L’achat par Vêtements de Sport Gildan des actifs du fabricant Doris des bas collants diaphanes de marques Secret et Silks est une transaction classique pour la société, pleine de valeur ajoutée.
Les produits, les réseaux de distribution et les nouvelles clientes (les femmes) sont tous complémentaires à ce que Gildan offre déjà.
Les analystes sont ravis de l’achat des actifs de Doris pour 110 millions de dollars canadiens, ses 400 employés son usine de tricot, de teinture et d’emballage, de Montréal. Six des huit analystes consultés haussent en effet leur cours-cible, propulsant l’action de Gildan (Tor., GIL, 62,65 $) à un nouveau sommet historique, de 62,85 $, le 20 juin.
Un tel achat peut sembler mineur pour une entreprise avec des ventes de 2,4 milliards de dollars américains, mais il sert bien la stratégie de la société en alimentant sa croissance interne, explique Martin Landry, de Valeurs mobilières GMP.
Les analystes calculent que Doris ajoutera dans l’immédiat 3 % au bénéfice d’exploitation et 2 % au bénéfice net de Gildan dès 2015. Mais c’est le potentiel des revenus qui intéresse les financiers.
Gildan pourra rapidement doubler les revenus actuels de 95 M$ de Doris, tout en gonflant les ventes de ses autres produits.
Multiples leviers à exploiter
Gildan perce le marché de la lingerie féminine pour la première fois en devenant le premier fournisseur canadien de bas collants diaphanes, de collants, de produits chaussants et de vêtements amincissants de marques au Canada, avec 75 % du marché, et le troisième en Amérique du Nord. Gildan fabrique déjà des chaussettes et des sous-vêtements pour femmes.
Déjà numéro un dans les chaussettes pour hommes, Gildan renforce notamment sa force de frappe auprès des détaillants de masse et des grands magasins, en ajoutant les produits de lingerie féminine, explique Kenric Tyghe, de Raymond James.
« Avec Doris, Gildan obtiendra plus de programmes d'achat de la part de nouveaux détaillants et plus d’espace de tablette auprès de ses clients existants », dit-il.
Doris lui ouvre aussi le marché des épiciers et des pharmaciens, où Gildan pourra offrir d’autres produits de marque Gildan et des chaussettes Golden Toe. Doris réalise 70 % de ses revenus au Canada, 30 % aux États-Unis.
Importer à meilleur prix du Honduras
Importer à meilleur prix du Honduras
Gildan a l’intention de conserver l’usine montréalaise de Dorel, mais pourrait éventuellement rapatrier en Amérique centrale la fabrication des produits que Doris fait actuellement fabriquer en l’Asie.
Si les tarifs de douanes actuels de 16 à 18 % entre le Honduras et le Canada sont éliminés comme prévu d’ici la fin de 2014, Gildan pourrait importer à meilleur prix et ainsi obtenir plus d’espace de tablettes chez les détaillants canadiens, explique Chase Bethel, de Marchés des capitaux Desjardins.
La société aura alors l'incitatif d'amplifier la présence de ses marques au Canada, où elle est moins présente. Les tarifs de douanes ont déjà été éliminés entre le Honduras et les États-Unis.
En augmentant ses revenus plus rapidement que ses coûts, Doris améliorera aussi naturellement ses marges d’exploitation, qui sont actuellement nettement inférieures à celles de ses rivaux.
Doris pourrait ajouter 0,15 $ de plus au bénéfice annuel par action de Gildan si sa marge d’exploitation passe de 14,7 % à 30 %, estime Vishal Shreedhar, de la Financière Banque Nationale.
M. Bethel évalue que Gildan peut aller chercher des revenus additionnels de 75 à 125 millions de dollars américains assez rapidement, en offrant ses propres produits au réseau de clients de Doris et vice-versa.
Un tremplin pour mieux rivaliser ses concurrents
Un tremplin pour mieux rivaliser ses concurrents
Doris, dont Gildan conserve l’équipe de direction, deviendra aussi un tremplin pour d’autres acquisitions de lingerie féminine, un marché estimé à 5 à 10 milliards aux Etats-Unis, prédisent les analystes.
« Les marques de Doris sont fortes, avec Secret dans les collants de base et Silks dans le segment de moyen de gamme (Chez La Baie notamment). Gildan pourrait y greffer d’autres produits pour femmes », indique M. Bethel.
Stephen MacLeod, de BMO Marchés des capitaux, rappelle d’ailleurs que le rival américain de Gildan, Hanesbrands (NY, HBI), a acquis le fabricant de lingerie féminine Maidenform, en juillet 2013.
Même si l’action de Gildan a grimpé de 55 % depuis un an, 15 analystes en recommandent encore l’achat. Neuf autres suggèrent de le conserver.
Leur cours-cible moyen de 70,29 $ laisse entrevoir un gain potentiel d’encore 12 %.
M. Landry estime que Gildan peut accroître ses revenus de 1,5 milliard de dollars ou de 65 % d'ici 5 ans, tout en réalisant une croissance annuelle de 15 à 17 % de ses bénéfices, grâce aux économies d'échelle de son important programme d'investissement.