hélicoptère PHI sur les plateformes de forage dans le golfe du Mexique ne seraient pas nécessairement les premières à cesser s'il y a un surplus d'offre de pétrole dans le marché, croit le portefeuilliste. De plus, la société a augmenté ses prix dans le transport médical. Le titre a gagné 9,4 %.
M. Hynes ne voit pas de raison à la stagnation de l'action du conglomérat Leucadia (NY, LUK, 23,07 $ US), qui est sorti du territoire négatif grâce à l'effet de devise. Il note que la valeur comptable de l'entreprise, «la donnée importante», a continué de croître. Le gestionnaire avait choisi ce titre parce que les difficultés de la division de détail faisaient en sorte que l'action de l'ensemble du conglomérat, qui possède la banque d'affaires Jefferies, était peu chère.
Dominique Vincent : des performances aux extrêmes
La subite chute du pétrole a plombé la sélection de Dominique Vincent. En perdant près de 58 % de sa valeur depuis la table ronde, Baytex Energy (Tor., BTE, 18,91 $) amène le rendement combiné de ses trois choix en retrait de 7,1 %.
La pétrolière de Calgary, dont le bilan a été alourdi par l'acquisition de l'australienne Aurora en juin pour 2,8 G$, a été «durement touchée». Bien que Baytex soit déjà parvenue à diminuer son passif, la chute du prix du baril soulève des questions quant à la possibilité que son ratio d'endettement/flux de trésorerie augmente. Les investisseurs surveillent également la capacité de l'entreprise à maintenir son dividende.
La vice-présidente et gestionnaire de portefeuille chez MacDougall, MacDougall et MacTier, quant à elle, a profité de la baisse pour racheter d'autres actions de Baytex. «Les pays producteurs et les acteurs de l'industrie ne peuvent pas tous se permettre de continuer leur production avec un baril dans les 60 $ US, explique-t-elle. Les prix devraient remonter vers les 80 $ US.»
Ce revers masque un coup de circuit : un rendement de 27 % avec Mylan (Nasdaq, MYL, 58,41 $ US), le deuxième gain le plus fort de la table ronde. Les délais d'approbation de certains médicaments et l'impact d'un resserrement des règles fiscales inquiétaient certains analystes. Tous ces risques se sont dissipés depuis la table ronde, comme l'avait anticipé Mme Vincent. Elle aime le fabricant de médicaments génériques pour la diversification de son offre et la barrière à l'entrée que constitue la complexité de ses produits.
Grâce à une augmentation de l'achalandage dans ses parcs d'attractions et à un rendement de 9,5 %, Walt Disney (NY, DIS, 93,76 $ US) est sur la bonne voie, croit la portefeuilliste. La rentabilité de ses franchises populaires (Star Wars, Pixar et les héros de Marvel) lui plaît, d'autant plus que le consommateur américain reprend du poil de la bête.
Les rendements des gestionnaires¹
Jacques Maurice, ScotiaMcLeod
Visa (NY, V) 28,9 %
Precision Castparts (NY, PCP) 5,2 %
Actavis (NY, ACT) 23,9 %
Total 19,3 %
Christine Décarie, Groupe Investors
United Technologies (NY, UTX) 8,0 %
Lumenpulse (Tor., LMP) -16,4 %
Rona (Tor., RON) -3,1 %
Total -3,8 %
Philippe Hynes, Tonus Capital
ShawCor (Tor., SCL) -27,2 %
PHI (Nasdaq, PHIIK) 9,4 %
Leucadia (NY, LUK) -0,1 %
Total -5,9 %
Dominique Vincent, MacDougall, MacDougall et MacTier
Disney (NY, DIS) 9,5 %
Baytex (Tor., BTE) -57,9 %
Mylan (Nasdaq, MYL) 27,1 %
Total -7,1 %
Rendement de la table 0,6 %
Rendement TSX -7,4 %
Rendement S&P 500 en tenant compte de l'effet de devise 9,33 %
¹ Les rendements des experts tiennent compte de l'effet de devise et du dividende
Source : Bloomberg, à la fermeture du 5 décembre 2014