Alors que les titres pétroliers poursuivent leur descente en vrille, est-il trop tôt pour s'y intéresser ? Après tout, l'indice plafonné de l'énergie S&P/TSX a chuté de plus de 50 % depuis son dernier sommet de juin 2014, au moment où le prix du pétrole subit sa plus longue glissade depuis 1986.
Certains analystes prévoient que ce prix peut encore baisser jusqu'à 20 $ US le baril. C'est notamment l'opinion de l'économiste américain A. Gary Shilling, dont l'argument central est qu'aussi longtemps que le prix du pétrole est supérieur à son coût marginal de production1, l'extraction, pour compenser la perte de revenu résultant du prix plus bas qu'obtiennent actuellement les producteurs, se trouve encouragée.
Il rappelle que, dans le bassin permien du Texas et dans le golfe Persique, ce coût varie de 10 à 20 $ US le baril, et est même plus bas pour certains puits saoudiens.
A. Gary Shilling craint donc que la production n'augmente encore davantage. La production de pétrole de l'OPEP aurait atteint 31,51 millions de barils par jour (Mb/j) en juillet, en hausse 101 000 barils par jour par rapport au mois précédent, selon des sources secondaires. Elle était de 30,3 Mb/j au quatrième trimestre de 2014. En même temps, la production aux États-Unis n'a que très légèrement diminué depuis son sommet récent de 9,6 Mb/j et se situait à 9,4 Mb/j en juillet.
Dans son rapport d'août, l'OPEP estime la demande pour son pétrole à seulement 29,23 Mb/j. Elle estime qu'au niveau mondial, le surplus de l'offre par rapport à la demande de pétrole était de 2,87 Mb/j au deuxième trimestre de 2015.
Dans un communiqué du 10 août, la Banque mondiale estimait que la levée des sanctions liées au programme nucléaire de l'Iran aurait pour effet, à terme, d'accroître de 1 Mb/j la production de pétrole, réduisant de 10 $ US le prix du baril l'an prochain.
A. Gary Shilling souligne qu'en 1986, lors de la dernière augmentation de la production des pays de l'OPEP, le prix du baril avait atteint 10 $ US.
Confiance dans le potentiel des titres à long terme
Toutes ces statistiques laissent de marbre Garey J. Aitken, gestionnaire du Fonds d'actions canadiennes Franklin Bissett, qui continue à ajouter à sa pondération de sociétés productrices de pétrole et gaz : «Nous avons plus que jamais confiance dans le potentiel à long terme de ces titres à partir de leurs cours actuels déprimés. Le marché nous présente indubitablement une rare occasion de rendement supérieur. Le niveau de pessimisme compris dans le prix actuel est, à notre avis, extrême. Nous avons déjà vu ces cycles du prix du pétrole dans le passé, et les périodes de liquidation ont toujours créé des occasions d'achat. C'est encore le cas cette fois», juge-t-il.
Il reconnaît que les sociétés productrices de pétrole traversent une période difficile, mais il croit qu'elles redeviendront rentables à moyen terme. C'est qu'il n'utilise pas le cours actuel du pétrole dans l'évaluation des sociétés, mais plutôt ceux que suggèrent les contrats à terme sur le pétrole, contrats dont se servent les sociétés pour vendre à l'avance leur production.
Vers une hausse des cours du pétrole ?
«Le 21 août 2014, les contrats affichaient des prix du pétrole plus élevés pour les livraisons rapprochées que pour les livraisons plus éloignées. Mais aujourd'hui, c'est exactement l'inverse. Les contrats à terme des échéances à long terme affichent des prix plus élevés que ceux dont les échéances sont à court terme, ce qui indique que les investisseurs pensent que le cours du pétrole remontera à l'avenir. Certes, les prix prévus ont beaucoup chuté d'août 2014 à août 2015, mais même en utilisant ces prix plus bas, nous trouvons certains titres pétroliers attrayants», affirme Garey J. Aitken.
Ce dernier gère aussi la Catégorie de société d'énergie Franklin Bissett, un fonds spécialisé en titres énergétiques. Ce fonds a dégagé un rendement annuel composé de - 0,88 % depuis sa création en juin 2007, jusqu'au 31 juillet 2015. Les 10 dernières années ont été très difficiles pour les détenteurs de fonds énergétiques. Une approche à plus court terme a quelquefois porté ses fruits. Au sortir de la crise, la Catégorie de société d'énergie Franklin Bissett a rapporté 57,4 % en 2009 et 50,07 % en 2010. Il y a fort à parier qu'il en sera de même à la sortie de la prochaine récession.
1 Le prix selon lequel les flux de trésorerie générés par la vente d'un baril additionnel tombent à zéro.
Fellow CSI, Yves Bourget a fait carrière dans l’industrie des valeurs mobilières pendant une vingtaine d’années, en particulier à titre de vice-président pour le Québec de Placements Altamira, de 1990 à 1997. Il collabore depuis 2001 à la publication Finance et Investissement, notamment en matière de fonds communs.